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Rémunération minimale des doctorants : l’harmonisation pour 2023

Par Marine Dessaux | Le | Doctorat

Dans l’enseignement supérieur public, les doctorants ne bénéficient à ce jour pas tous de la même rémunération minimale. Trois différents paliers de salaires cohabitent en cette rentrée universitaire. Une disparité dont la ministre Sylvie Retailleau vient d’annoncer la fin pour 2023.

Sylvie Retailleau a annoncé la fin des différences de rémunération des contrats doctoraux MESR. - © D.R.
Sylvie Retailleau a annoncé la fin des différences de rémunération des contrats doctoraux MESR. - © D.R.

Depuis le 1er septembre 2021, et ce jusqu’à la rentrée universitaire 2023, la rémunération minimale des nouveaux contrats doctoraux augmente de 6 % chaque année. Une revalorisation prévue par la Loi de programmation de la recherche (LPR) qui s’applique selon la date de signature du contrat doctoral et crée des disparités importantes.

La ministre de l’enseignement supérieur et la recherche, Sylvie Retailleau, a évoqué la fin de ce déséquilibre pour 2023 devant le comité technique du ministère, le 8 septembre 2022. Interrogée par Campus Matin, elle confirme cette annonce à l’occasion de sa conférence de presse de rentrée 2022, le 15 septembre :

« Ce ne sera plus seulement les nouveaux doctorants qui auront l’augmentation définie dans la LPR, mais tous les doctorants, au début de l’année 2023. »

Disparités de salaires

En cette rentrée universitaire, les doctorants de l’enseignement public en cours de thèse ont signé des contrats avec trois rémunérations minimales différentes :

  • 1 758 € brut par mois pour les contrats conclus avant le 1er septembre 2021,
  • 1 866 € brut pour ceux signés à partir du 1er septembre 2021,
  • et 1 975 € brut à compter du 1er septembre 2022.

Un écart qui aurait continué à se creuser avec l’objectif annoncé, mais pas encore traduit par un arrêté, d’une rémunération minimale de 2 300€ brut à l’horizon 2023. Désormais, cette année marquera la fin des différences de rémunération minimale pour les doctorants. La date précise doit encore être déterminée en 2023.

Les contrats doctoraux concernés

Différents types de contrats doctoraux existent, accompagnés de rémunérations différentes. « Nous allons aligner le salaire des contrats MESR [du ministère de l’enseignement supérieur, NDLR] des doctorants », précise la ministre.

Les thèses Cifre (Conventions industrielles de formation par la recherche), permettant aux entreprises de droit français de recruter un doctorant dont le projet de recherche, mené en collaboration avec un laboratoire public ne sont pas concernées. Les contrats de droit privé, qui offrent un cadre juridique spécifique aux doctorants contractuels menant leurs travaux de recherche au sein du secteur privé (entreprises, fondations de recherche…), non plus.

« La rémunération minimale des contrats doctoraux de droit privé ne sera pas concernée par cette mesure : c’est le Smic qui s’applique. Néanmoins, ces doctorants sont dans les faits mieux payés que les doctorants dans le public », explique Julie Crabot, présidente de la Confédération des jeunes docteurs (CJC).

Un sujet de préoccupation pour les doctorants

La fin de la différence de rémunération minimale entre les doctorants relevant du MESR est une « surprenante, mais c’est une bonne nouvelle » pour la présidente du CJC.

En effet, il s’agit d’une demande particulièrement portée par la communauté des futurs docteurs. « C’est un sujet que nous avons remis sur la table lors de nos rendez-vous avec le ministère, car nous sommes régulièrement contactés par des doctorants qui demandent comment cela peut être légal d’avoir, pour un même contrat, deux rémunérations différentes. Certains envisageaient de s’adresser au Conseil constitutionnel. Mais nous n’avions pas eu d’informations à ce sujet depuis nos derniers échanges en mai, avant le changement de cabinet ministériel. »

Qui paye ?

Sylvie Retailleau lors de la conférence de presse de rentrée 2022. - © D.R.
Sylvie Retailleau lors de la conférence de presse de rentrée 2022. - © D.R.

D’où proviendra l’argent qui servira à compenser les doctorants dont la rémunération sera revue à la hausse en cours de contrat ? Des fonds propres de l’établissement ou d’une enveloppe du ministère ?

« Nous sommes en train d’étudier, en gardant l’objectif des 2 300 €, comment mettre cela en place avec le stock et non plus avec le flux, indique Sylvie Retailleau. On a fait un choix, c’est de traiter tous les doctorants de la même manière, la question maintenant c’est comment on va y aller. »

De leur initiative des établissements et organismes de recherche, comme Télecom Paris et l’Inrae, ont revalorisé sur leur budget la rémunération des doctorants, et cela même rétroactivement. Bien sûr, « selon les moyens des universités, cette dotation sur fonds propres peut être plus compliquée », explique Julie Crabot.

Marie-Ange Ventura, vice-présidente à l'Association nationale des docteurs (Andès), s’interroge également sur la provenance des finances : « Il faudra voir d’où provient la subvention. Car pour les doctorants recrutés dans le cadre de projets de recherche, les fonds ont déjà été attribués et les chercheurs n’ont pas la main dessus. »

Mettre fin à la précarité des doctorants, l’objectif de la Fage

Le 20 septembre 2022, la Fédération des associations générales étudiantes (Fage) a publié son enquête nationale sur le doctorat. Elle y dresse le constat d’un manque d’information et d’égalité des chances et souligne le financement comme enjeu principal pour lutter contre la précarité des doctorants. Elle rappelle : « Aujourd’hui près d’un quart des doctorants ne bénéficiant pas d’un financement dès leur première année. »

Pour répondre à cette situation, la Fage préconise sept mesures : « Réinvestir la jeunesse dans son orientation vers le troisième cycle ; sortir les doctorants de la précarité grâce à un financement décent ; offrir des conditions de recherches saines ; lutter contre les conditions de vie inacceptables des doctorants ; faire de la formation un véritable outil pour chaque doctorant ; améliorer la réalité des conditions de mobilités internationales ; élever les conditions d’insertion professionnelle à la hauteur du titre de docteur. »