Vie des campus

Les mesures pour compenser le surcoût énergétique dans les établissements d’ESR

Par Marine Dessaux | Le | Stratégies

Face à l’augmentation du coût de l’énergie, les établissements d’enseignement supérieur et de la recherche alertent depuis plusieurs mois sur leurs difficultés à boucler leurs budgets. Le gouvernement a annoncé deux mesures d’accompagnement financier fin octobre, notamment un fonds de compensation de 275 millions d’euros pour l’ESR. Explications.

Le surcoût énergétique est estimé à 500 millions d’euros en 2023 par rapport à 2021 ! - © Think Smartgrids
Le surcoût énergétique est estimé à 500 millions d’euros en 2023 par rapport à 2021 ! - © Think Smartgrids

« Pas de choix postes/chauffage, ne sacrifiez pas vos investissements », martelait Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et la recherche (ESR), lors de sa première audition devant la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, le 21 septembre dernier.

Une résolution intenable sans soutien de l’État, alors que le surcoût énergétique pour les établissements en 2022 est estimé par le ministère de l’ESR à 100 millions d’euros… et 500 millions en 2023 ! C’est pourquoi la Première ministre, Élisabeth Borne, a annoncé deux dispositifs d’urgence, le 27 octobre.

Un « amortisseur » et un fonds de compensation

Pour l’année 2023, deux actions seront mises en place afin de diminuer le surcoût énergétique des institutions publiques :

  • un « amortisseur électricité », à destination des entreprises, collectivités, associations, hôpitaux, mais aussi des universités. Il consiste en une prise en charge automatique du gouvernement de la moitié des surcoûts sur la facture d’électricité au-delà de 325€ du mégawatt. « En intégrant la composante nucléaire de la facture, cette prise en charge intervient à partir de 180 € du mégawatt », précise la Première ministre. Cette mesure fait l’objet d’un amendement au projet de loi de finances (PLF) 2023.
  • un fonds de compensation pour les surcoûts énergétiques s’élevant à 275 millions d’euros. Une enveloppe prévue dans le projet de loi de finances rectificatives 2022. « Elle permettra donc aux établissements de bâtir leur budget prévisionnel pour 2023 avec plus de visibilité sur leurs moyens financiers et nous les accompagnerons aussi au cas par cas », précise Sylvie Retailleau, auditionnée par la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale sur le PLF 2023, le 2 novembre 2022.

Qui est concerné ?

Sylvie Retailleau était auditionnée à l’Assemblée nationale sur le PLF 2023, le 2 novembre. - © D.R.
Sylvie Retailleau était auditionnée à l’Assemblée nationale sur le PLF 2023, le 2 novembre. - © D.R.

Seront concernés par l’amortisseur électricité : les établissements publics d’ESR et les organismes de recherche. Le fonds de compensation bénéficiera, lui, à ces deux institutions, mais également aux Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous).

Mais à quelle hauteur ? D’ores et déjà, Sylvie Retailleau indique que « chaque établissement relevant du ministère sera accompagné en fonction de sa situation ». L’aide devrait être versée au prorata des surcoûts et prendre en compte la situation financière de chacun.

« Les montants versés tiendront compte des surcoûts réellement constatés, du poids des dépenses d’énergie dans les budgets de fonctionnement des établissements, ainsi que des réserves financières mobilisables dont disposent les établissements », explique le ministère.

Des budgets en déficit malgré ces aides

« On le sait, les prix de l’électricité resteront supérieurs à ce qu’ils étaient en 2021, ce nouveau dispositif permettra d’atténuer la hausse subie par nos établissements », assure la ministre de l’ESR.

Manuel Tunon de Lara est président de France Universités. - © D.R.
Manuel Tunon de Lara est président de France Universités. - © D.R.

En effet, il n’est pas possible de prédire le surcoût de l’énergie pour 2023. « Une enquête est en cours. Les projections sont faites à partir des engagements pris dans un certain nombre de contrats avec des prestataires. Le spectre de prestataires est assez large et tous ne sont pas passés par la direction des achats et des équipements de Bercy. On peut avoir des projections entre +50 et +500 % », exposait Manuel Tunon de Lara, président de France Universités, le 30 septembre 2022, lors de la conférence de presse de rentrée de l’association.

Malgré ces incertitudes, le MESR estime que le budget de 275 millions d’euros  « a été calibré au plus juste. Il ne serait pas responsable d’ouvrir des enveloppes financières qui pourraient s’avérer surcalibrées in fine. »

La trésorerie « dormante » devra être utilisée

Une budgétisation qui tient ainsi compte « des réserves financières parfois importantes dont disposent les établissements. Lorsque ces réserves sont gagées sur des investissements futurs, il faut les préserver ; mais lorsqu’il s’agit de trésorerie pour ainsi dire “dormante“, elles doivent être utilisées, dans des proportions raisonnables, pour absorber une partie de ces surcoûts exceptionnels », poursuit le ministère.

Il est ainsi assumé que les établissements présenteront des budgets en déficit et équilibreront ces déficits « en puisant, lorsqu’elles sont suffisantes, dans leurs réserves financières ».

Les critères sont notamment : le poids des dépenses d’énergie dans le budget de fonctionnement, la situation financière, les réserves mobilisables. Ces mêmes critères seront utilisés pour les organismes de recherche.

Un coût énergétique de la recherche important pour les universités

« L’université héberge la totalité de la recherche en France. (…) La part de consommation énergétique liée aux équipements de recherche qu’on n’arrête pas comme ça sera une charge majeure », prévient Manuel Tunon de Lara au nom de France Universités.

D’après le MESR, les organismes nationaux de recherche devraient encaisser un surcoût de 40 millions d’euros en 2022 et 200 millions d’euros en 2023, par rapport à 2021.