Les classes préparatoires aux grandes écoles face aux défis de la rentrée 2024 

Amélioration de l’orientation, attractivité des classes préparatoires, continuum avec les grandes écoles, attentes renouvelées des étudiants… Les enjeux ne manquent pas pour la prochaine rentrée. Des acteurs académiques et associatifs, mobilisés pour les relever collectivement, ont livré leur analyse lors d’un webinaire organisé par Campus Matin et Skema business school.

Cycle : Campus Matin

Ces dernières années, le monde des classes préparatoires connaît de nombreux bouleversements. 2023 n’a pas échappé à cette tendance, comme le rappelle Alain Joyeux, président de l’Association des professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales (Aphec) : « Les effectifs sont remontés à la dernière rentrée, notre objectif est de favoriser la poursuite de cette hausse. Nous avons par ailleurs connu des moments de grandes tensions dans l’académie de Paris, dont le recteur souhaitait fermer des classes de proximité — une décision heureusement annulée par le ministère. 2023 a donc été une année plus sereine, mais aussi une année de réflexion pour continuer à s’adapter à un environnement mouvant. »

Un bilan 2023 en demi-teinte

Pour Quentin Leroux, président de l’association de promotion des classes préparatoires option technologique (ADEPPT), « 2023 a été une année de défense, avec l’Aphec, d’un système auquel nous croyons beaucoup. S’il n’y a pas d’inquiétude sur le vivier de jeunes, nous devons rester vigilants sur notre capacité à les convaincre, et à rassurer nos tutelles sur la légitimité et la solidité de notre action. »

Grégoire Kraoul-Riera est vice-président du BNEM. - © D.R.
Grégoire Kraoul-Riera est vice-président du BNEM. - © D.R.

Grégoire Kraoul-Riera, vice-président du Bureau national des étudiants en école de management (BNEM), rappelle pour sa part l’importance de la classe préparatoire, « une voie d’accès qui participe de la richesse et de la diversité des écoles ».

Pour l’étudiant de Skema business school, la baisse d’attractivité des CPGE ces dernières années s’explique notamment par le contexte de crise sanitaire, qui a réactivé l’image de sacrifice associée à la prépa, et à laquelle les jeunes ne seraient plus prêts. « Or la classe préparatoire n’a rien d’une période de privation : c’est l’ouverture de possibles, la découverte d’autres mondes, et donc davantage de liberté. »

Un double enjeu : la communication au service de l’orientation

Cette vision faussée est l’un des facteurs qui ont incité la Conférence des directeurs d’écoles françaises de management (CDEFM) à lancer, fin novembre 2023, la campagne #Préparetoi pour mettre en valeur les spécificités de la prépa. Elle a été précédée d’une grande enquête qui a révélé que les jeunes sont prêts à travailler beaucoup pour réussir, mais refusent de renoncer à leurs passions, à leur vie personnelle.

François Beckrich est vice-président de l’Association des proviseurs de lycées à classes préparatoires aux grandes écoles. - © D.R.
François Beckrich est vice-président de l’Association des proviseurs de lycées à classes préparatoires aux grandes écoles. - © D.R.

Tous les intervenants rappellent que l’épanouissement des élèves de prépa est une préoccupation partagée, tout au comme l’importance de la sociabilité, de l’esprit de coopération encouragé davantage que celui de compétition. François Beckrich, proviseur du lycée du Parc, vice-président de l’Association des proviseurs de lycées à classes préparatoires aux grandes écoles, rappelle ainsi que le moteur des élèves de CPGE reste la perspective d’intégrer des écoles de haut niveau, et de bénéficier de formations de grande qualité : « L’immense majorité des jeunes qui sont passés par une prépa plébiscitent ce modèle ».

Pour Alice Guilhon, directrice générale de Skema business school et présidente de la CDEFM, « cette campagne vise aussi à s’adresser à des jeunes qui n’ont pas de CP à proximité. Il y a donc un enjeu d’information pour toucher un maximum de lycéens, et donc un enjeu d’orientation. »

Une vision commune entre grandes écoles et classes préparatoires

Quentin Leroux est président de l’ADEPPT. - © D.R.
Quentin Leroux est président de l’ADEPPT. - © D.R.

Quels axes d’amélioration doivent-ils être envisagés pour relever les défis qui se présentent aux CPGE ? Du côté des élèves de STMG, la problématique est double : renforcer la notoriété du modèle de classe prépa, et lever l’auto-censure. « Nous nous employons à y répondre, indique Quentin Leroux. Les efforts de communication sont payants. »

François Beckrich estime que le problème n’est pas le déficit d’information, mais le tri des nombreuses formations disponibles : « Du fait de budgets de communication limités, il est difficile de se démarquer pour faire ressortir les spécificités et avantages de ce modèle ».

Alice Guilhon appelle donc à faire davantage, conjointement, avec une feuille de route commune : « Il faut bâtir pour une vision partagée, sur la base d’une envie de travailler ensemble. Cette démarche est engagée depuis quelques années. »

Grégoire Kraoul-Riera indique pour sa part que le BNEM contribue à cette dynamique avec des témoignages en salon étudiant, et par la mise en place de missions d’orientation que l’association entend développer. « Le besoin d’une information claire, fiable, est un sujet majeur, qui est également le rôle des médias, des salons, des pouvoirs publics. »

Quatre groupes de travail Aphec-CDEFM

Les CPGE ont donc face à elles nombre de défis à relever, à image du travail sur le continuum, lancé il y a quelques années par l’Aphec et la CDEFM.

Alain Joyeux préside l’Aphec. - © D.R.
Alain Joyeux préside l’Aphec. - © D.R.

Comme le précise Alain Joyeux, « la réflexion consiste à sortir d’une logique 2+3 au bénéfice d’une approche 2+1+2, afin que l’année de pré-master soit une année de transition, avec des disciplines générales favorables à la réflexion, à l’analyse, à l’approfondissement, et l’introduction progressive des disciplines de management. » Soit une transition plus lisible, donnant davantage de cohérence au parcours en cinq ans.

Cette réflexion commune des grandes écoles et des professeurs CPGE, dont l’ambition est de définir des propositions communes et les présenter aux tutelles, se traduit par plusieurs groupes de travail : continuum, donc, mais aussi mathématiques (en particulier les deux parcours en prépa ECG), expérience étudiante et concours.

Des jeunes en quête de valeurs et d’impact

Le webinaire a ainsi permis de dresser plusieurs axes de progrès, dont certains en cours de concrétisation. Il a également été l’occasion d’évoquer la mise en place des classes préparatoires aux études supérieures (CPES). François Beckrich évoque l’ouverture, il y a deux ans, d’une classe dédiée dans le lycée du Parc avec l’ENS Lyon. « Les élèves interrogés nous indiquent qu’ils n’auraient pas fait de classe préparatoire sans la CPES. Ce parcours, qui contribue à la diversification de l’offre, intéresse déjà certaines grandes écoles. »

Alice Guilhon est directrice générale de Skema business school. - © D.R.
Alice Guilhon est directrice générale de Skema business school. - © D.R.

Quant à Alice Guilhon, elle a conclu l’événement avec les principaux résultats de la vaste enquête mondiale Youth Talks, réalisée par la fondation Higher education for good (HE4G), et qui a recueilli près d’un million de contributions. « S’il n’y a pas une jeunesse, mais des jeunesses, elles ont des préoccupations partagées. Elles n’attendent pas uniquement la transmission de savoir-faire, mais aussi de valeurs et de vertus, comme le respect, la solidarité, la tolérance. » 

Des résultats qui, pour Alain Joyeux, confortent le positionnement des classes préparatoires, « un environnement favorable au développement de valeurs, d’esprit critique, de la volonté d’avoir un impact ».