La semaine de quatre jours pour les personnels expérimentée à Aix-Marseille Université
Par Isabelle Cormaty | Le | Management
Aix-Marseille Université va lancer jusqu’au premier trimestre 2024 une expérimentation de la semaine de quatre jours ou quatre jours et demi pour une partie de ses personnels. Un moyen pour l’établissement d’améliorer le bien-être de ses agents et de les fidéliser. Si le dispositif est concluant, une généralisation est prévue pour la rentrée 2024. Récit d’une démarche encore rare dans les institutions publiques.
Choisir d’organiser sa semaine de travail à temps complet sur quatre jours, quatre jours et demi ou cinq jours. Un rêve pour certains et bientôt une réalité pour une partie des personnels d’Aix-Marseille Université !
L’établissement qui compte 8000 personnels permanents (13000 avec les vacataires) va lancer jusqu’au premier trimestre 2024 une expérimentation en ce sens dans plusieurs de ses services et composantes qui présentent une typologie diverse de personnels.
Ont été retenus pour expérimenter le dispositif : l’Institut d’administration des entreprises (IAE), Polytech Marseille, la faculté d’économie-gestion, le Centre de recherche en cardiovasculaire et nutrition (C2VN) et au niveau central les directions des relations internationales et du numérique.
« Si on a 25 à 30 % de personnels intéressés, la phase d’expérimentation pourra débuter et ses résultats seront significatifs », précise Guillaume Pianezze, le directeur des ressources humaines de l’établissement. En plus de la semaine de quatre jours, les agents ont la possibilité de télétravailler le mercredi.
Améliorer le bien-être des personnels
« Un premier bilan sur le déploiement du télétravail a montré que les agents concernés arrivent à s’adapter et à mieux concilier vies professionnelle et personnelle. Dans ce cadre de réflexion est venue une nouvelle idée : celle de moduler l’activité des agents sur la semaine et donc de travailler moins de jours. La semaine de quatre jours ou quatre jours et demi sera un bonus au télétravail », souligne le DRH d’Aix-Marseille Université.
Il ajoute : « Cela répond aussi à la problématique du transport, car il arrive que des personnels mettent, par jour, 1 h 30 pour faire 15 km. »
Guillaume Maudet, le responsable du service d’aide aux outils et au pilotage des formations de la faculté d’économie et de gestion d’AMU qui participe à l’expérimentation, identifie lui plusieurs avantages à cette semaine de quatre jours. « Cela fait un déplacement en moins dans la semaine, donc des économies d’essence et du stress en moins. Peut-être que certains personnels pourront s’éloigner du centre-ville pour avoir un logement plus grand », suggère-t-il.
« Quand je suis arrivé à l’AMU, il m’a été proposé une place en crèche quatre jours par semaine. J’aurais bien aimé avoir une semaine de quatre jours comme jeune parent et passer plus de temps avec mes enfants », confie-t-il.
Attirer et fidéliser les personnels
Outre le bien-être des personnels, cette expérimentation répond aussi à un enjeu d’attractivité et de fidélisation, dans un contexte particulièrement difficile pour les établissements du supérieur.
« Nous voulons mettre en valeur cette semaine de quatre jours dans notre marque employeur. Les premières annonces de cette expérimentation dans la presse ont déjà eu un effet auprès de certains agents candidats qui nous en parlent », s’enthousiasme Guillaume Pianezze.
« Les nouveaux salariés n’acceptent plus certaines contraintes comme par le passé. Nous ne pouvons pas nous contenter des 300 jours de soleil par an pour attirer les candidats ! Aujourd’hui, si une organisation n’accepte pas le nomadisme ou l’hybridation, elle est old school. Nous pensons donc que cette nouvelle proposition peut avoir un impact sur la fidélisation, ou même sur l’absentéisme », avance-t-il.
Vers une évolution du temps de travail ?
L’expérimentation se déroulera jusqu’au premier trimestre 2024. Elle va « permettre à la DRH de voir s’il y a des blocages ou des difficultés, par exemple dans le cas où tous les personnels d’un service voudraient ne pas travailler le même jour de la semaine. Cela devrait être pensé et adapté pour certains services opérationnels comme nous pouvons le présupposer la scolarité par exemple, où il faut assurer une continuité de service. Donc, il faudra trouver des adaptations », précise Guillaume Pianezze.
La DRH observera notamment l’impact de la semaine de quatre jours et de l’ouverture du télétravail le mercredi sur l’absentéisme. « Nous regarderons aussi si cela va inciter des collaborateurs aujourd’hui à temps partiel, principalement des femmes, à reprendre à temps complet. Ce qui a aussi des implications financières non négligeables, estimées à 3 millions d’euros si tous passent à temps complet. »
Une généralisation à la rentrée 2024
Après l’expérimentation, s’en suivra aussi une phase de concertation. « L’objectif est d’avoir un premier retour d’expérience après les vacances de Pâques 2024, et de présenter en comité social d’administration et au conseil d’administration une proposition d’arbitrage sur les modalités de généralisation. Si nous obtenons l’accord des syndicats, nous lancerons une généralisation à la rentrée 2024. Tous les outils seront alors opérationnels », anticipe le DRH de l’université.
À partir des retours de terrain, l’établissement compte également mettre à jour sa charte du télétravail et sa circulaire sur le temps de travail qui date de 2012. Et envisage d’ouvrir des discussions sur la durée annuelle du temps de travail, actuellement fixée à 1 607 heures pour les agents à temps complet.
« La semaine de quatre jours va entraîner une amplitude horaire plus forte qu’il nous faudra analyser, et posera surement le sujet de la mise en œuvre de l’obligation réglementaire des 1 607 heures annuelles et de leur modulation voire peut-être la possibilité pour les agents de réduire leur temps de travail dans la semaine en réduisant leur régime horaire hebdomadaire et les jours de congés afférent. »
Un accompagnement de la DRH à plusieurs niveaux
Pour accompagner ce changement, la DRH d’Aix-Marseille Université a organisé des réunions dans les services concernés par l’expérimentation, afin d’en présenter les modalités, tant sur le plan réglementaire que technique avec la dématérialisation de la planification des congés et des jours de télétravail. Elle propose aussi :
• Une boîte à outils à destination des managers pour répondre à des questions concrètes : quid pour les mi-temps thérapeutiques ? comment choisir le jour chômé ?
• La construction d’une offre de formation sur ces sujets pour les managers de proximité. « Le télétravail est une révolution industrielle pour le management, qui implique notamment la confiance, la responsabilité, mais qui pose aussi plein de questions nouvelles. Nous travaillons avec l’Institut de management public et gouvernance territoriale (IMPGT) à l’élaboration d’un cahier des charges pour construire cette offre de formation. »