Comment le plus grand centre universitaire de FLE en Bretagne forme-t-il les étudiants étrangers ?
Par Marine Dessaux | Le | Relations extérieures
Depuis plus de 60 ans, le Cirefe, centre universitaire de français langue étrangère de l’Université de Rennes 2, enseigne le français aux étrangers. Accueillant plus de 70 nationalités chaque année, il propose un programme mêlant cours de langue et activités culturelles. Depuis la crise sanitaire, il fait cependant face à une baisse d’effectifs. Formation, profils des étudiants, enjeux… Quelles sont les perspectives de ce centre ?
La formation linguistique et culturelle des internationaux : c’est le sujet au cœur du Centre international rennais d’études de français pour étrangers (Cirefe). Créé en 1963 au sein de l’Université Rennes 2, il est le plus grand centre universitaire de ce genre dans la région Bretagne. Zoom sur cet objet à part.
Un service général de l’université
Le Cirefe est un service général de l’Université Rennes 2 qui fonctionne sur recettes propres. En d’autres termes, il ne reçoit pas de dotations de Rennes 2 et tourne grâce aux droits d’inscription que paient les étudiants. Une partie des enseignants titulaires sont cependant rémunérés par l’université ainsi que trois personnels administratifs.
En plus de 20 d’enseignants permanents (dont deux maîtres de conférences et des enseignants du secondaire affectés dans le supérieur pour le reste), le Cirefe fait appel à une cinquantaine de vacataires et sept personnels administratifs.
Enseigner le français à plus de 70 nationalités
Le centre accueille dans ses programmes semestriels des étudiants de 70 à 80 nationalités différentes. Parmi les plus représentées ce semestre : les Vietnamiens, les Iraniens et les Chinois.
« Le public du Cirefe ne reflète pas le public des étudiants étrangers de l’établissement qui est constitué principalement de francophones. Sur les 2500 à 3000 étudiants internationaux, la plupart viennent du Sénégal. Par ordre décroissant, viennent ensuite la Colombie, le Vietnam, le Bénin, le Maroc, l’Italie », précise Edwige Fusaro, vice-présidente international de l’Université Rennes 2.
« Nous accueillons tous types de profils. Beaucoup ont un projet de formation en France, mais il y a également des étudiants qui viennent d’établissements partenaires, dans le cadre de conventions bilatérales, pour temps limité », détaille Chantal Prost, directrice du Cirefe et enseignante de français langue étrangère (FLE).
Deux types de formations : semestrielle et en soirée
Deux programmes semestriels sont proposés aux étudiants étrangers : des cours intensifs à raison de 16 heures par semaine dans le cadre d’un diplôme universitaire d’études françaises (Duef), ou des cours de soutien linguistique en soirée. 360 étudiants ont choisi la première option durant ce deuxième semestre et 400 apprenants ont préféré les cours du soir.
Une des spécialités de ce centre réside dans son programme culturel original et riche : excursions dans la région, soirées au théâtre, ateliers artistiques (musique, films, journalisme…) et même danses bretonnes !
Pendant la période estivale, il est également possible d’apprendre le français au Cirefe, dans le contexte plus détendu des cours d’été de juillet ou celui plus orienté vers les études supérieures, de l’université d’été du mois d’août.
« Tous les étudiants qui suivent les cours du Cirefe ont accès à l’ensemble des services de l’Université Rennes 2 : ses manifestations culturelles, ses expositions, ses activités sportives, ses bibliothèques, l’épicerie solidaire, un accompagnement psychologique au besoin, etc. », indique Edwige Fusaro.
Des droits d’inscription à 1 100 euros par semestre
Les droits d’inscription s’élèvent à 1 100 euros par semestre, ce à quoi s’ajoutent 103 € de contribution vie étudiante et de campus pour l’année universitaire. « Ces tarifs sont un peu en hausse pour cette rentrée, mais n’ont pas beaucoup augmenté depuis dix ans », souligne Edwige Fusaro qui rappelle que le Cirefe rennais est l’un des moins chers de France.
Des effectifs en baisse depuis la crise Covid-19
Les effectifs pour ces programmes sont moins importants qu’avant la crise Covid-19 : « Chaque semestre, nous avions environ 500 étudiants en semaine et 650 en cours du soir. Aujourd’hui, nous constatons une baisse d’environ 20 %de nos effectifs », chiffre Chantal Prost.
Une des raisons à cela : « De plus en plus d’étudiants annulent leur inscription parce qu’ils n’ont pas reçu de visa, notamment en Colombie. Il y a également des refus de visa de la part des autorités françaises en Iran », poursuit celle qui a été attachée de coopération en Inde.
Renforcer les partenariats avec les pays anglophones et en développer de nouveaux
Les enjeux du Cirefe ? « Redynamiser les conventions en Europe et hors Europe, et en créer de nouvelles. Nous souhaitons renforcer nos échanges avec les pays anglophones proches, pour qui les cours du Cirefe sont très attractifs. À la Toussaint 2024, nous effectuerons ainsi une mission de prospection et de consolidation au Pays de Galles et en Écosse », explique par exemple Edwige Fusaro.
Augmenter les mobilités des étudiants, enseignants et personnels administratifs
« L’accueil des étudiants et collègues internationaux au Cirefe est un levier central de notre rayonnement et de notre stratégie internationale : il s’agit aussi d’augmenter les mobilités des étudiants, enseignants et personnels administratifs. Chaque année, Rennes 2 propose à tous ses personnels de participer à une semaine de stage intensif à Dublin avec des cours d’anglais », souligne la vice-présidente international.
Dans l’optique de développer les partenariats, le Cirefe a reçu, depuis février, des étudiants des États-Unis, de Thaïlande, de Malaisie, d’Islande… Fin juin, le centre a aussi organisé une « staff week » avec une vingtaine de personnels d’universités européennes (Espagne, Allemagne, Slovénie…). Au programme là aussi : cours de français et visites culturelles.
« Pour mener à bien les activités du Cirefe, nous réunissons le conseil de gestion deux fois par an pour regarder les chiffres, faire le bilan, étudier les problématiques et les perspectives », rapporte Edwige Fusaro. La vice-présidente international ne voit cependant pas particulièrement de problématiques au sein du Cirefe, qu’elle décrit comme « un bijou pour l’Université Rennes 2 particulièrement attractif auprès des partenaires internationaux ».
Coordonner l’accueil des étudiants en exil
Depuis 2015, le Cirefe accueille également des étudiants en exil pour un programme spécifique de langue et d’intégration, le DU Passerelle, qui les aide à préparer leur parcours académique et professionnel en France.
« Nous ne pouvons accepter chaque semestre qu’une trentaine d’étudiants en DU passerelle, car il faut pouvoir financer ces places qui sont exonérées de droits d’inscription. Nous recevons entre 80 et 100 candidatures chaque année. Il y a donc également des réfugiés et demandeurs d’asile qui s’inscrivent en Duef », chiffre Chantal Prost.
C’est une professeur agrégée affectée dans le supérieur, Ariane Feller, qui coordonne le DU passerelle. Elle accompagne les étudiants dans les démarches administratives (inscription pédagogique, logement d’urgence, demandes de bourse, allocation…).
Les étudiants en DU passerelle sont accompagnés jusqu’au niveau B2. Ainsi, un étudiant qui intègre ce diplôme au niveau A1 réservera une place pendant quatre ans. Voir plus en cas de non-validation d’un semestre. « Chaque semestre, nous suivons les résultats des étudiants en exil et échangeons avec eux pour connaître leurs difficultés à entrer dans l’apprentissage du français. Selon les situations personnelles, il y a des problèmes de santé mentale, économiques, ou d’accès au logement… », rapporte la directrice du Cirefe.
Elle poursuit : « La majorité des étudiants en exil se disent stressés, découragés, déprimés parfois. Ils ont besoin d’un accompagnement particulier. » Pour favoriser les apprentissages et l’intégration des étudiants en exil, le Cirefe bénéficie du soutien d’autres composantes de Rennes 2, notamment le service santé des étudiants et le service vie étudiante.