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Une année de communication dans le supérieur décryptée avec #ComESR

Par Marine Dessaux | Le | Relations extérieures

Pour la deuxième année consécutive, Manuel Canévet et Céline Authemayou, de l’agence Canévet & associés, compilent les tendances de la communication dans l’enseignement supérieur dans #ComESR 2019. Ils entendent ainsi contribuer aux réflexions du secteur en offrant un tour d’horizon et une prise de recul sur une année d’actions et de campagnes.

Retrouvez l’interview de Manuel Canévet, suivi des choix de Campus Matin - notre logo, campagne et tendance préférés.

Une année de communication dans le supérieur décryptée avec #ComESR
Une année de communication dans le supérieur décryptée avec #ComESR

Manuel Canévet est fondateur de Canévet et associés, agence de stratégie de communication. Pour Campus Matin, il revient sur #ComESR 2019, co-écrit avec Céline Authémayou, consultante en relations presse et stratégie éditoriale également chez Canévet et Associés. Un ouvrage qui analyse toutes les tendances en communication : stratégie de marque, identité visuelle relations presse, réseaux sociaux, ressources humaines…

Campus Matin s’est plongé dans l’ouvrage et a demandé à Manuel Canévet de lui en dire plus.

« On se focalise trop sur les logos ! »

« Une façon d’apporter notre pierre à l’édifice », Manuel Canévet à propos de ComESR - © Thibault Plaire-Canévet et Associés.
« Une façon d’apporter notre pierre à l’édifice », Manuel Canévet à propos de ComESR - © Thibault Plaire-Canévet et Associés.

Vous ouvrez #ComESR avec une sélection de nouveaux logos, pourquoi ? 

Pour évacuer la question ! [rire] Il est vrai que, souvent, on se focalise trop dessus. Mettre les logos en premier permet d’une part de faciliter l’entrée dans le livre en proposant des éléments visuels, de garder un sommaire similaire à la première édition, mais aussi de parler de ce qu’il y a de plus visible dans un dispositif de communication avant d’approfondir le sujet.

Et puis, au-delà du logo, cette sélection dit quelque chose de la volonté de prendre la parole d’un établissement, d’un changement de stratégie.

Vous vous exprimez contre le vote ou « pire » les concours organisés par certains établissements pour choisir leur logo. Pour quelles raisons ?

Un logo est une construction technique qui exprime une stratégie

La mode est au participatif, certes, mais cette démarche de faire voter, ou de demander aux étudiants de dessiner un logo n’est pas probante. Un logo est une construction technique qui exprime une stratégie, un choix éditorial, des valeurs à incarner.

C’est le fruit d’une réflexion qui aboutit à la construction d’un signe, mais aussi de codes graphiques, que l’on retrouvera dans le site et les documents de l’établissement. Chacun a un avis de ce qui est esthétique ou pas, une couleur qu’il préfère, mais nous ne sommes pas tous artistes. 

Organiser un vote sans justifications stratégiques ni explications du processus créatif est contreproductif. C’est reléguer un logo à un ‘bidule’, quelque chose d’accessoire qui n’a pas vraiment de sens.

#ComESR 2019 met en avant trois campagnes, comment avez-vous effectué la sélection ? 

Ça a finalement été assez simple : ce n’est pas comme si on croulait sous les campagnes de communication.

Nous avons privilégié la Cité internationale universitaire de Paris pour sa campagne d’image, qui s’inscrivait dans un contexte politique, la Conférence des grandes écoles pour sa campagne d’influence qui faisait jouer le jeu à l’ensemble de ses écoles de management - un petit plus qui nous semble important.

Nous avons enfin voulu mettre l’accent sur un mouvement global de retouche d’identités pour infléchir le positionnement des écoles de commerce, quatre d’entre elles ayant remanié leur marque en 2019 (ESCP BS, Neoma BS, TBS et Rennes SB).

Répertorier ces campagnes n’a pas été un problème, puisque nous faisons de la veille pour nos clients. Nous animons à ce sujet une newsletter mensuelle qui fait le tour de tout ce qui se passe dans le secteur, et on essaie d’en tirer des apprentissages. 

C’est d’ailleurs cela notre propos : décrypter, donner notre avis, des idées, en espérant faire réagir le secteur. C’est une façon d’apporter notre pierre à l’édifice.

Je trouve qu’il n’y a pas assez de campagnes de communication, car trop peu de moyens sont disponibles en interne. Les écoles publiques en particulier devraient mieux défendre leur image, se permettre de faire de la communication.

« Le web n’est pas une baguette magique »

Deuxième édition de #ComESR - © Canévet et associés
Deuxième édition de #ComESR - © Canévet et associés

Vous avez choisi d’éditer #ComESR uniquement au format papier. Vous y croyez donc encore comme support pour la communication ?

Le papier pour les universitaires a toujours été important, seulement tout s’est aujourd’hui beaucoup numérisé. Pourtant, le web, ce n’est pas une baguette magique. 

Le papier a notamment l’avantage d’être plus officiel. Il y a aussi une question de durée : quand on soigne un support papier, il dure plus longtemps. C’est pour cela que nous avons voulu créer un livre : c’est un moyen de garder une trace, une information qui reste plus longtemps sur les bureaux et les étagères.

C’est le bon moment pour réfléchir sur ce que l’on distille

Avec cet publication, on incite nos clients à réfléchir : ce n’est pas parce que quelque chose est en ligne que ça marche. Chaque support à ses avantages et inconvénients. Le papier et le digital sont d’ailleurs complémentaires, nous estimons que c’est le bon moment pour réfléchir sur ce que l’on distille sur l’un ou l’autre des supports.

Quelles orientations marquantes observez-vous sur les réseaux sociaux ? 

Les universités sont toujours en retard

Le constat frappant, c’est que l’enseignement supérieur les investit toujours à rebours. Pourtant au contact d’une population avide de réseaux sociaux, les universités sont toujours en retard lorsqu’il s’agit de passer à Snapchat, TikTok ou Switch…

Des supports dont on parle beaucoup dans les médias, qui commencent à être utilisés dans les écoles de commerce, mais qui restent éloignés des stratégies de communication des établissements publics.

Un manque de cynisme qui pousserait à aller où l’audience se trouve

Les raisons sont sûrement liées à une culture : un monde imprégné par la recherche où on va se poser mille questions avant d’y aller et un manque de cynisme qui pousserait à aller où l’audience se trouve. Il y a aussi généralement trop peu d’outillage et de moyens dans ces établissements.

Les chercheurs et chercheuses sont mis en avant dans les médias en 2019. En 2020, ils ont plus que jamais la parole. Cette communication exacerbée ne risque-t-elle pas d’avoir un impact négatif (discours divergents, phénomène Raoult, etc.) ?

Un besoin d’apprendre ce qu’est un chercheur

Je ne crois pas que cela puisse être négatif. Ces critiques soulèvent la question du recul, mais aussi d’un besoin d’apprendre ce qu’est un chercheur. Le public et les médias veulent des experts qui savent tout, mais c’est le principe même de la recherche : quand on cherche, on n’est pas sûr.

Les interventions médiatiques des chercheurs ont permis de faire voir cette réalité et c’est une chose intéressante. 

Il y a cependant un travail à faire du côté des journalistes : se former, savoir contredire les chercheurs, apprendre à les solliciter, ne pas inviter toujours les mêmes habitués… Il existe un vivier d’experts impressionnant, certains ont envie d’aller devant les micros, mais ce ne sont pas forcément les bons spécialistes. 

Que peuvent tirer les établissements de cette lecture ?

Nous ne voulons pas donner de leçon et exprimons simplement notre avis. L’objectif de cette compilation d’initiatives et de tendances est de donner des choses intéressantes à voir. C’est aussi une façon de créer une forme d’alerte qui incite à s’intéresser de plus près à une question donnée.

Tout ne fonctionnera pas ou ne sera pas forcément adapté aux moyens des établissements, mais ce sont des choses à considérer, il y a peut-être des opportunités à saisir (la création d’un podcast par exemple). 

A propos de ComESR 2019

Avec 200 exemplaires vendus depuis le début de l’été, le livre reçoit un bon accueil auprès des intéressés.

« Nous avons de bons retours, dans les établissements, le livre est un support de discussion », dit Manuel Canévet.

Le public cible regroupe les chargés et directeurs de communications, mais aussi les directions d’établissements.

« C’est pour cela qu’on a fait un focus ressources humaines et communication scientifique : la communication est un levier d’action aux côtés d’autres, il faut en parler avec les dirigeants d’établissements pour qu’ils s’y intéressent », ajoute-t-il.

Les choix de Campus Matin

Zoom sur quelques coups de coeur de notre rédaction, repérés dans le #ComESR 2019.