Comment réussir sa campagne annuelle de levée de fonds ?
Par Marine Dessaux | Le | Relations extérieures
C’est le grand événement récurrent pour les fondations des établissements du supérieur : la campagne annuelle de levée de fonds permet de lever l’argent nécessaire au financement de ses divers projets. Quel type d’appel à dons privilégier ? À quoi faut-il être attentif ? Conseils pour un lancement réussi avec les exemple d’ESCP business school et d’Isae-Supaero.
À l’occasion de la 15e Conférence de fundraising pour l’ESR, le 16 mars dernier, lors d’un atelier en ligne organisé par l’Association française des fundraisers, Isabelle Ferrière, responsable communication et fonds annuel d'ESCP business school, et Laurent Juillard, directeur adjoint du développement de la Fondation Isae-Supaero, partagaient leur expertise pour réussir le démarrage d’une campagne de fonds annuel.
Qu’est-ce qu’une campagne de fonds annuel ?
Si les critères peuvent varier, Isabelle Ferrière et Laurent Juillard s’accordent sur une définition : la campagne de fonds annuel consiste en une collecte annuelle auprès de tous les donateurs à l’exception des grands donateurs et grands donateurs juniors (à la Fondation ESCP, cette catégorie concerne ceux qui donnent à partir de 10 000€ par an pendant 5 ans) ainsi que des engagés (c’est-à-dire les personnes qui privilégient le don par prélèvement automatique ou qui s’engagent sur plusieurs années ).
À titre indicatif, à la Fondation ESCP, cette collecte a permis de lever 400 000€ en 2020, auprès de 400 donateurs et 315 000 € auprès de 410 donateurs à la Fondation Isae-Supaero. Dans les deux cas, le don moyen avoisine les 500 €.
Les enjeux
« L’enjeu, c’est d’avoir plus de petits et moyens donateurs, explique Laurent Juillard. Cela permet de se faire connaître, de renouveler la base des donateurs - le taux d’attrition naturel est de 10 % - et d’envoyer envoyer les bons messages à la bonne personne au bon moment. »
Un indicateur de performance à surveiller pour juger de la réussite de l’entreprise est le taux de retour qui s’inscrit entre 1 et 3 %. « La clé de la réussite, c’est la base de données à 50 %, la qualité du message à 30 % et une période d’envoi adéquate à 20 % », estime le directeur adjoint du développement.
Ce qu’il faut prendre en compte pour bien démarrer
Gérer et maîtriser sa base de données
« La base de données c’est le nerf de la guerre », souligne Laurent Juillard. Pour qu’elle soit fructueuse, il est important de « travailler en étroite relation avec son association alumni, mettre en place une charte tripartite et croiser les données en respectant la RGPD, qui peut-être une contrainte mais aussi une opportunité de repenser la relation au donateur ».
À la Fondation ESCP, un poste à temps plein est dédié à la campagne de fonds annuel dans tous ses aspects, et notamment sur le travail de la base de données et l’envoi des mailings en interne. « Cela nous a permis de gagner du temps, d’avoir de meilleurs résultats et d’économiser un peu d’argent », rapporte Isabelle Ferrière.
Élargir et segmenter son fichier
Pour élargir le fichier des donateurs, il recommandé d’affiner les messages, de les personnaliser pour développer la confiance et améliorer la relation avec le donateur.
En effet, il est possible de « segmenter » le fichier par catégorie de donateurs (plus ou moins actif, plus ou moins jeune, etc.) et de tester des mailings adaptés. Laurent Juillard recommande de faire des tests, notamment par le biais d’emailing, sur 10 à 20 % maximum du fichier.
En outre, il est important d’identifier les projets à courts moyens termes qui s’alignent sur les besoins de l’école et des étudiants tout en répondant aux attentes des alumni.
« Le besoin de financement doit être crédible, il ne doit pas être inatteignable, indique Laurent Juillard. Le projet doit également être respectueux de l’image de marque de l’école. »
Les 3 grands types de campagne de fonds annuel
1 . L’appel à dons classique
L’appel à dons classique passe par l’envoi d’un courrier qui répond à trois objectifs :
- faire ouvrir (grâce à une bonne accroche, des éléments visuels et potentiellement des formats qui vont intriguer),
- faire lire (en étant incisif, en ajoutant un ‘postscriptum’ à la fin du message, en mettant du gras, en surlignant, en utilisant le « je »),
- et inciter à l’action (par l’intermédiaire d’un bulletin à remplir).
Une bonne lettre répond à différentes questions : « A quoi va servir le don ? Pourquoi est-il indispensable ? Pourquoi donner maintenant et pas plus tard ? Pourquoi donner à cette institution ? Pourquoi suis-je concerné ? Qu’est-ce que j’y gagne ? ».
Il est possible d’inclure, en bonus, un dépliant ou document complémentaire qui pourra notamment clarifier les aspects de fiscalité ainsi que donner quelques informations sur le leg.
Vers la fin de la sollicitation par courrier physique ?
Dans un monde de plus en plus digital, le mailing classique a-t-il été remplacé par l’envoi de courrier électronique ? Si, « le chèque tend à disparaître, selon Isabelle Ferrière, le montant de don moyen par ce moyen de paiement reste élevé ». En outre, le courrier papier laisse le choix à l’utilisateur (de l’ouverture, de le garder ou pas, de le partager). « Il a encore de l’avenir », estime la responsable communication et fonds annuel.
À la Fondation ESCP, « 10 jours après l’envoi du papier, il y a un grand volume de don. Par la suite, nous relançons par mail. Mais c’est un bon lancement pour le début de la campagne ».
2. Le projet lié à l’actualité
On l’a vu fleurir dans de nombreuses fondations récemment : le projet lié à une actualité forte ou une situation d’urgence prend tout son sens en période de Covid-19.
En réaction à la crise sanitaire, la Fondation Isae-Supaero a proposé à ses donateurs de soutenir l’innovation pédagogique « mais cela n’a pas marché, indique Laurent Juillard. Nous sommes donc revenus à un fonds de soutien des étudiants plus classique ».
3. Les projets de naming
Le naming consiste à apposer le nom du donateur sur un bâtiment, un amphithéâtre, un siège, etc. L’opération peut être liée à :
- l’actualité de l’école (c’est ce qu’a proposé la Fondation ESCP pour le bicentenaire de l’école à partir de 200 €),
- une rénovation (c’est le cas pour l’amphithéâtre Gélis à ESCP à partir de 2 500€ sur plusieurs années),
- la création d’un nouveau bâtiment (comme l’a fait, pour l’Isae-Supaero, le groupe Safran, entreprise spécialisée dans l’aéronautique, l’espace et de la défense, qui a nommé quatre espaces de l’Innovspace du nom d’ingénieurs réputés en internes).
Le naming peut être fait avec des particuliers, dont on écrit le nom ou à qui on propose de choisir un nom, ou avec des entreprises, qui veulent mettre en avant des figures illustres de leur histoire.