HRS4R : au-delà d’un label, une démarche de qualité pour les chercheurs
Par Laura Makary | Le | Management
Une vingtaine d’établissements français ont obtenu le label « HR Excellence in Research » (HRS4R), remis par la Commission européenne.
Son objet : une amélioration des pratiques en termes de recrutement et de conditions de travail des chercheurs, dans toute l’Europe.
Quelle démarche faut-il mettre en oeuvre pour l’obtenir et que récompense-t-il ? Campus Matin a interrogé plusieurs établissements lauréats.
C’est un label que peu de personnes, y compris dans la communauté de l’enseignement supérieur et de la recherche, connaissent réellement. Pourtant, sur les dix dernières années, une vingtaine d’universités, d’écoles d’ingénieurs et d’organismes de recherche ont obtenu « HR Excellence In Research », décerné par la Commission européenne.
Celui-ci est accordé aux établissements qui appliquent deux textes publiés en 2005 :
- la Charte européenne du chercheur,
- le Code de conduite pour le recrutement des chercheurs.
Ces documents concernent aussi bien le recrutement, la sélection, la transparence, les conditions de travail, la question du financement et des salaires que la lutte contre la discrimination, l’attitude professionnelle, l’environnement de recherche, ou encore la diffusion des résultats.
Au total, aujourd’hui, plus de 500 établissements sont labellisés, dans toute l’Europe.
40 items à évaluer
Pour les équipes se saisissant du dossier, c’est un travail de longue haleine. Il faut souvent compter 12 à 18 mois de travail en prenant le temps d’évaluer et de trouver des solutions au sein des différentes équipes de recherche, sur les points visés.
« C’est une démarche de long terme, il faut notamment fournir le ‘gap analysis’, un diagnostic complet des usages et pratiques, par rapport à chacun des 40 items de la Charte européenne du chercheur. Nous devons alors réaliser une auto-évaluation, pour présenter un plan d’action, avec les pistes d’améliorations », détaille Florence Gelin, directrice générale des services adjointe de l’Université Paris Dauphine - PSL, labellisée tout récemment, en octobre 2020.
Sur des thématiques aussi variées et des questionnements aussi pointus, une véritable introspection est requise, permettant de mettre en avant les points positifs, mais aussi ceux à améliorer.
« Nous avons par exemple observé que nous n’avions pas de procédure de recrutement formalisée pour les post-doctorants et qu’il fallait mettre en place une grille harmonisée pour leur rémunération. Nous avons également décidé de mettre en place un observateur au sein des comités et de créer une charte de recrutement des chercheurs, au niveau de l’ensemble de l’Université PSL », détaille Florence Gelin. Des points de progression identifiés ainsi pour l’université.
Recrutement et promotion
Une réflexion nécessaire sur les pratiques
Du côté de Sciences po, qui a obtenu le label fin 2017, ce travail a avant tout permis une réflexion sur ses pratiques. « Le point prioritaire pour nous a été de travailler sur les modalités de recrutement et de promotion au sein de notre faculté permanente. Pour cela, il a fallu s’approprier la démarche, impliquer les chercheurs, se mobiliser en interne et cadrer la réflexion sur des questions essentielles sur la recherche, la promotion et le recrutement des enseignants-chercheur », explique Guillaume Plantin, directeur scientifique.
L’établissement a aussi travaillé sur les questions de déontologie de la recherche et d’égalité entre homme et femme, en formant les membres des comités de sélection aux biais inconscients.
La transparence du recrutement
L’Université de technologie de Compiègne, quant à elle, s’est concentrée sur l’ouverture des résultats de la recherche et des publications. Ce travail d’introspection était aussi l’occasion de mettre en valeur des points positifs, déjà instaurés au sein de l’école d’ingénieurs.
« Nous étions déjà actifs et bien positionnés sur certains sujets, comme le jury de recrutement, la publication systématique d’une annonce, la dématérialisation des process et la traduction de tous les documents en anglais afin d’attirer des chercheurs internationaux… En revanche, nous visons d’améliorer notre retour aux candidats et faire en sorte que le recrutement soit aussi transparent, ouvert et au mérite que possible », pointent Stéphanie Rossard et Lydia Vignolle-Dupré, respectivement responsable du pôle paie et rémunération, et responsable des partenariats européens et internationaux de l’UTC.
Un binôme référent transversal sur ce projet, associant DRH et direction de la recherche.
Renforcer le dialogue
Pour les universités, organismes et écoles se lançant dans ce label, cela représente beaucoup de travail, et de l’investissement pour les équipes dédiées au projet.
Mais c’est aussi l’occasion de faire le point sur ses propres pratiques, d’échanger avec les équipes et d’améliorer ses process et façons de fonctionner.
« Au-delà du label en lui-même, ce qui importe le plus est la façon dont ces travaux vont transformer l’organisation. Il ne faut donc pas y aller à reculons, l’auto-évaluation ne doit pas être subie ou vécue comme une contrainte en interne. Au contraire, il faut échanger, en associant tous les collègues sur les travaux en interne », souligne Guillaume Plantin, de Sciences po. Il estime que c’est ce travail collectif qui a permis à l’école de décrocher le label. Et d’améliorer ses pratiques.
Un label à valoriser
Une visibilité et une attractivité plus importante auprès des chercheurs
Une démarche positive en tout point, donc, confirment nos témoins. En plus de l’avantage d’un label, qui permet de mettre en valeur, en interne comme à l’extérieur, ces travaux.
« En dehors de l’apport pour nos chercheurs, cela va nous apporter une visibilité et une attractivité plus importante auprès des chercheurs, sur le marché international, en particulier dans l’espace européen », estime Florence Gelin, de Dauphine-PSL.
Elle cite également l’impact positif du label dans le cadre de futures demandes d’appels à projets européens de financement de la recherche.
Face au grand public, le label n’est pas facile à valoriser, étant encore peu connu. En revanche, elle cite un dernier impact. Sans doute le plus important de tous au final : l’amélioration de la qualité de vie des chercheurs.