Le Series mania institute mobilise ses étudiants pour le plus grand festival de séries européen
Du 21 au 28 mars, le festival Series mania anime Lille avec des projections, masterclasses et la venue de personnalités du secteur : acteurs, producteurs, réalisateurs… Le Series mania institute, son pendant pédagogique, déploie des formations en lien étroit avec les besoins exprimés lors du forum métier. Objectif : placer les apprenants au cœur de l’écosystème professionnel.

Pendant une semaine, ce ne sont pas moins de 100 000 visiteurs qui foulent les pavés lillois pour participer au festival Series mania qui, depuis sa création en 2010, s’est imposé comme le plus grand rendez-vous européen dédié aux séries. Un événement où se rendent des étudiants de divers horizons, et plus particulièrement ceux du Series mania institute (SMI). L’occasion de présenter leurs projets, participer à des rencontres qui leurs sont réservées (avec l’actrice Marie Colomb ou encore Fabrice Gobert, réalisateur des Revenants) et décrypter les dernières tendances de l’industrie des séries.
Le forum, qui se tient en parallèle du 25 au 27 mars, est également l’opportunité de faire du réseautage auprès des 4 500 professionnels attendus. « Être au contact des professionnels nous permet de mieux voir les besoins et créer les formations adaptées », souligne Marianne Guillon, directrice du Series mania institute.
Un institut pour les étudiants, jeunes talents et professionnels
Le Series mania institute, depuis sa création en 2021, propose des formations, non-certifiantes ni diplômantes, adaptées à différents profils et niveaux d’expérience. Environ 150 personnes y sont formées chaque année.
L’institut s’adresse aux professionnels de l’image qui souhaitent se spécialiser en série, mais accompagne également des jeunes de 19 à 25 ans résidant dans les Hauts-de-France dans leur insertion professionnelle via le dispositif Tremplin (financé par l’Afdas et France Travail). « Pour la première promotion, nous avons 70 % de sorties positives : contrat de travail ou reprise d’études », rapporte Marianne Guillon.
Cette école représente un budget annuel de 1,4 million d’euros, financé à 60 % par des acteurs publics, principalement l’État et l’Union européenne. Le festival en lui-même est géré par l’Association du festival international des séries de Lille, principalement financé par des acteurs publics, la Région Hauts-de-France, le Centre national du cinéma, l’Union européenne, la ville et la métropole lilloise.
Sciences Po Lille : un partenariat ancré dans la pratique
Côté enseignement supérieur, le Series mania institute collabore depuis trois ans avec Sciences Po Lille autour de l’option audiovisuelle du master industries culturelles qui a évolué, à la rentrée 2024, en un master à part entière dédié au management des métiers de l’image . Une quinzaine d’étudiants bénéficient de formations, d’intervenants et du réseau du Series mania institute.
« C’est important de faire travailler ensemble des profils différents (scénaristes, producteurs, diffuseurs…), car, contrairement à un film, une série nécessite une collaboration pendant plusieurs saisons et donc plusieurs années. Tous les métiers doivent apprendre à se parler », affirme Pierre Ziemniak, directeur des programmes du SMI.

Cette année, les étudiants ont notamment contribué à la minisérie Maslow, développée dans le cadre du programme Tremplin et projetée au festival. Répartis en groupes thématiques (production, diffusion ou distribution), les étudiants travaillent de manière concrète sur les étapes du développement d’une série : choix du projet, retours sur l’écriture, participation à un jury, accompagnement à la diffusion internationale ou à la stratégie de communication.
« Nous avions des étudiants qui partaient à Paris pour se spécialiser en audiovisuel après leur diplôme de Sciences Po Lille. Créer cette majeure était l’opportunité d’ancrer ce parcours dans les Hauts-de-France, dont une bonne partie de la promotion de cette année est originaire », explique Léa Jeanne Boehringer, responsable de la majeure management des métiers de l’image à Sciences Po Lille, scénariste et productrice.
Eurêka series : trois mois pour écrire, pitcher et networker
Parmi les formations se déroulant lors du festival Series mania, le programme Eureka series réunit neuf participants venus de cinq pays. Répartis en trinômes, ils doivent imaginer un concept de série en 12 semaines. « Ce sont des professionnels, qui ont fait des études d’audiovisuel pour se spécialiser dans les métiers de la série. Il y a aussi des reconversions », détaille Maëlle Deffrenne, responsable des formations continues.
En ce début de parcours, un cours de dramaturgie est animé par un scénariste et professeur à l’université de sciences appliquées HAW Hamburg, Joachim Friedmann. « Parfois le monde académique n’est pas assez rapide pour suivre les changements. Dans le domaine du film, les séries n’étaient pas prises au sérieux pendant longtemps. Les scénaristes avec qui j’ai travaillé étaient souvent autodidactes », observe-t-il.

À l’occasion du festival, les étudiants sont aussi préparés à réseauter et à pitcher. « On nous forme à ne pas perdre nos moyens. Je vais essayer de développer mon réseau », témoigne une des participantes à Eureka series, Manon Benhlima, qui a été chanteuse, assistante de réalisation et a déjà de l’expérience comme scénariste.
Des résidences pour accompagner les projets plus mûrs
Alors que le rez-de-chaussée du Series mania institute devient un lieu de restauration pendant le festival, une partie du programme est délocalisé au Bazaar Saint-So, une gare désaffectée réhabilitée notamment en espace de coworking. Sont concernés les participants au Writer’s Campus, une résidence — sorte de stage intensif — destinée aux scénaristes avec un projet de série avancé, mais sans société de production.

Pendant une semaine, ces derniers bénéficient de l’accompagnement d’un consultant scénario afin de se préparer à pitcher et à rencontrer des professionnels lors du forum.
Parmi les résidentes, Lucie Tremolières, passée par Eurêka Série en 2022 et scénariste pour le cinéma comme la télévision, développe une série avec sa partenaire allemande. « Notre histoire se situe dans un futur où il serait absurde d’être milliardaire. Nous voulons montrer d’autres façons d’habiter le monde. Il faut être conscient de la façon dont ce que l’on écrit sera perçu : le récit peut renforcer les biais ou les remettre en question », explique-t-elle.
« Pour l’instant, nous continuons à améliorer notre projet. Nous voulons clarifier notre idée, rencontrer des partenaires au forum. Il y a plein de conférences intéressantes. Par exemple sur l’intelligence artificielle ou sur ce que les chaînes vont bientôt programmer », poursuit celle qui s’interdit de se servir de cet outil qu’elle juge trop gourmand en énergie.

Lucie Tremolières intervient désormais également lors du programme Eureka Series sur l’écriture responsable. Lorsqu’elle écrit un scénario, elle s’interroge sur l’impact écologique de ses choix narratifs lors de la réalisation. « Cette scène de pluie qui nécessite de consommer beaucoup d’eau est-elle vraiment nécessaire à l’histoire ? », s’interroge-t-elle par exemple.
Promouvoir une production de séries plus ambitieuse en Europe
Le Series mania institute fait partie de Stream, un réseau européen de dix écoles partenaires (dont La Fémis, Serial Eyes à Berlin…) pour favoriser les passerelles entre formations et la coproduction entre pays européens. Un enjeu clé selon la directrice du SMI : « Si nous voulons des projets d’envergure, il faut les penser en coproduction dès l’écriture. »
L’international est également au cœur de la récente formation créée en partenariat avec Warner bros discovery qui vise à accompagner des professionnels avec plusieurs années d’expérience. L’objectif ? « Proposer un vivier de scénaristes pour les séries qui seront réalisées pour la plateforme de streaming Max », indique Marianne Guillon.