A l’Université de Reims, la fac de médecine et de pharmacie tient le choc de la rentrée
Par Marine Dessaux | Le ( mis à jour le ) | Expérience étudiante
A l’Université de Reims Champagne-Ardenne (Urca), les cas de Covid se font rares et les formations suivent leur cours selon la formule hybride préconisée en début de semestre. Résultat : pas de coup de bambou comme l’a vécu le campus voisin de Sciences Po Reims, contraint de fermer dès la rentrée.
Coup de chance ? Sensibilisation réussie ? Mesures sanitaires bien appliquées ? Campus Matin s’est rendu à la faculté de médecine et pharmacie pour en savoir plus.
Ce mardi 29 septembre, à Reims, le campus de la faculté de médecine et pharmacie semble assoupit. Les bandes jaunes et noires au sol, qui marquent la distance à maintenir entre les personnes à l’entrée des bâtiments et des salles de cours, les flèches qui donnent le sens de circulation, de manière à éviter les croisements, laissent présager des flux importants. Mais, pour l’heure, il n’en est rien.
Dans les amphis et les classes de TP, les mesures sanitaires sont appliquées sans difficulté. Pourtant, à l’instar de la tendance qui s’observe sur les campus de France pour cette rentrée 2020 : les effectifs inscrits sont en hausse (+2 % de néo-bacheliers pour toute l’université).
Virage du numérique entamé depuis un an
« Nos professeurs ont pris le pli du numérique avec un an d’avance ! », explique Marie Laurent, vice-doyenne étudiante de la faculté de médecine. En effet, les enseignants ont commencé à se mettre au numérique dès la rentrée 2019.
« On passe déjà les examens sur des tablettes, ajoute Marie Laurent. L’année passée, pendant le confinement, l’organisation a été impressionnante : il y avait sept personnes joignables par téléphone en cas de plantage ».
Suivre les cours à distance n’est donc pas une solution d’appoint, mais un mode d’apprentissage pleinement intégré aux formations dans cette faculté. Elle intéresse cependant, en temps normal, principalement les étudiants malades ou en stage, pour les autres- particulièrement s’ils préparent un concours-, la préférence reste au présentiel.
Des cas qui restent isolés
Alors que le 11 septembre dernier, Sciences Po Reims annonçait sa fermeture après que 23 étudiants eurent été testés positifs, l’Université de Reims semblent peu touchée, avec une soixantaine de cas pour l’ensemble des campus depuis la rentrée, et moins de 30 actuellement. Certains étudiants se sont pourtant croisés, du fait de parcours partiellement en commun.
Les contaminations semblent donc être liées à un comportement à risque en privé plutôt que sur le campus. Et à une sensibilisation réussie pour l’université de Reims ? C’est en tout cas un des points soulignés par Bach-Nga Pham, doyenne de l’UFR de médecine.
« Très tôt nous avons communiqué avec les étudiants, entre autres par mail, pour leur faire prendre la mesure de la situation. Nous avons interdit les week-ends d’intégration au tout début de l’année universitaire et annulé la cérémonie de remise des diplômes. Ces évènements sont populaires auprès des étudiants, qui se sont malgré tout montré très compréhensifs. »
« Pour minimiser les risques de cluster, nous travaillons beaucoup avec l’Agence régionale de santé (ARS) et nous favorisons le distanciel autant que possible », ajoute-t-elle.
Cependant, aucune campagne de dépistage massive n’a été organisée, ne permettant pas de savoir avec certitude le nombre réel de cas.
Fonctionnement adapté
Pour accueillir les étudiants dans un contexte inédit, l’université a dû réinventer son fonctionnement : de la circulation dans les bâtiments, à l’accès à la bibliothèque universitaire sur réservation, en passant par le déroulement des séances de travaux pratiques (TP).
« L’espace sur les paillasses est délimité, certaines manipulations devront être faites individuellement plutôt qu’à deux - ce qui a un impact sur notre budget -, mais les groupes de TP n’ont pas eu à être divisés. Nous avons la chance d’avoir de grandes salles pour les manipulations », témoigne Jerôme Depaquit, enseignant-chercheur en pharmacie.
Ces changements impliquent également des annulations d’événements, notamment associatifs.
« On parle des projets festifs des associations annulés, mais ce qui peine le plus les étudiants c’est de ne plus pouvoir mettre en place les actions caritatives habituelles : le don du sang, le Noël des enfants médicalisé, l’hôpital des nounours organisé dans nos locaux qui permet de familiariser les élèves en primaire à l’univers médical… », dit Marie Laurent.
Étudiants médiateurs
Ils sont 60 pour l’université de Reims et repérables à leur t-shirt rouge : les étudiants médiateurs, qui correspondent aux « étudiants sentinelles » mentionnés dans la circulaire du Mesri, ont pour mission de sensibiliser aux mesures sanitaires. Toujours en binôme, ils circulent deux heures par semaine sur les différents campus.
« A part quelques réactions négatives à la marge, la mission des étudiants médiateurs se passe bien. Ils sont principalement chargés de faire respecter le port du masque, doivent savoir entamer la discussion avec les plus réticents et répondre aux questions. Pour cela, ils sont suivis par le Service d’accompagnement des étudiants », indique Quentin Grandpierre, vice-président étudiant de l’université de Reims.
Une formation Covid-19 pour tous les étudiants de médecine…
« Les mesures sanitaires doivent faire partie du quotidien des étudiants. En mettant l’accent sur ces réflexes à avoir, tout le monde prend de l’avance dans la lutte contre les infections », souligne Bach-Nga Pham.
C’est pourquoi dès cette semaine, des formations Covid-19 d’une heure et demie sont données à chaque promotion de médecine, en commençant par les troisième années. L’objectif est ainsi d’approfondir la connaissance du virus, en l’abordant de façon scientifique.
…qui sera transmise aux personnels de santé
Depuis trois ans, les étudiants de médecine en troisième année effectuent un service civique qui consiste principalement à de la prévention dans les collèges et lycées. Il a vocation à évoluer cette année, vers de la prévention primaire à secondaire face à la Covid-19.
« L’objectif est que les étudiants puissent former sur le virus les professionnels de santé de la région, qui sont souvent mal informés, explique Laurent Andreoletti, enseignant-chercheur (PU-PH) en virologie. En outre, les stages au lit du patient sont maintenus en quatrième année, les étudiants devront cependant se faire tester en amont ».
Un impact psychologique primordial à accompagner
Dans un contexte de pandémie, les étudiants en médecine sont pour les uns particulièrement sollicités et, pour les autres, perturbés dans leur rythme de travail demandant :
« Il est difficile de se remettre à un rythme aussi soutenu pour les plus jeunes qui viennent de passer la fin de l’année en distanciel. Pour les troisième années, il faut également préparer le passage à l’hôpital. Pour eux et pour tous les étudiants qui sont au contact des malades, la vaccination antigrippale sera essentielle : c’est un point sur lequel nous sensibiliserons particulièrement », dit Bach-Nga Pham.
Cela dit, « les externes arrivent particulièrement motivés : ils ont été 300 à s’engager pendant le confinement et ils ont hâte d’être sur le terrain », témoigne Marie Laurent.
Un soutien propre aux étudiants de médecine
En cette rentrée, un besoin de soutien psychologique se fait ressentir : la Cadem (Cellule d’accompagnement des étudiants en médecine) a enregistré une augmentation de son activité avec 2 à 3 étudiants en médecine vus par semaine.
Depuis plusieurs années, cette initiative des enseignants s’attache à accompagner les étudiants sur divers sujets : études, finances, problèmes personnels, de santé… Elle réagit aux signalements qui lui sont remontés et approche les personnes identifiées « à risque » que ce soit en cours ou en stage. Par la suite, les étudiants sont suivis par un binôme d’enseignants (environ 70 étudiants par an jusqu’à la crise sanitaire).
« Alors que les personnels de santé sont en première ligne, il leur est -et c’est compréhensible- compliqué d’être sur tous les fronts : la pratique, la recherche, les cours et le reste. Malgré tout, ils ont trouvé le temps de suivre de façon rapprochée les étudiants et en recevoir de nouveaux, pendant le confinement et par la suite », souligne Marie Laurent.
Un reportage qui s’inscrit dans notre série de rentrée
Campus Matin fait sa rentrée ! Du 28 septembre au 05 octobre, nous sommes allés à la rencontre des établissements qui vivent une rentrée inédite.
• Lundi, nous avons parlé intégration avec l’Université de Lille et l’écoles d’ingénieurs HEI. Nous avons également rencontré Jean-Charles Caillez, enseignant à l’Université catholique de Lille et fervent défenseur de l’innovation pédagogique.
• Mardi, c’'état avec l’Université de Reims, plus précisément la faculté de pharmacie et médecine, et le labo CardioVir, que nous avons discuté santé.
• Jeudi, rendez-vous à CY Cergy Paris Université pour rencontrer des professeurs et partager leur expérience de travail. Et à Mines-PSL pour découvrir l’intérieur d’un service informatique.
• Vendredi 2 et lundi 5, direction l’Université de Grenoble pour faire témoigner les personnels de l’ombre, essentiels à la vie de l’établissement et évoquer les mobilités douces.
Rectificatif. Les phrases : « Un soutien psychologique proactif n’existe pas, pour l’heure. En revanche, les étudiants en santé peuvent se tourner vers une cellule d’accueil, joignable par mail, qui consiste en un bureau de deux enseignants. » décrivant de façon inexacte la Cadem ont été supprimées. Des informations complémentaires sur sa fonction ont été, à cette occasion, ajoutées.