Vie des campus

Santé mentale : quand les étudiants se mobilisent pour aider leurs pairs

Par Marine Dessaux | Le | Expérience étudiante

C’est une question primordiale qu’il revient avant tout aux professionnels de santé d’aborder, mais qui implique l’ensemble de l’écosystème du supérieur, à commencer par les étudiants eux-mêmes : la santé mentale.

Depuis plusieurs années et plus encore en temps de pandémie, diverses associations étudiantes se mobilisent pour épauler leurs camarades.

L’engagement des étudiants leur a permis de mieux vivre la crise sanitaire - © CPU - Université de Bordeaux
L’engagement des étudiants leur a permis de mieux vivre la crise sanitaire - © CPU - Université de Bordeaux

Nous vous parlions récemment de la ligne d’écoute nocturne Nightline par les étudiants, pour les étudiants. Poursuivons notre tour d’horizon d’engagements en faveur de la santé mentale au moyen de l’aide par les pairs.

Afev, le mentoring étudiant pour garder du sens et créer des liens interpersonnels

À l’origine, l’Afev forme des étudiants bénévoles qui accompagnent scolairement des enfants et adolescents (suivi de devoirs, aide pour la lecture, etc.). Mais, alertée par les retours de lycéens, dont l’année de terminale a été bouleversée suite au premier confinement et ne se sentant pas légitimes, elle a pris une nouvelle initiative pour pallier la difficulté de créer des liens interpersonnels.

Une initiative en collaboration avec les universités

Ainsi, dans les régions Nouvelle Aquitaine et Haut-de-France, un système de mentorat entre étudiants en licence 2 ou 3 et primo-arrivants a été mis en place. Une première expérience à petite échelle - « entre 300 et 400 étudiants accompagnés », selon Sandrine Martin, responsable enseignement supérieur de l’Afev - mais réussie.

« Nous avons été assez intéressés par l’implication des universités dans ce projet-là. Certaines étaient très en difficulté par rapport à ce qui est mis en place habituellement pour créer du lien au sein de la communauté étudiante, rapporte Sandrine Martin. Cette initiative a permis de créer des liens de manière très différente de ce qui existait auparavant. »

Des mentors accompagnés par l’Afev

Les universités ont avant tout apprécié l’accompagnement proposé par l’Afev qui consiste en la « formation des mentors, l’apport d’informations fiables pour orienter au mieux les étudiants mentorés et l’animation du mentorat », dit Sandrine Martin.

En effet, des initiatives de mentorat étaient parfois déjà en place dans les établissements, mais « ce n’est pas forcément simple de créer une rencontre pour que ça prenne et que ce soit utile aux deux : mentor et mentoré », souligne la responsable enseignement supérieur.

Une création de liens interpersonnels qui a permis de faire ‘double emploi’ : en facilitant l’entrée des mentorés dans la communauté étudiante et en maintenant un lien pendant le deuxième confinement.

Quels profils d’étudiants mentorés ?

D’après Sandra Martin, 30 % des étudiants qui ont demandé à être tutorés ne se trouvent pas dans la formation qui était leur premier choix Parcoursup. Pour la majorité, ils ne sont jamais venus à l’université, n’ont pas d’amis ou de membres du cercle familial à proximité du campus et vivent à plus 100 km du domicile familial. En outre, 40 % d’entre eux sont boursiers.

« Nous avons des retours de certains étudiants qui disent : 'si je n’avais pas eu ce lien-là, je serais rentré chez moi et je ne serais jamais revenu à l’université', raconte Sandra Martin. On voit que le lien de pair-à-pair est fondamental pour que certains étudiants continuent à venir en cours. »

Et pour la rentrée prochaine ?

« L’initiative va être réitérée, indique Sandra Martin. L’objectif est de démultiplier le tutorat pédagogique mis en œuvre depuis plusieurs années d’un côté et, de l’autre, de créer du lien interpersonnel sans autre but que de faire entrer un pair dans son cercle de connaissance. »

Un projet qui verra le jour avec la collaboration de nouvelles universités et des associations étudiantes.

Enquête : pour les étudiants bénévoles de l’Afev, s’engager est une nécessité

Interrogés lors d’une enquête lacée par l’Afev du 18 au 31 janvier 2021, 2 000 étudiants engagés au sein de l’association s’expriment sur leur vécu de la crise sanitaire.

Il en ressort que, pour 70 % des étudiants interrogés, l’engagement en tant que mentor permet « de mieux traverser la période », et cela avant tout grâce à la sensation d’ « être utile » (68 %).

Psycom et l’IUT Côte d’Azur : une communication sur la santé mentale des jeunes par les étudiants

C’est une collaboration entre Psycom, un organisme public d’information et de lutte contre la stigmatisation en santé mentale, et l’IUT de l’Université Côte d’Azur qui a fait naître un projet original d’aide par les pairs : la réalisation d’une campagne de prévention en santé mentale à destination des jeunes de 17 à 21 ans par des étudiants.

« Nous nous interrogions sur la façon d’aborder la question de la santé mentale des jeunes. Solliciter des étudiants, en leur demandant de réfléchir à la façon de s’adresser à leurs pairs sur ce sujet, nous semblait intéressant », explique Aude Caria, directrice de Psycom.

Cette idée de co-construction d’un projet sur la thématique de la santé mentale par une démarche participative a pris corps en septembre dernier. « Nous avons demandé aux étudiants en information-communication de répondre à un brief proposé par Psycom », raconte Virginia Gratien, enseignante à l’IUT Côte d’Azur, spécialisée sur la thématique de la santé mentale.

Un village d’activités ludiques pour sensibiliser aux problématiques de santé mentale

Les étudiants, répartis en agences fictives, ont ainsi présenté différents projets pour répondre aux attentes du « client ». L’équipe qui s’est distinguée a imaginé un village d’activités ludiques destiné à définir la santé mentale, en expliquer les causes et conséquences et proposer des solutions de prévention. Divers ateliers insolites ont été imaginé notamment la construction d’une « tour de la santé mentale », une « marche des rôles » et un « débat mouvant ».

« Ils ont évité les pièges de la stigmatisation de la santé mentale », se félicite Aude Caria.

Un effet double miroir

Ce que les instigatrices du projet n’avaient pas prévu, en revanche, c’est ce qu’Aude Caria appelle « un effet double miroir ».

« L’actualité nous a mis en situation expérimentale. Nous sollicitions des étudiants qui se sont retrouvés concernés directement par la thématique. Cette situation leur a permis de comprendre dans leur chair la question de la santé mentale. »

Elle souligne par ailleurs : « Nous avons maintenant 80 futurs communicants qui sont formés à cette question-là, c’est une compétence rare dans leur CV ».

La Fage, des événements et ressources pour lutter contre la détresse psychologique

Pour lutter contre la détresse psychologique, la Fage, qui fédère les associations étudiantes, a recensé diverses ressources mises à disposition :

En outre, depuis le début de la crise sanitaire de 2020, la Fage propose l’accompagnement gratuit d’une psychologue à distance pour les étudiants. Divers événements sont également mis en place :

  • Sors de ta piaule, qui réunit trois semaines par an toutes les associations étudiantes lyonnaises et proposent des activités gratuites contre l’isolement;
  • Des live Twitch, des soirées-débats « complètement réinventées », indique Anniela Lamnaouar, vice-présidente en charge des affaires sociales à la Fage.

« Notre objectif est typiquement de relayer et de mettre en lumière les initiatives pour que les étudiants ne se retrouvent pas sans ressources », souligne Anniela Lamnaouar.

En outre, pour mieux accompagner leurs pairs, les cadres associatifs étudiants ont été formés aux premiers secours en santé mental.

Un sujet traité dans le cadre des RDVSE 2021

C’est à l’occasion des Rendez-vous de la santé étudiante 2021, les 30 et 31 mars 2021 (dont vous retrouverez un replay ici), qu’un atelier « Favoriser et accompagner la promotion par les pairs du bien-être mental » a réuni la Fédération des associations générales étudiantes (Fage), l’Association de la fondation étudiante pour la ville (Afev), la ligne d’écoute Nightline, le site d’informations sur la santé mentale Psycom et l’IUT Cote d’Azur.

Organisé par le média spécialisé, Universités & Territoires, cet événement en visioconférence a été l’occasion pour plusieurs étudiants bénévoles de partager leur expérience du soutien par les pairs en matière de santé mentale.