Définitions

La chaire de professeur junior ou tenure track

Par Antoine Bovio | Le | Concours/recrutement

Officiellement introduite en France par la Loi de programmation de la recherche en 2020, la tenure track ou chaire de professeur junior tient ses origines des États-Unis. Adopté par plusieurs pays européens sous différents formats, ce contrat d’une durée de trois à six ans vise à attirer les meilleurs profils de docteurs en leur proposant un poste qui permet de devenir professeur des universités plus rapidement et sans devoir passer par plusieurs années de postdoctorat, souvent précaires.

300 postes en « tenure track » sont ouverts dans les universités françaises chaque année. - © CPU
300 postes en « tenure track » sont ouverts dans les universités françaises chaque année. - © CPU

Quelle est la durée d’une tenure track en France ?

La tenure track, plus souvent appelée en français chaire de professeur junior, permet de recruter des docteurs, pour une durée comprise entre trois et six ans, qui pourront aspirer à une titularisation dans un corps de directeur de recherche ou de professeur à l’issue de ce premier contrat.

Selon les disciplines, cependant, la chaire de professeur junior est plus ou moins attractive. En effet, pour devenir professeur, en lettres, sciences humaines et sciences, il faut passer l’habilitation à diriger des recherches (HDR), ce qui demande généralement plus de six années. Alors qu’en droit gestion l’agrégation du supérieur, et donc l’accès au professorat, peut s’obtenir plus rapidement.

Que dit la LPR sur les chaires de professeur junior ?

Ce nouveau type de recrutement a été défini par la loi de programmation de la recherche de décembre 2020, dans son article 4, pour les années 2021 à 2030.

« Afin de répondre à un besoin spécifique lié à sa stratégie scientifique ou à son attractivité internationale, dans des domaines de recherche pour lesquels il justifie de cette nécessité, un établissement public de recherche ou d’enseignement supérieur peut être autorisé, par arrêté du ministre chargé de la recherche, à recruter en qualité d’agent contractuel de droit public des personnes titulaires d’un doctorat, comme prévu à l’article L. 612-7 du code de l’éducation, ou d’un diplôme équivalent en vue de leur titularisation dans un corps de directeur de recherche. »

Combien de chaires de professeur junior ont été ouvertes en 2024 et dans quels types d’établissements ?

Selon la liste fixée par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche dans un arrêté du 23 février 2024 : 200 chaires de professeur junior étaient ouvertes en 2024, ce qui représente une hausse de 13 % du nombre de chaires attribuées par rapport à 2023, où 177 avaient été ouvertes.

128 sont ouvertes pour le corps des professeurs d’université, 70 pour les directeurs de recherche, une pour les professeurs du muséum d’histoire naturelle et une pour l’accès au corps des astronomes.

51 universités (+6 par rapport à 2023), neuf écoles d’ingénieurs (-3), une ENS (-2), deux IEP (+1) voient au moins une chaire de professeur junior ouverte pour l’accès au corps des professeurs des universités.

Quelle présence de la tenure track dans le monde ?

La tenure track, ou pré-titularisation conditionnelle, puise ses origines aux États-Unis. Mais elle est pratiquée également en Israël et s’est répandue en Europe notamment au Royaume-Uni, en Belgique, Suisse, Italie, Allemagne, aux Pays-Bas, en Suède, ou encore au Danemark.

Aux États-Unis, la pratique est vue comme le chemin par excellence pour obtenir le poste de professeur. Celle-ci est aussi associée à la liberté académique, qui permet de poursuivre de nouvelles pistes scientifiques et des recherches, même controversées, sans risque de pression politique dans le système universitaire américain.

Pour en savoir plus sur les origines de cette pratique : « États-Unis, Allemagne, France : la “tenure track” à l’épreuve des faits ».

Comment y prétendre ?

Le candidat peut répondre à un appel à candidatures fait au préalable par un établissement. Une commission de recrutement, composée de personnes de rang égal par rapport à l’offre à pourvoir, se charge d’en examiner le contenu. Elle doit avoir au moins la moitié de ses membres qui sont des enseignants-chercheurs, de personnels assimilés ou de chercheurs extérieurs à l’établissement. Une personne au minimum doit être de nationalité étrangère et exercer ses activités professionnelles à l’étranger.

À l’issue du contrat, une commission de titularisation organise une audition et juge la valeur scientifique du pré-titularisé ainsi que son aptitude à exercer les missions pour lui accorder ou non sa titularisation.

Quelles conditions et contraintes dans les contrats pour les établissements qui les intègrent ?

Les établissements n’ont aucune obligation de proposer ce type de contrat pour des chaires de professeur junior. S’ils décident de les mettre en place, ils sont néanmoins soumis à des quotas pour leurs effectifs :

  • 20 % des recrutements autorisés dans le corps des directeurs de recherche.
  • 15 % des recrutements autorisés dans le corps des professeurs d’université.
  • 25 % lorsque le nombre de recrutements autorisés dans un corps est strictement inférieur à cinq.

Quels sont les arguments en faveur des chaires de professeur junior en France ?

Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche liste les avantages suivants aux chaires de professeur junior :

  • Rajeunir l’entrée dans la carrière en recrutant à un moment plus proche de la thèse.
  • Laisser plus de place aux disciplines émergentes (neuro-informatique, bio-informatique, bio chimie, écologie moléculaire, nanotechnologies…).
  • Donner une part centrale au projet de recherche, sortir des logiques disciplinaires et mieux prendre en compte la diversité des mérites des candidats.
  • Réduire la précarité des années de postdoctorat, pour déboucher à terme sur de l’emploi titulaire.