Campus virtuel, portes-ouvertes : Laval Virtual, le facilitateur de VR qui séduit le sup’
Par Marine Dessaux | Le | Edtechs
Elle héberge sur sa plateforme virtuelle le campus de Neoma, l’université d’été d’EMLyon, les portes ouvertes d’Arts et Métiers : l’association Laval Virtual est l’entremetteuse qui fait se multiplier les projets entre sociétés de réalité virtuelle et établissements du supérieur. Laurent Chrétien, son directeur, répond à Campus Matin.
D’abord connu pour son salon dédié au sujet qui se tient chaque année en Mayenne - le premier et le plus grand au monde en termes d’exposants - Laval Virtual est aussi un facilitateur de « VR », la virtual reality ou, en français la réalité virtuelle.
Un service d’experts qui nous permet de faire des études, des benchmarks
« Notre métier est de mettre en relation les fournisseurs de solutions hardware et software avec les sociétés qui les utilisent. Nous faisons principalement du B2B et peu de B2C. Nous fournissons un service d’experts, grâce à une veille poussée, qui nous permet de faire des études, des benchmarks au service des entreprises. Nous conseillons ensuite nos clients », expose Laurent Chrétien.
Depuis 2020 et la crise sanitaire, alors que le salon a dû s’adapter et devenir virtuel, l’association a ajouté une corde à son arc.
« Nous sommes aussi devenus opérateur d’évènements virtuels et de mondes virtuels », rapporte Laurent Chrétien.
Campus virtuel : une expérience immersive qui séduit les écoles
En lien avec l’accélération de l’hybridation des enseignements, causée par la crise sanitaire, les campus virtuels s’immiscent doucement dans le supérieur. Ils offrent aux étudiants un lieu de rassemblement virtuel, sorte de complément à l’offre académique en distanciel, plutôt qu’une révolution dans la façon de suivre les cours à distance. Le but ? Vivre une « expérience immersive et interactive » derrière son écran, malgré la distance.
Un concept qui a plu à EMLyon, pour son université d’été des alumni qui s’est tenue en octobre. L’école de commerce a « sous-loué » l’un des mondes virtuels de Laval Virtual, dont l’éditeur est VirBELA.
Neoma business school, elle, y possède, depuis la rentrée, sa propre extension, un terrain accessible uniquement aux personnes munies d’une autorisation. Arts et métiers s’y installe également.
« À Laval, nous travaillons avec Arts et Métiers depuis 15 ans : l’objectif est de former des jeunes dans l’usage du virtuel, de voir comment cet univers peut servir à la formation. Le contact avec Neoma, lui, s’est noué pendant notre salon 2020, l’idée a émergé très vite de faire quelque chose ensemble, de façon pérenne », retrace Laurent Chrétien.
« Une semaine à un mois » pour créer un campus virtuel
« Une semaine à un mois selon les demandes et les niveaux de personnalisation » : c’est le temps qu’il faut pour faire naitre un nouveau campus virtuel selon Laurent Chrétien.
« L’école qui voudrait un campus avec des salles de classe, un amphithéâtre, des bureaux : cela se fait en une semaine, et nous gérons le projet avec elle. Il faut compter un peu de temps de formation pour l’appropriation de la part des équipes ».
Le rôle de Laval Virtual : accompagner les établissements
Si la création, l’hébergement et les aspects technologiques (architecture, design) sont gérés par l’éditeur, ici VirBELA, Laval Virtual joue le rôle d’accompagnateur sur les besoins de l’établissement en termes de fonctionnalités (par exemple la nécessité d’avoir des bureaux, des salles de conférence, etc.).
Afin d’assurer une utilisation optimale des possibilités du logiciel, l’association a formé les acteurs clés de Neoma et a servi d’intermédiaire.
« L’intérêt ce n’est pas seulement les lieux : c’est le fait d’être accompagné par des gens qui connaissent la réalité virtuelle et qui sont susceptibles de travailler avec les étudiants », souligne Laurent Chrétien.
Combien ça coûte ?
Dans un article de News Tank [abonné], Neoma et GEM abordent la question du financement.
Sur l’investissement nécessaire pour le déploiement du campus persistant de Neoma, Alain Goudey indique que « pour une solution de cet ordre, il faut compter plusieurs centaines de milliers d’euros ».
Pour GEM, la location du campus immersif durant trois jours, ainsi que le pack de services a représenté « plusieurs dizaines de milliers d’euros ».
La plateforme VirBELA seule coûte à partir de 2 500 $ par mois pour un maximum de 150 utilisateurs. Au-delà, le prix augmente par utilisateur supplémentaire (tarif dégressif à partir de 10$), avec une capacité d’accueil pouvant aller jusqu’à 25 000 personnes.
Des projets annexes : journées d’intégration, portes ouvertes…
À Grenoble École de Management (GEM), le projet est encore différent : il s’agit d’organiser des journées d’intégration de manière virtuelle.
« Comment est-ce que j’accueille de nouveaux étudiants ? Comment insuffler l’état d’esprit de l’école via le virtuel ? Comment intégrer des éléments de team building ? Ce sont les questions sur lesquelles nous avons travaillé avec GEM et son partenaire Massive Immersive », liste Laurent Chrétien.
Laval Virtual World peut également être utilisé comme un hall d’exposition, que ce soit pour un projet pédagogique, à l’instar de l’exposition de 144 stands virtuels du 24 septembre dernier au cours de laquelle les étudiants de GEM devaient pitcher un « New Deal », mais aussi pour des portes ouvertes.
Arts et métiers inaugure le concept de journées portes ouvertes 100 % virtuelles le 28 novembre prochain. Sur la plateforme, l’école présentera notamment ses programmes, ses associations et sa recherche.
Accueillir plus de 500 exposants
« Ces événements sont organisés dans le hall d’exposition créé par VirBELA peu après le salon Laval Virtual - ne pas en avoir avait alors été un vrai manque. Ce lieu de rassemblement virtuel est utilisable tel quel, sans nécessiter de configuration spéciale pour les différents projets : portes ouvertes, salons, exposition, etc. Il peut accueillir plus de 500 exposants », indique Laurent Chrétien.
L’utilisation de la plateforme est optimisée pour aller au-delà des 10 000 personnes en simultané.
Mais à quoi ressemble un campus virtuel ?
Campus Matin a fait l’expérience du Laval Virtual World. Après un téléchargement rapide, l’utilisateur est invité à créer son personnage. On accède ensuite directement aux lieux : derrière un stand d’accueil plusieurs bâtiments s’imposent. Il y a de tout : des bureaux, des salles de travail, des amphithéâtres, des espaces pour exposer.
Un peu partout, des écrans permettent de visionner une vidéo ou faire des recherches internet. Pour discuter, c’est très simple également : via un chat, à l’écrit ou en ouvrant son micro, à l’oral.
Le petit plus, c’est le réalisme en termes de son, qui être spatialisé : plus une personne est éloignée, moins elle entendra ce qui est dit.
On apprécie également les zones de discussion privées, l’environnement en profondeur et le fait de croiser d’autres personnes qui confèrent un semblant de vie sociale en période confinée.
Notre avis
La plateforme offre des avantages : quand on est assis au fond d’une salle d’amphithéâtre, on entend clairement les personnes sur l’estrade et on a la possibilité de zoomer sur l’écran… Et des inconvénients : il n’empêche que l’on voit moins bien les personnes qui sont éloignées et que si quelqu’un pose une question au premier rang, on l’entendra moins fort (un paramétrage qui peut cependant être modifié) !
Le plus gros bémol reste le graphisme : à l’heure des jeux vidéo aux mondes ouverts à couper le souffle, les personnages et paysages de VirBELA (qui ont malgré tout un côté sympathique avec une plage, un terrain de football et de la verdure) sont très basiques. Une concession à faire afin de bénéficier d’une meilleure fluidité d’usage.
« Un premier pas dans l’utilisation de la VR »
« Dans le Laval Virtual World, on est susceptibles d’interagir avec plusieurs centaines de personnes derrière un avatar. Lorsqu’on discute, il y a un vrai sentiment de présence, d’émotion, qui permet de se rapprocher plus qu’avec un téléphone. Cette façon d’échanger, c’est aussi la capacité à ne pas trop perdre le mode de fonctionnement habituel des enseignants, d’être dans une salle de classe avec une salle de cours, comme si on le faisait en réalité », résume Laurent Chrétien.
« C’est un premier pas dans l’utilisation de la VR, nuance-t-il. Il ne faut pas penser le campus virtuel comme un substitut, mais voir comment cela permet d’augmenter la réalité, de rêver des programmes de formation différents ».
VR : un « coup de booster » avec la Covid, mais une activité de campus virtuels encore à la marge
Depuis le début de la crise sanitaire, Laval Virtual ne souffre pas d’un manque d’activité, au contraire. « On est parmi les rares structures événementielles qui embauchent », souligne Laurent Chrétien.
Si la VR est en plein boom, l’utilisation des mondes virtuels est, elle, récente : « Ce pan de notre activité était extrêmement restreint jusqu’à récemment, mais depuis la Covid il y a un coup de booster ».
On est sur des sujets plus proches de la recherche que de la mise en application
En effet, « si on regarde la nature des accompagnements que nous délivrons : on est sur des sujets plus proches de la recherche que de la mise en application stabilisée et immédiate, avec des labos et écoles qui font de réelles expérimentations », analyse Laurent Chrétien.
Un concept qui tend à se développer
Le directeur de l’association est néanmoins positif sur l’avenir de la génération et de l’utilisation des mondes virtuels : « Cela va se développer dans les mois et années qui viennent ».
Et d’ajouter : « Quand on a fait notre benchmark pour Laval Virtual World en mars 2020, il y avait une quarantaine de plateformes. Aujourd’hui, il en existe plus de 100 ».
Un secteur tech qui reste comme beaucoup dominé par les Américains, mais qui voit aussi d’intéressants acteurs émerger du nord de l’Europe (la Suède notamment avec Glue).