Vie des campus

Une dose d’inspiration pour concevoir les campus du futur

Par Marine Dessaux | Le | Expérience étudiante

Au début de l’année universitaire, une plateforme recensant les lieux innovants et inspirants dans l’enseignement supérieur a vu le jour. Quelles possibilités offre-t-elle pour les établissements ? Comment a-t-elle évolué ? Quels espaces originaux se démarquent ? Six mois après le lancement, les porteurs du projet au sein de la Dgesip, racontent.

The Kube, un espace de l’école TBS, fait partie des lieux innovants recensés par la plateforme. - © Lecarpentier Lydie
The Kube, un espace de l’école TBS, fait partie des lieux innovants recensés par la plateforme. - © Lecarpentier Lydie

Des learning centers, learning labs, fablabs, espaces de coworking, studios d’enregistrement, téléamphithéâtres… La plateforme « Lieux inspirants de l’enseignement supérieur » recense toute sorte d’espaces innovants depuis son lancement, le 4 octobre 2022.

Depuis, 45 établissements ont renseigné des lieux et cette initiative de la Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (Dgesip) du ministère de l’enseignement supérieur a évolué. Elle compte à ce jour 225 espaces répartis en France et dans les territoires d’outre-mer.

Montrer les innovations pédagogiques et d’usage

Ce projet prolonge le guide « Campus d’avenir : concevoir des espaces de formation à l’heure du numérique » écrit par Florence Kohler, cheffe de projet à la mission expertise et conseil auprès des établissements de la Dgesip. Cette version en ligne, présente un atout évident : être actualisable. Mais, surtout, pouvoir être enrichie directement par les établissements.

La plateforme est portée par cette architecte de formation, ainsi que par Yann Caradec, adjoint au chef du département des outils d’aide à la décision, et par Claire Josserand, du département diffusion des connaissances et de la documentation. Ont également participé à sa construction un groupe de travail regroupant le Learning lab network et l’Association française des directeurs et personnels de direction des bibliothèques universitaires et de la documentation (ADBU).

Un outil pour établissements, chercheurs et concepteurs d’espace

Faire un benchmark plus rapidement.

L’objectif initial  : permettre aux établissements qui veulent créer des espaces innovants de s’inspirer de ce qui existe ailleurs et, au niveau ministériel, être au fait des initiatives. « Nous voulons que les acteurs de la conception d’espaces puissent se mettre en contact facilement. Avoir une personne avec qui échanger et accéder au cahier des charges de la construction d’un espace inspirant fait gagner un temps précieux en conception et accéder aux données des espaces permet de faire un benchmark plus rapidement », indique Florence Kohler.

Florence Kohler et Yann Caradec ont présenté la plateforme au grand public lors de la visite du learning center de l’Ensiacet (Toulouse INP). - © MESR
Florence Kohler et Yann Caradec ont présenté la plateforme au grand public lors de la visite du learning center de l’Ensiacet (Toulouse INP). - © MESR

C’est également une ressource pour de potentiels travaux de recherche qui étudieraient la typologie des lieux innovants dans le supérieur, le lien entre réussite étudiante et mise à disposition de certains espaces, etc.

Du côté du ministère de l’ESR, la plateforme a notamment permis de « faire du repérage pour le colloque national Hybridation des formations [qui revenait en janvier dernier sur les outils mis en place au sein des établissements dans le cadre de l’appel à projets du même nom] » ou encore de suivre les tendances en termes de conception d’espaces. « Les informations peuvent également intéresser des architectes, programmistes et tous ceux qui veulent concevoir ou mettre à jour des espaces notamment pour améliorer la pédagogie ou la vie étudiante », ajoute la cheffe de projet.

Tout cela dans un contexte où les nouveaux contrats d’objectifs, de moyens et de performance que le ministère va signer avec une première vague d’établissements en 2023, peuvent être le moyen de financer de nouveaux espaces.

Une plateforme en évolution constante…

Une recherche multicritères, de nouvelles rubriques (photothèque, vidéothèque…) : le processus d’amélioration de la plateforme est constant. Sur demande, certains types d’espaces ont été ajoutés comme les espaces pluriusages, les salles de travail en groupe et les équipements sportifs. Un prochain élargissement pourrait concerner les espaces innovants des Crous ou encore ceux des campus connectés.

La plateforme est consultée à l’étranger.

Une initiative qui attise intérêt à l’international : « La plateforme est consultée à l’étranger et nous avons été sollicités par la représentation française à l’OCDE pour écrire une fiche montrant l’apport de ce type de plateforme afin de valoriser les espaces inspirants des établissements d’enseignement supérieur », raconte Yann Caradec.

La plateforme permet de mettre en avant des espaces insolites et initiatives… parfois insoupçonnés ! Parmi eux : les pôles entrepreneuriat étudiant du programme Mut@camp de l’Université de Lorraine qui permet de repenser des espaces pédagogiques et des lieux de vie, le Skylab de Centrale Lyon, « particulièrement pointu en termes d’outils numériques » ou encore The Kube de l’école de management TBS qui mixe usage de mobilier fixe et mobile selon l’intention pédagogique.

Autre point fort : la possibilité de dégager les tendances. « Pour les juristes, on observe des reconstitutions de salles de procès, dans les universités de Lille et Montpellier. Des innovations tournent également autour de la pharmacie avec des officines pédagogiques dans ces mêmes universités. »

Une classe de travail en groupe se transforme en salle de procès, à l’Université de Lille. - © Université de Lille-FSJPS
Une classe de travail en groupe se transforme en salle de procès, à l’Université de Lille. - © Université de Lille-FSJPS

… qui doit encore être prise en main par les établissements

« Nous aimerions qu’il y ait de plus en plus d’établissements et espaces à contribuer : de leur implication dépendra l’exhaustivité de la plateforme », souligne Yann Caradec. En effet, les gestionnaires de cette initiative ont dû prendre en compte une problématique répandue dans le supérieur : des établissements sursollicités à qui il est compliqué de demander encore plus d’informations.

Pour faciliter le processus, toute personne en interne peut renseigner un lieu inspirant : dirigeants comme enseignants-chercheurs ou encore personnels.

« Nous avons voulu construire la plateforme la plus facilement administrable de notre côté et de celui des établissements », dit Yann Caradec.

Ainsi, bien qu’entrer un lieu inspirant sur la plateforme peut être long et demande de faire appel à plusieurs acteurs (pour connaître le nombre de mètres carrés, fournir le cahier des charges, etc.), tous les champs ne sont pas obligatoires et il est possible de les remplir en plusieurs fois. Une fois soumise, la demande est examinée par la Dgesip selon les critères établis (voir encadré) et le lieu est ensuite publié sur le site.

À plus long terme, une question se pose : « Un lieu inspirant aujourd’hui, le sera-t-il toujours dans 15 ans ? s’interroge l’adjoint au chef du département des outils d’aide à la décision. À chacun de voir : les établissements sont libres de dépublier leur lieu à tout instant. »

Qu’est-ce qu’un « lieu inspirant » ?

Pour être qualifié de lieu inspirant, un ensemble d’espaces d’innovation d’un même bâtiment doit comporter au moins deux espaces d’apprentissage formel et au moins un espace d’apprentissage informel ou répondre à au moins deux critères dans la liste suivante :

• l’addition des surfaces doit faire au minimum 150 m2 ;
• ces espaces doivent être ouverts en dehors des horaires habituels ;
• un de ces espaces, au moins, doit avoir été conçu dans le cadre du contrats de plan État-Région, d’une initiative d’excellence en formations innovantes, appel à manifestations d’intérêt ou être lauréat d’un prix ;
• un de ces espaces, au moins, doit faire partie du réseau LearningLab Network ou de l’association France Living Labs, ou doit répondre à la charte du MIT des fablabs.

Une définition assez large qui semble bien comprise des établissements. «  Nous n’avons jamais vu un espace soumis qui ne serait pas innovant », témoigne Yann Caradec.