Les nouveaux défis des CPGE à la rentrée 2024
Filière d’excellence aux multiples atouts, les classes prépa font face à plusieurs enjeux pour maintenir leur attractivité. Parmi les réponses : l’annonce, lors du webinaire co-organisé par Skema Business School et Campus Matin, le 18 septembre, d’un certificat en « arts libéraux » pour les diplômés de master à l’issue du parcours de classe préparatoire aux grandes écoles.
Cycle : Campus Matin
La démonstration du dynamisme et du rayonnement des écoles de management passe par des éléments objectifs. En introduction du webinaire, Mathilde Gollety, présidente de la Commission d’évaluation des formations et diplômes de gestion (CEFDG) a donc apporté quelques données basées sur l’enquête réalisée auprès des établissements.
« Depuis une dizaine d’années, les effectifs étudiants n’ont cessé d’augmenter : + 51 %, contre 18 % dans l’ensemble de l’enseignement supérieur ». Elle met également en avant la hausse des effectifs apprentis et boursiers, le recrutement des étudiants en programme Grande école (PGE), majoritaire via l’admission sur titre ; ou encore le rayonnement international - étudiants étrangers, accréditations, partenaires académiques.
« 186 diplômes sont reconnus par le ministère en 2024, dont 19 nouveaux par rapport à la rentrée 2023 », précise-t-elle, en soulignant une augmentation de 109 %, en 10 ans, des formations évaluées.
Ce bilan positif, qui confirme la volonté d’amélioration continue des grandes écoles, est complété par la diversification dans l’offre de formation - programmes en quatre ans ; PGE post-bac en cinq ans…
Comme Alice Guilhon, directrice Skema business school, le président de l’Association des professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales (Aphec) s’est réjoui du dynamisme des grandes écoles. « Nous avons tous acté la fin d’un modèle dominant et la pluralité d’accès aux grandes écoles en fonction des profils, des origines », a indiqué Alain Joyeux.
Coût de la formation, compétences comportementales, modèle 2+3 : trois axes de réflexion
Pour Bruno Magliulo, inspecteur d’académie honoraire et auteur de Les Classes préparatoires et autres voies d’accès aux grandes écoles (éditions Fabert, à paraître), plusieurs défis doivent intégrer la réflexion sur la place des CPGE et sur leur avenir.
D’abord, le coût de formation des élèves dans un contexte budgétaire tendu ; ensuite, l’importance de mettre davantage l’accent sur les compétences comportementales, tout en maintenant le niveau académique ; enfin, le format 2+3, qui reste largement incompréhensible à l’étranger. « Faut-il passer à un modèle de classe prépa en trois ans, suivie de deux années de formation professionnalisante, plus proche du modèle nord-américain ? », s’est notamment interrogé Bruno Magliulo.
Adopter une logique de ROI
Sur la question financière, Quentin Leroux, président de l’association de promotion des classes préparatoires option technologique (ADEPPT), estime qu’il faudrait prendre en compte les coûts de formation par étudiant qui réussit, en adoptant une logique de retour sur investissement.
« Nous devons davantage communiquer sur les 100 % de réussite atteints par les classes préparatoires, et sur la facilité d’intégration dans des écoles de management, dans une logique de continuum. »
Il alerte par ailleurs sur les risques pesant sur le financement de l’apprentissage. Sans cette possibilité, nombre de jeunes n’envisageraient pas de s’engager dans un parcours CPGE-grande école.
Un certificat pour reconnaître la plus-value d’un modèle unique dans l’enseignement supérieur
Comment faire bouger les lignes sans remettre en question ce qui fonctionne ? C’est tout le défi qui se pose aujourd’hui. Comme le rappelle Alice Guilhon, « si notre système est spécifique sur la scène internationale, il est aussi - et surtout - efficace. On peut toujours évoluer, par exemple en liant mieux les contenus, en établissant des progressions plus adaptées entre CP et écoles… Le chantier est déjà ouvert, la volonté est là, avec une conviction : faire en sorte que le système reste hyper-performant et très attractif. »
Un avis partagé par Alain Joyeux, qui a rappelé le taux de réussite unique dans le paysage de l’enseignement supérieur et l’attractivité des diplômés passés par une classe prépa et un PGE auprès des entreprises ; mais aussi les efforts importants réalisés en termes de mixité sociale. C’est aussi le sens de la campagne de communication réalisée par la CDEFM et l’APHEC pour valoriser ce modèle d’excellence.
Un pas de plus vient d’être franchi. Le conseil d’administration de la CDEFM a décidé de délivrer, au niveau du master, un certificat en « arts libéraux » pour les étudiants issus d’une classe préparatoire. Trois objectifs sont visés : souligner les acquis complémentaires des CP et des grandes écoles ; donner corps au continuum entre ces deux temps du parcours ; et apporter une plus-value dont les diplômés pourraient se prévaloir auprès des entreprises.
Faire confiance aux classes prépa et aux grandes écoles
Pour Mathilde Gollety, « cela répond au besoin très fort de reconnaissance des jeunes passés par cette voies, tout en aidant également les potentiels employeurs à distinguer les voies d’accès et à repérer les compétences spécifiques associées au continuum ».
« Le certificat sera un levier de différenciation, en cohérence avec le travail mené avec le ministère sur les blocs de compétences », ajoute Alice Guilhon.
En guise de conclusion, chaque intervenant a mis l’accent sur un point important pour l’avenir des classes prépa et la pérennité d’un système qui, comme tous le reconnaissent, fonctionne. Bruno Magliulo a rappelé que les réflexions doivent continuer, notamment sur le volet financier et sur le contenu pédagogique.
Pour Alain Joyeux et Quentin Leroux, il est essentiel de prendre en compte l’évolution de la posture des jeunes tentés par la classe prépa : s’ils sont prêts à beaucoup travailler, ils refusent de tout lui sacrifier.
Le mot de la fin a été apporté par Alice Guilhon : « Il est important de nous faire confiance, afin de nous laisser la possibilité de travailler sereinement. Nous pourrons ainsi améliorer un système qui fonctionne, en couvrant des chantiers envisagés sur le long terme. »