Vie des campus

Coût, bourses, prêts : comment les pays d’Europe traitent-ils leurs étudiants ?

Par Pauline Tressols | Le | Expérience étudiante

Frais de scolarité, bourses et prêts étudiants de cinq pays européens sont passés au crible dans une récente enquête publiée par le Sénat. Cette dernières détaille les conditions d’éligibilité, les montants accordés ainsi que diverses aides financières pérennes, auxquelles s’ajoutent des mesures de soutien exceptionnelles, instaurées en raison de la crise sanitaire.

La division de la législation comparée du Sénat dévoile ses résultats - © Pexels
La division de la législation comparée du Sénat dévoile ses résultats - © Pexels

À la demande de la mission d’information « conditions de la vie étudiante en France », le Sénat a publié le 17 août un recueil sur les aides aux étudiants et frais de scolarité dans les universités publiques. Le rapport étudie les cas du Danemark, de la Suède, de l’Allemagne, de l’Espagne et du Royaume-Uni.

Quels frais de scolarité ?

Des frais jusqu’à 10 fois plus élevés en Angleterre qu’en Espagne 

Au Royaume-Uni, l’Écosse se distingue par la gratuité du premier cycle universitaire pour les étudiants y résidant. Tous les étudiants d’Angleterre, Irlande du Nord et Pays de Galles sont quant à eux soumis à des frais de scolarité, fixés par les établissements. Des sommes comprises entre 2 935 et 10 037 euros, le premier cycle coûtant près du double du deuxième.

En Espagne, tous les étudiants doivent s’acquitter de frais de scolarité, dont le montant est fixé par les communautés autonomes sur la base de limites maximales fixées par le gouvernement central. À ces frais annuels proportionnels au nombre de crédits ECTS, donc variables selon les diplômes et les filières, peuvent s’ajouter des frais administratifs en fonction des universités. Le prix moyen d’une année de licence s’élève à 757 euros en Andalousie quand il est de 1 392 euros à Madrid.

Au Danemark, en Suède et en Allemagne : pas de frais de scolarité

Au Danemark et en Suède, les étudiants nationaux ainsi que ressortissants de pays membres de l’Union Européenne ne sont pas redevables de frais de scolarité. Seuls les étudiants étrangers doivent s’acquitter de droits annuels, compris entre 6 000 et 16 000 euros au Danemark et 7 500 et 14 000 euros en Suède.

En Allemagne, les étudiants sont exemptés de frais annuels, sauf exception, comme le dépassement de la durée standard des études. Cependant, ils doivent payer une contribution semestrielle, incluant des frais administratifs divers (inscription, abonnement de transport…), entre 130 et 435 euros selon les Länder.

Quels dispositifs pérennes d’aide aux étudiants ? 

Des bourses selon les revenus et parfois le mérite

Les aides aux étudiants sont imposables au titre des revenus au Danemark - © D.R.
Les aides aux étudiants sont imposables au titre des revenus au Danemark - © D.R.

Au Danemark, une aide éducative d’État (SU) voit le jour en 1970, car « personne ne devrait être empêché de suivre des études pour des raisons financières  ». Il s’agit d’une bourse versée jusqu’à 70 mois, sous forme de « tickets » mensuels. Pour y être éligible, l’étudiant doit être majeur et actif dans sa formation, son assiduité étant contrôlée par l’établissement. Ses revenus annuels ne doivent pas excéder un certain montant. La bourse danoise est la seule, parmi les autres pays de l’étude, à être imposable.  

Le montant attribué dépend des conditions de logement de l’étudiant :

  • Entre 132 € et 366 € par mois, en fonction des revenus des parents, s’il réside chez eux ;
  • 850 € s’il vit de façon autonome.

Toujours du côté des pays scandinaves, les aides aux étudiants suédois ont été mises en place pour « faciliter les possibilités d’études des étudiants talentueux, mais pauvres dans les établissements d’enseignement public ». Le montant accordé est compris entre environ 175 € et 356 € par mois sur une période maximale de quatre ans et demi. Il dépend des revenus propres de l’étudiant - ceux de ses parents n’entrent pas en compte - et de son rythme de scolarité, d’au moins 50 %. En Suède, un étudiant peut en effet faire ses études à temps complet ou partiel.

Le régime général de bourses espagnol est spécifique dans le sens où, à une part fixe s’ajoute une part variable, calculée une fois que les montants fixes de bourse ont été alloués, selon le reliquat de budget disponible. Elle bénéficie en priorité aux étudiants méritants dont les revenus sont faibles ou moyens.

L’Allemagne propose des bourses au mérite à ses étudiants - © D.R.
L’Allemagne propose des bourses au mérite à ses étudiants - © D.R.

Outre-Rhin, en Allemagne, le soutien financier à la poursuite d’études supérieures passe principalement par les parents qui, en vertu du code civil, ont une obligation alimentaire vis-à-vis de leurs enfants, même majeurs, durant toute la durée de leur formation. Toutefois, une aide à la formation est attribuée aux étudiants dont les ressources ou celles de leurs parents sont insuffisantes.

Comme au Danemark, la bourse est attribuée sous conditions de participation active aux études et d’un certain niveau de réussite, à l’image de l’Espagne. Elle s’élève à 514 € en moyenne. Particularité ici : l’aide à la formation est versée pour moitié sous forme d’un prêt sans intérêt, qui doit être remboursé sur une durée maximale de 20 ans.

Outre-Manche, le Royaume-Uni a décentralisé la compétence en matière d’aide aux étudiants de l’enseignement supérieur, qui relève donc de chaque nation constitutive. Ainsi, l’Angleterre est le seul pays à avoir supprimé les bourses pour les étudiants. Les étudiants écossais, nord-irlandais ou gallois peuvent quant à eux prétendre à une aide financière, dont le montant varie entre 580 € et 11 736 € en fonction de leur statut et des revenus de foyer.

Des prêts en supplément de l’aide initiale

Des prêts complémentaires à taux réduits, tel que le crédit à la formation dont le montant est compris entre 1 000 et 7 200 € sont également à la disposition des étudiants allemands.

Au Danemark, tous les boursiers peuvent recourir à un prêt de 435 € par mois en complément de leur aide initiale. Son remboursement, au taux de 1 à 4 %, débute un an après la fin des études et s’étend sur une période de 7 à 15 ans.

Les aides suédoises dépendent du rythme de scolarité de l’étudiant - © D.R.
Les aides suédoises dépendent du rythme de scolarité de l’étudiant - © D.R.

Il en va de même en Suède, où le montant, compris entre 94,62 € et 188,24 € par semaine, dépend là encore des revenus et du rythme de scolarité de l’étudiant. Le remboursement s’étend à 25 ans à un taux particulièrement faible de 0,05 %.

Des prêts à destination des étudiants britanniques, pour couvrir les frais de scolarité et le coût de la vie, sont accessibles et calculés selon les revenus du foyer et le statut de l’étudiant. Exception au Pays de Galles cependant : plus l’étudiant bénéficie d’une bourse élevée, moins le montant de son prêt sera important et inversement.

En Espagne cependant, le recours à un prêt étudiant pour financer ses études demeure peu répandu.

Les aides sociales complémentaires

Allocations logement et soutiens supplémentaires aux étudiants parents ou porteurs d’un handicap sont cumulables aux aides citées précédemment dans tous les pays de l’étude, hormis l’Allemagne.  

En Suède, les étudiants handicapés peuvent obtenir des aménagements, tels que le fait d’étudier à temps partiel tout en obtenant une aide correspondant à un taux d’études à temps plein.

Des aides pour l’achat du matériel scolaire existent au Royaume-Uni - © D.R.
Des aides pour l’achat du matériel scolaire existent au Royaume-Uni - © D.R.

Au Royaume-Uni, un étudiant connaissant des difficultés financières ou matérielles peut s’adresser à son établissement d’enseignement supérieur pour obtenir une aide supplémentaire. Le montant de celle-ci est décidé par l’établissement. À noter que l’Irlande du Nord et le Pays de Galles proposent aussi des bourses de soutien pour les frais liés aux études, tels que les achats de livres ou de matériel.

En Allemagne, peu d’aides sociales sont accessibles aux étudiants. Les étudiants boursiers ne sont pas non plus éligibles à l’allocation logement, admise dans de rares cas à ceux qui ne sont pas bénéficiaires de l’aide à la formation.

Néanmoins, une bourse au mérite de 752 € maximum par mois est attribuée à ceux qui excellent. Un programme national de bourse de 300 € mensuel, réservé aux élèves particulièrement doués, existe aussi indépendamment des ressources, les universités choisissant leurs lauréats.

Quelles mesures d’aide aux étudiants en difficulté en raison de l’épidémie ?

Face à la crise sanitaire, tous les pays de l’étude ont mis en place des mesures exceptionnelles en faveur des étudiants de l’enseignement supérieur.

En Angleterre, le gouvernement a aidé les universités à renforcer les fonds de soutien aux élèves en difficulté à hauteur de 378 millions d’euros pour l’année universitaire 2020-2021. Une somme distribuée aux universités, libres d’en déterminer les bénéficiaires.

400 millions d’euros distribués aux universités d’Espagne - © D.R.
400 millions d’euros distribués aux universités d’Espagne - © D.R.

Une dotation de 400 millions d’euros a été allouée aux établissements des communautés autonomes espagnoles en juin 2020, pour contribuer au financement du protocole sanitaire en vigueur. Les étudiants ayant subi une chute brutale des revenus sont exemptés des frais de scolarité et les conditions de réussite pour l’obtention d’une bourse sont assouplies, tandis que les délais de remboursement de prêts prolongés.

Une augmentation des prêts de 25 % et une suppression temporaire du montant plafond des revenus sont accordées en Suède. De plus, les situations particulières font l’objet d’une étude au cas par cas.

Au Danemark, l’attribution de la bourse est maintenue sans contrôle par les universités de l’assiduité des étudiants, contraints de travailler depuis leur domicile. Des prêts supplémentaires ainsi qu’une aide mensuelle non imposable de 134 euros sont accordés aux boursiers.

En Allemagne, l’aide mensuelle aux étudiants les plus précaires est de 500 euros maximum, de juin 2020 à septembre 2021. Les prêts sont à taux zéro jusque fin 2021, leur remboursement pouvant être prolongé. Enfin, les revenus supplémentaires générés par les emplois étudiants ne seront pas comptabilisés dans le calcul de droit aux bourses jusqu’à la fin de la pandémie.