Coopérations établissements-entreprises, quelles bonnes pratiques ?
Si les relations avec les entreprises se sont longtemps concentrées sur le recrutement et les ressources humaines, des coopérations plus structurantes autour de la recherche et de l’innovation se renforcent. Retour sur le webinaire Campus Matin du 23 janvier 2025 en partenariat avec Emerging.
Cycle : Campus Matin
Comment travaillent les entreprises et les institutions d’enseignement supérieur ? C’était la question posée aux intervenants du dernier webinaire organisé par Campus Matin avec Emerging, un cabinet de conseil en ressources humaines engagé dans la redéfinition de l’employabilité.
À travers une analyse approfondie et renouvelée chaque année des besoins des employeurs dans le monde, Emerging aide à établir des ponts entre l’enseignement supérieur et le monde de l’entreprise, permettant aux institutions académiques de répondre aux défis d’une économie en mutation.
À cet égard, depuis 2010, Emerging produit le Global employability university ranking and survey. Une étude, dont l’édition 2025 a été publiée le 14 novembre 2024 par le Times Higher Education, qui permet d’observer les attentes des employeurs dans le monde.
La coopération entreprise-université, élément central de satisfaction des employeurs
Le sujet de la coopération semble donc aujourd’hui central, au moment où les universités ont besoin des entreprises pour mener des projets de recherche ou concevoir de nouveaux programmes. De leur côté, les professionnels sont en quête de futurs talents, mais doivent également se projeter dans de nouvelles technologies émergentes en collaborant avec les meilleurs chercheurs.
Sandrine Belloc, directrice générale du cabinet, a commencé par présenter les chiffres résultats de cette dernière étude, qui permettent d’envisager la collaboration à travers le concept d’employabilité. Selon elle, le domaine de la coopération devient un des sujets parmi les plus importants dans l’indice de satisfaction des employeurs vis-à-vis de l’enseignement supérieur. À court terme, ces collaborations se mesurent à la lumière des compétences et de l’expérience professionnelle des personnes recrutées.
Les entreprises cherchent des experts opérationnels dotés d’une capacité d’adaptation rapide aux technologies, d’un fort esprit collaboratif, connectés aux réalités industrielles et ouverts au monde. Et pour cela, elles souhaitent instaurer un dialogue avec l’enseignement supérieur. « En France, la coopération s’est déjà renforcée puisqu’elle ne repose plus simplement sur les programmes de stages, elle se porte aujourd’hui massivement sur les projets pratiques, tandis qu’en Allemagne, on insiste sur la création de laboratoires partagés, ou qu’à Singapour, la principale préoccupation des employeurs est la promotion de l’innovation. Mais de manière générale, sur l’ensemble de la planète, les projets de coopération explosent », souligne la DG d’Emerging.
En ce qui concerne les modalités concrètes de partenariat, si le stage reste le principal levier dans le monde, la demande change, et « les parties prenantes veulent aller plus loin et s’inscrire dans un temps long, dans une vision globale de qualification continue et d’innovation technologique ».
Des attentes qui évoluent
De son côté, Marie-Christine Bert, directrice des partenariats entreprises de l’École nationale des ponts et chaussée (ENPC, membre d’IP Paris), confirme que les attentes des entreprises évoluent. « Les demandes autour de l’innovation et de la recherche montent. En France, nous avons une tradition de mixer l’entreprise avec le monde académique. Nous sommes d’ailleurs souvent appelés par des établissements étrangers pour partager notre savoir-faire dans ce domaine. »
D’après Angela Vasanelli, professeure à l’Université Paris Cité et directrice de l’école d’ingénieurs Denis Diderot, il est possible d’expérimenter des relations à taille humaine, y compris dans une université qui compte à ce jour 65 000 étudiants. « Il faut aller au-delà du stage ou des relations entreprises. L’apprentissage permet notamment d’impliquer les organisations dans la formation, l’acquisition des compétences et la mise en place de projets industriels. »
L’approche de Grenoble école de management (GEM) complète cette vision. « Nous sommes là pour valoriser des avancées technologiques qui ne sont pas transformées ou monétisées. Les managers sont des facilitateurs », explique Federico Pigni, doyen de la faculté au sein de la grande école de commerce iséroise.
Quels types de partenariats mettre en place ?
Sur la nature des partenariats à mettre en place, les possibilités sont multiples. À l’ENPC, « nous misons sur une parfaite compréhension des problématiques de l’entreprise avec une organisation interne qui favorise le dialogue avec nos enseignants-chercheurs ou nos jeunes ingénieurs. Ce qui implique de flécher nos différents contacts et de bien les qualifier. Nous sommes sur des partenariats multiaxes, qui vont de la chaire disciplinaire à l’entrepreneuriat en passant par des colloques scientifiques. Tout cela implique une gouvernance précise pour éviter les effets déceptifs de part et d’autre. »
Il est impératif d’offrir une vraie plus-value pour l’entreprise et de se focaliser sur des projets concrets. « Une infrastructure de pilotage au sein de nos organes de recherche est essentielle », ajoute Angela Vasanelli.
Étant donnée la diversité des sujets, le suivi de chaque action est fondamental selon le doyen de GEM. « Nous devons disposer d’un véritable CRM pour entretenir correctement nos relations. Les points d’entrée dans les structures sont multiples et il ne faut surtout pas perdre de l’information ».
Dans un monde où les ressources publiques sont désormais comptées, l’apport des entreprises à l’équilibre économique des institutions, la contribution à la formation des futurs diplômés ou la création de valeur autour de l’innovation sont désormais des éléments stratégiques qu’il faut prendre en compte.
C’est d’ailleurs le sens de l’histoire selon Sandrine Belloc qui conclut : « Selon notre étude, les collaborations structurantes ont doublé ces cinq dernières années. C’est un bon signe ».