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Sommet international sur l’IA : ce qu’il faut en retenir pour les établissements du sup'


Au-delà des plans d’investissements à plusieurs milliards d’euros annoncés, le Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle s’est traduit dans l’enseignement supérieur et la recherche par la signature de partenariats très concrets et la mise à disposition de ressources et d’outils souverains open source à la communauté.

La France a accueilli les 10 et 11 février 2025 le Sommet pour l’action sur l’IA au Grand Palais. - © Canva
La France a accueilli les 10 et 11 février 2025 le Sommet pour l’action sur l’IA au Grand Palais. - © Canva

Les principaux chefs d’État et de gouvernements, les organisations internationales et les entreprises de la tech se sont réunis du 10 au 11 février sous la verrière du Grand Palais à Paris pour le Sommet international pour l’action sur l’intelligence artificielle (IA). Au cœur des discussions : les moyens financiers pour investir dans ces technologies et leur gouvernance.

Un volet éducation a également été abordé pendant et en marge de l’événement, avec la restitution à l’ENS-PSL, le 11 février, d’un des 35 défis sélectionnés par le Gouvernement dans le cadre du sommet, celui consacré à l’IA au service du la réussite éducative et porté par EdTech France et les projets lauréats des Démonstrateurs numériques de l’enseignement supérieur (Demoes).

Des campus augmentés avec Mistral AI

Principale annonce à retenir pour l’enseignement supérieur : la start-up Mistral AI, érigée comme le fleuron français du secteur de l’IA, a lancé le 5 février avec l’association EdTech France et plusieurs établissements publics de l’ESR une « une alliance inédite pour doter les étudiants, enseignants, chercheurs et personnels administratifs d’une IA robuste et fiable qui respecte les valeurs européennes d’universalisme, d’égalité des chances, de frugalité et de souveraineté ».

Onze établissements figurent à date dans ce consortium : les universités de Rennes, Haute Alsace, Nîmes, Paris-Est Créteil, Bordeaux Montaigne, Montpellier, Picardie Jules Verne, Toulouse Jean Jaurès, Sorbonne Université, ainsi que le Conservatoire national des arts et métiers et Mines Paris-PSL.

 Lucie Jacquet-Malo est copilote du défi « IA au service de la réussite éducative ». - © D.R.
Lucie Jacquet-Malo est copilote du défi « IA au service de la réussite éducative ». - © D.R.

Pour Lucie Jacquet-Malo, copilote du défi « IA au service de la réussite éducative », ce partenariat consiste à « proposer un projet d’augmentation par l’IA de nos campus et de nos universités. L’idée est de bénéficier de la force de frappe de Mistral AI au service de l’expérience étudiante et de la réussite étudiante ».

L’alliance « est ouverte à tous les établissements qui souhaitent enrichir leurs systèmes d’information par l’IA ». En plus de la technologie de Mistral, les établissements auront aussi accès aux solutions des entreprises edtechs tricolores.

La diffusion du RAG de l’Université de Rennes

Par ailleurs, l’Université de Rennes propose aux acteurs institutionnels de l’éducation, de l’ESR et du service public d’utiliser de façon gratuite son RAG (retrieval-augmented generation). Construit dans le cadre de son projet Demoes, l’outil RagARenn est un système fermé, basé sur l’IA et qui s’appuie sur des documents choisis par l’utilisateur pour garantir des réponses fiables à l’utilisateur.

« Nous voulions maîtriser les flux de données dans l’établissement et faire en sorte que ces données ne se retrouvent pas dans la nature. Quelques centaines de personnels volontaires utilisent la solution depuis quasiment un an. Nous l’avons ouverte progressivement à une quarantaine d’établissements du supérieur », raconte Olivier Wong, vice-président numérique de l’établissement.

Olivier Wong est VP numérique de l’Université de Rennes et porteur de son projet Demoes. - © D.R.
Olivier Wong est VP numérique de l’Université de Rennes et porteur de son projet Demoes. - © D.R.

Plusieurs institutions publiques ont récemment adopté le RAGaRenn pour leurs personnels, notamment le rectorat et la Métropole de Rennes ainsi que Réseau Canopé.

L’outil s’appuie sur la communauté Ilaas, qui vise à développer une IA frugale, en réduisant la charge sur les serveurs des universités grâce à la mutualisation. « Avec quelques universités comme Reims, Lille, Paris 1, Haute Alsace et CentraleSupélec, nous avons construit un petit noyau d’établissements mobilisés sur ces sujets », poursuit celui qui est aussi président de l’association des VP en charge du numérique.

« L’idée est d’avoir une fédération de datacenters dédiée à l’IA générative pour l’ESR, dans un environnement de confiance pour faire en sorte de proposer des modèles de langage diversifiés et adaptés à notre cœur d’activité. »

Une charte d’utilisation des IA génératives proposée

Enfin, EdTech France et les universités lauréates des Demoes ont diffusé une charte d’utilisation pour « encadrer — de manière optimiste, éthique, responsable et durable — les usages des IA génératives dans l’enseignement pour les élèves, étudiants et enseignants ».

Une table ronde de restitution du défi sur l’IA dans l’éducation a eu lieu le 11 février à l’ENS-PSL. - © News Tank
Une table ronde de restitution du défi sur l’IA dans l’éducation a eu lieu le 11 février à l’ENS-PSL. - © News Tank

« De nombreux pays francophones proposaient des chartes. L’Université d’Orléans est la première à en avoir mis une en place en France. Nous nous en sommes inspirés pour proposer une charte d’utilisation de l’IA, opposable juridiquement, et dont les établissements vont pouvoir se saisir », précise Lucie Jacquet-Malo, également responsable du groupe de travail inter-Demoes sur la collaboration entre l’ESR et l’écosystème edtech.

Cette charte se base sur quatre principes : la curiosité, la transparence, la précaution et la parcimonie. La déléguée générale d’EdTech France, Orianne Ledroit estime qu’« encadrer les usages et pratiques des étudiants comme des enseignants est nécessaire pour favoriser une appropriation consciente et responsable de ces outils. Ce cadre permettra également de soutenir le déploiement des solutions edtechs qui font au quotidien la preuve de leur utilité. »

Cette charte a vocation à être adoptée par les établissements qui le souhaitent ou à servir de matière à leur réflexion. En parallèle, une mission consacrée à l’IA au sein des établissements publics d’enseignement supérieur a été confiée à l’échelle nationale par l’ancien ministre de l’ESR Patrick Hetzel à François Taddei, président du Learning Planet Institute et Frédéric Pascal, directeur de DataIA.

Un campus franco-émirati dédié à l’intelligence artificielle

En amont du Sommet IA, la France et les Émirats arabes unis ont convenu le 6 février de la création d’un campus dédié à l’intelligence artificielle dans l’Hexagone. Un accord qui prévoit des investissements de la part d’un consortium de champions franco-émiratis, avec pour objectif de disposer d’un data center ultra-puissant, doté d’une capacité de calcul pouvant aller jusqu’à un gigawatt d’ici 2028.

Dans cette lignée, le ministre en charge de l’ESR, Philippe Baptiste a annoncé le 7 février un partenariat entre Polytechnique (membre d’IP Paris) et la Mohamed Bin Zayed University of artificial intelligence (Émirats arabes unis), « dans le but d’établir un programme collaboratif de recherche et de formation en intelligence artificielle ».