Numérique

IA : des usages limités en dehors de la pédagogie mais des impacts futurs sur les métiers

Par Isabelle Cormaty | Le | Équipements et systèmes d'informations

L’Agence de mutualisation des universités organisait en octobre ses Rendez-vous annuels sur l’intelligence artificielle et ses impacts dans l’ESR, notamment dans les fonctions soutien et supports. Si les cas d’usages sont encore rares et l’utilisation de l’IA par les personnels non réglementée dans les établissements, l’impact à venir sur les métiers est à anticiper dès à présent !

Les rendez-vous de l’Amue du 2 au 4 octobre 2024 ont porté sur l’intelligence artificielle. - © Canva
Les rendez-vous de l’Amue du 2 au 4 octobre 2024 ont porté sur l’intelligence artificielle. - © Canva

Après avoir abordé le développement durable, le télétravail, la qualité de vie au travail, les transformations numériques, la sixième édition des Rendez-vous de l’Agence de mutualisation des universités (Amue) du 2 au 4 octobre 2024 étaient dédiés cette fois à l’intelligence artificielle. Un thème qui a déjà été placé au cœur des événements annuels de plusieurs associations métiers cette année.

2 700 personnes ont participé, en ligne, à ces journées. Leur objectif ? « Proposer un panorama à 360° sur l’usage de l’IA dans l’ESR, permettre l’acculturation et le partage d’expérience, commence Serge Bourgine, directeur du département développement et accompagnement des compétences de l’Amue. Nous voulions aussi aborder l’IA par différentes approches, notamment :

  • l’éthique pour savoir comment se positionner et se questionner par rapport à l’IA,
  • la sécurité et la protection des données personnelles avec des interventions de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil),
  • Le management : comment le manager doit-il se positionner par rapport à l’IA ? »

Des cas d’usage encore rares en dehors de l’enseignement…

 Serge Bourgine dirige le département développement et accompagnement des compétences de l’Amue. - © D.R.
Serge Bourgine dirige le département développement et accompagnement des compétences de l’Amue. - © D.R.

« Nous n’en sommes qu’au début, il n’y a pas nécessairement des cas d’usage de l’IA dans tous les domaines », constate Serge Bourgine. Durant les rendez-vous de l’Amue, plusieurs mises en pratique ont été exposées dans les différents métiers des fonctions de gestion et de pilotage accompagnés par l’Amue.

À l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne par exemple, un chatbot accompagne les services de formation continue. Dans le champ des ressources humaines, le chatbot Rebecca aide les gestionnaires RH avec la saisie des dossiers des agents dans le logiciel Siham et facilite leur alignement avec la réglementation applicable. Pour les directions des achats, il existe un outil pour aider ces services à construire leur marché et en suivre l’exécution.

La direction générale des finances publiques a aussi présenté une IA qui analyse les demandes de paiement et identifie des cas d’erreurs potentielles.

… mais des transformations à anticiper dès à présent

L’Amue, qui propose 129 modules de formation par an, dont huit avec l’Institut des hautes études de l’éducation et de la formation (IH2EF), n’a pas encore intégré l’intelligence artificielle dans son catalogue, même si des demandes d’établissements se font jour.

Mise à jour de supports de formation, veille métier… le directeur du département développement et accompagnement des compétences voit pourtant bien comment cette technologie pourrait être utilisée. « Il nous faut encore définir un cadre et savoir quelles précautions prendre », indique Serge Bourgine.

« Nous sommes en train de réfléchir afin d’identifier les meilleurs axes d’intervention et pour ne pas être redondants avec ce que certains organismes privés proposent déjà. En effet, il nous faut apporter une plus-value sur les domaines dans lesquels l’Amue intervient, à savoir : les spécificités de l’ESR et en quoi l’IA va impacter concrètement l’écosystème et les métiers de soutien et de support. »

Intégrer l’IA dans les outils et logiciels ?

« Les règles et les acteurs de la fonction publique sont particuliers, donc nous réfléchissons à l’introduction de l’IA dans nos outils sous la forme de chatbots copilotes pour accompagner les gestionnaires, quels que soient les domaines métiers et les applicatifs associés », annonce Serge Bourgine.

L’agence a pour l’instant organisé des réunions de présentation des possibles en matière d’IA avec des prestataires et doit encore définir dans quelle direction aller.

« Nous allons aussi investir le sujet côté métier pour identifier comment nous pouvons aider les établissements et les professionnels en leur sein, tant sur l’impact de l’IA sur nos organisations et nos métiers, que sur l’accompagnement de cette transformation », complète-t-il.

Pas de consigne particulière sur l’usage de l’IA à l’Amue

« Les personnels de l’Amue n’ont pas de consigne particulière sur l’usage de l’IA, la consigne n’étant pas vraiment d’usage chez nous. Même si elle n’est pas utilisée pour les données sensibles, comme les finances ou la paie, nous voulions réaliser des cas d’usage interne pour illustrer comment l’IA peut appuyer les métiers tout en identifiant aussi les limites et précautions à prendre en compte », ajoute Serge Bourgine.

Si le sujet agite les réflexions de l’agence, la direction a décidé de laisser l’initiative à ses personnels. Dans le cadre du projet Caplab, la solution logicielle de l’Amue pour le suivi des projets et activités de recherche des laboratoires, « une analyse de pratique a été faite concernant l’usage de l’IA générative dans le métier de développeur avec l’Université de Clermont Auvergne », illustre le directeur du département développement et accompagnement des compétences de l’Amue.

« À ce jour, nous n’avons pas identifié de dispositifs structurants sur l’utilisation de l’IA au sein de nos établissements adhérents pour les métiers sur lesquels l’Amue propose ses actions », souligne-t-il.

Une enquête interne sur les usages professionnels de l’IA

L’agence a créé un Mutual’Lab dédié à l’IA. Ce lieu de partage rassemble les personnels volontaires une heure par mois pour échanger sur leurs expériences et partager les outils qu’ils utilisent.

« L’IA est un sujet assez neuf en termes de connaissance et d’appropriation collectives. En dehors des cas d’utilisation dont nous avons connaissance en matière de pédagogie (tant par les étudiants que par les enseignants), nous savons que des personnels l’utilisent dans le cadre de leur travail sans en connaître précisément les périmètres », précise Serge Bourgine.

Le Mutual’lab a donc mené une enquête interne entre mars et juin 2024 sur les usages personnels et les pratiques professionnelles de l’IA auprès des personnels de l’agence.

Pour 88 % des répondants, les projets IA doivent tenir compte de l’impact humain en associant les métiers. Pourquoi les personnels utilisent-ils l’IA ? Les résultats de l’enquête montrent que la motivation principale est le gain de temps, suivie par l’envie de découvrir cette technologie.

Une enquête sur les usages professionnels de l’IA dans l’ESR

Pour compléter son enquête interne et mieux accompagner les établissements, l’Amue a envoyé début octobre auprès de ses adhérents un questionnaire d’une dizaine de minutes pour mieux connaître les pratiques professionnelles en lien avec l’IA générative dans les métiers supports et soutien de l’enseignement supérieur.

Peuvent y répondre les enseignants, enseignants-chercheurs, et les personnels ingénieurs, administratifs, techniques, sociaux, de santé et des bibliothèques. L’enquête est ouverte jusqu’au 30 novembre. Pour y répondre, c’est par ici.