Comment prévenir les risques auxquels sont exposés les personnels du supérieur ?
Par Catherine Piraud-Rouet | Le | Management
Il revient aux directions des établissements de protéger leurs personnels de l’ensemble des risques auxquels ils sont exposés : physiques, psychosociaux et troubles musculosquelettiques notamment. Une démarche multi-acteurs, qui répond à une série de protocoles structurés, à adapter en permanence.
« Ces dernières années, la prise en compte de la gestion des risques s’est professionnalisée dans l’enseignement supérieur », déclare François Paquis, directeur général des services de l’Université Clermont-Auvergne. La démarche doit s’appuyer sur des préconisations issues du Code du travail, mais aussi de directives internes au MESR, comme les orientations stratégiques ministérielles.
Les outils réglementaires
Des outils réglementaires existent, trois sont particulièrement à connaître :
- Le document unique d’évaluation des risques professionnels (Duerp), qui compile la totalité des analyses de risques recensés dans chaque unité de travail. Le Duerp est mis à jour a minima une fois par an. « Dans les faits, c’est beaucoup plus régulièrement, lors de la survenue d’une nouvelle activité, d’un accident ou d’un signalement », relève Jonathan Casal, directeur de la prévention, de la sécurité et de l’environnement de l’Université de Lorraine. Pour élaborer ce document, les établissements peuvent se faire accompagner. « Nous nous sommes entourés d’un cabinet spécialisé, dont les consultants ont établi la liste de nos risques, métier par métier », témoigne Delphine Girolami, directrice des ressources humaines de l’école d’ingénieurs Efrei.
- Le registre de santé et de sécurité au travail (RSST), qui est un recueil de signalements ou de propositions d’améliorations. « Ce document nous permet de rattacher une situation à un risque particulier et de nourrir le Duerp », illustre Jonathan Casal.
- Le signalement de danger grave et imminent, dont la procédure est définie par le Code du travail.
Un réseau d’acteurs
Les acteurs impliqués sont multiples. Le chef d’établissement, le responsable et le coordonnateur de la politique de prévention travaillent en réseau avec toute une équipe dédiée : assistants et conseillers en prévention, équipe pluridisciplinaire de médecine de prévention, représentants du personnel (via le comité social et économique pour le privé ou le comité social d’administration pour le public).
Identifier les risques
Cela peut passer par le lancement d’enquêtes internes ou par des consultations avec les partenaires sociaux. Il est aussi possible s’appuyer sur l’expertise des organismes spécialisés, par exemple sur la méthode de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) de prévention des risques psychosociaux.
Là encore, un accompagnement externe peut être précieux. « Nous faisons appel à des ergonomes en lien avec la médecine du travail », rapporte Emmanuel Rodriguez, directeur adjoint de la mission qualité, santé, sécurité, environnement et conseiller prévention à l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
Informer et former les personnels
Il convient d’informer les salariés, via des communications verbales et écrites, sur les risques rattachés à leur poste. Et de former l’ensemble des effectifs à la manière de prévenir ces risques.
« Si l’encadrement de proximité est en première ligne, tous nos nouveaux entrants passent par une formation ad hoc, témoigne Jonathan Casal. Par ailleurs, nous organisons des programmes de prévention chaque année ». Tandis qu’à l’Efrei, les équipes suivent des formations, également annuelles, aux premiers secours et à la sécurité incendie.
Mettre en place des mesures de protection individuelles et collectives sur les risques physiques
Ce peut être la mise à disposition d’appareils de protection individuelle, ainsi que la surveillance médicale renforcée des personnels effectuant des travaux de recherche sur des domaines à risque.
Il faut aussi veiller à assurer à tous des locaux correctement aménagés, sécurisés et ventilés. Tout en prenant en compte la nécessaire adaptation au changement climatique.
« Dans les années à venir, il faudra certainement repenser locaux et pratiques en conciliant sobriété énergétique et préservation de la sécurité », relève Emmanuelle Rosa, secrétaire académique du SNPTES à Aix-Marseille Université et membre SNPTES-Unsa de la formation spécialisée en santé et sécurité au travail du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Autre impératif : fournir aux collaborateurs des équipements ergonomiques. « Nous leur proposons des ateliers annuels sur la posture de travail et les troubles musculo-squelettiques (TMS) », illustre Alice Evain, secrétaire générale du pôle Léonard de Vinci.
Et souscrire des assurances adaptées. « Notre contrat en responsabilité civile couvre tous les risques associés à nos laboratoires, et nous avons souscrit une couverture spécifique de leur véhicule personnel pour nos personnels en mission », précise-t-elle.
Sur les risques psychosociaux
Stress, épuisement professionnel ou dépression sont des fléaux désormais tristement célèbres.
« Un phénomène encore accru ces dernières années par la généralisation du digital et du travail à distance, qui conjugue isolement des enseignants et dégradation des rapports avec les étudiants. Mais cette problématique des risques numériques est encore largement taboue », estime Philippe Azzi, animateur du module prévention des risques psychosociaux à l’École supérieure de management en alternance (Écema).
Il préconise de libérer la parole, en instituant notamment des groupes d’analyse de la pratique.
Un nombre croissant d’établissements sont toutefois conscients que la limitation des risques psychosociaux passe par des actions préventives touchant l’organisation du travail. « Le télétravail a été pris en compte dans notre Duerp au travers de plusieurs risques », témoigne Jonathan Casal. À l’Université de Lorraine, mais aussi à l’Université Clermont-Auvergne ou au pôle Léonard de Vinci, une charte du télétravail a été rédigée.
Parmi les nouvelles démarches figure aussi la prévention des actes de violence, discrimination, harcèlement et agissements sexistes (VDHAS). L’Université Clermont-Auvergne a ainsi lancé une cellule contre le harcèlement. Des actions de sensibilisation qui peuvent aussi être le fait d’assureurs partenaires.
« Dans le cadre de notre partenariat avec le CNRS, nous mettons en place des ateliers de prévention des TMS, des formations de premiers secours en santé mentale et du soutien psychologique », informe Mélusine Harlé, directrice de la prévention à la MGEN.
Tous ces dispositifs doivent, enfin, être revus et adaptés en permanence, en fonction de l’évolution des besoins et des risques observés.