Vie des campus

Tour de France de la rentrée universitaire : ces campus donnent le ton !

Par Marine Dessaux, Théo Haberbusch | Le | Stratégies

L’IA dans les formation, l’impact d’un nouvel outil de pilotage de l’offre de formation, les mesures expérimentées pour l’acte 2 de l’autonomie des universités, la priorité donnée à l’expérience étudiante… et bien sûr les enjeux budgétaires, toujours pregnants. Campus Matin vous résume les défis qui marquent la rentrée universitaire de plusieurs campus.

La rentrée a été l’occasion pour les universités de partager leurs objectifs pour l’année à venir. - © France Universités / Université de Haute-Alsace
La rentrée a été l’occasion pour les universités de partager leurs objectifs pour l’année à venir. - © France Universités / Université de Haute-Alsace

Nous avons sélectionné des enjeux, portés par quatre universités, qui résonnent avec des préoccupations plus largement partagées. Tour d’horizon de leurs projets en cette rentrée universitaire 2024.

Paris 1 manque de moyens, mais intègre l’IA dans son offre de formation

Christine Neau-Leduc l’a martelé lors de sa conférence de presse de rentrée : l’Université Paris 1 qu’elle préside a besoin de moyens. Avec cette formule choc : « Nous sommes en train de gratter l’os, et après, nous atteindrons la moelle épinière, ce qui signifiera que cela sera terminé. »

Christine Neau-Leduc préside l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne depuis janvier 2021. - © Pascal Levy/Panthéon-Sorbonne
Christine Neau-Leduc préside l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne depuis janvier 2021. - © Pascal Levy/Panthéon-Sorbonne

Malgré les gels de postes et les succès aux appels à projets, l’établissement de sciences humaines et sociales dit atteindre ses limites alors que le nombre d’inscrit a progressé de 32000 en 2011 à 45000 aujourd’hui.

Cet appel à l’État n’empêche pas l’université d’innover. Le projet AISorb, lauréat de Compétences et métiers d’avenir (CMA) de France 2030, dispose de 5 millions d’euros pour intégrer l’IA dans les cursus. L’université prévoit la création d’un collège de l’IA, accessible à tous les étudiants.

« À terme, l’idée est aussi de créer des modules dans toutes nos licences, pour sensibiliser les étudiants à l’impact de l’IA sur les métiers actuels, mais aussi pour attirer leur attention sur les métiers d’avenir, notamment dans la régulation de l’IA. En philosophie, par exemple, l’éthique liée à l’IA pourrait devenir un métier d’avenir », détaille la présidente.

À l’Université de Rouen Normandie, l’outil Quadrant du MESR interroge

L’Université Rouen Normandie bénéficie déjà de son propre outil de pilotage de l’offre de formation. - © D.R.
L’Université Rouen Normandie bénéficie déjà de son propre outil de pilotage de l’offre de formation. - © D.R.

L’Université de Rouen Normandie a finalisé son contrat d’objectifs, de moyens et de performance (Comp) pendant l’été 2024. Sur le volet formation, l’outil Quadrant, développé par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (MESR), a été utilisé.

S’il reconnaît l’intérêt de la démarche en matière de pilotage de l’offre de formation, le président de l’établissement, Laurent Yon, s’interroge toutefois sur les indicateurs utilisés : « Il s’agit de ceux des cohortes de 2018. Cela veut dire que certaines formations, notamment les licences professionnelles, ont été transformées depuis. Pour d’autres, des actions ont déjà été mises en place, par exemple en licence de droit ou psychologie où le nombre d’étudiants est élevé. »

Laurent Yon est président de l’Université de Rouen Normandie. - © D.R.
Laurent Yon est président de l’Université de Rouen Normandie. - © D.R.

Il estime en outre nécessaire d’analyser les profils des étudiants : « Nous accueillons plus de bacheliers professionnels ou technologiques : cela a forcément un impact sur les taux de réussite. Quant à l’indicateur de l’insertion professionnelle, pour toutes les formations impliquées, il était au-dessus de la médiane, ce qui veut dire que les formations sont efficientes… Il faut regarder l’ensemble. »

Quadrant vient par ailleurs s’additionner à l’outil interne pour le pilotage de l’offre de formation.

« Nous avons un tableau de bord où nous regardons notamment les effectifs avec des seuils d’ouverture, votés en conseil formation et vie universitaire. Nous nous penchons sur la situation à N-1 pour décider si à la rentrée suivante, nous ouvrons ou pas, s’il faut mutualiser ou adapter le contenu et la maquette. Nous y trouvons les taux de réussite, les taux de présence, les taux d’insertion », explique-t-il.

Si « une phase de discussions avec le MESR » a été nécessaire, tout s’est tout de même bien terminé pour l’université normande, cet échange ayant « abouti à une proposition intégrée à notre Comp, permettant de le finaliser ». Une étape supplémentaire qui n’a pas non plus empêché le versement en juillet de la moitié du montant global de 4,5 millions d’euros pour 2025 et 2026.

L’initiative de rentrée : un doctobus

Dans le cadre de son nouveau service de santé étudiante, l’Université de Rouen Normandie lance un cabinet médical ambulant, destiné à accroître et réaliser des consultations de santé itinérantes.

L’université compte de plus en plus de sites distants, avec notamment l’intégration des Instituts de formation en soins infirmiers, et donc d’étudiants susceptibles de bénéficier du service de santé étudiante. « Cet équipement permettra aux personnels de santé de se déplacer sur les différents campus et sites et de proposer des consultations aux étudiants dans de meilleures conditions », souligne l’établissement.

L’Université de Haute-Alsace, pilote sur l’acte 2 de l’autonomie

L’UHA a été fondée en 1975 et s’apprête à fêter ses 50 ans. - © UHA
L’UHA a été fondée en 1975 et s’apprête à fêter ses 50 ans. - © UHA

L’Université de Haute-Alsace (UHA), qui fêtera ses 50 ans en 2025, est engagée dans trois expérimentations nationales d’envergure : la simplification de la recherche, l’utilisation d’une plateforme de financement de l’immobilier universitaire par l’emprunt avec la Banque européenne d’investissement, et l’acte 2 de l’autonomie des universités.

Pierre-Alain Muller est président de l’UHA. - © UHA/Valentine Poulain
Pierre-Alain Muller est président de l’UHA. - © UHA/Valentine Poulain

« Nous voyons cette autonomie comme la garantie des libertés académiques. Nous savons qu’il y a de grandes marges de progrès à faire en France, notamment si on regarde le scoreboard de l’Association des universités européennes. Mais en entrant dans ce chantier, nous nous sommes rendu compte que le besoin d’autonomie était parfois juste un besoin de simplification, et donc que c’était à notre main », expose Pierre-Alain Muller, le président de l’établissement basé à Mulhouse et Colmar.

Huit mesures ont été identifiées grâce à une réflexion collective. Parmi elles, des mesures RH liées au recrutement des contractuels et à la déconcentration de la gestion des enseignants de secondaire affectés dans le supérieur

Mais aussi des initiatives pour les étudiants, comme la mise en place d’une commission étudiante, de congés menstruels ou la création d’un statut de vice-président étudiant. Par ailleurs, des études de faisabilité en lien avec les projets immobiliers en cours (dont une éventuelle dévolution du patrimoine) sont envisagées.

L’initiative de rentrée : un kit d’accueil co-construit avec les étudiants

« Nos étudiants sont des acteurs clés du développement de l’université. Ainsi, ils ont participé à la mise en place d’un kit d’accueil lancé en cette rentrée qui explique aux nouveaux arrivants les services et dispositifs de l’université faits pour eux. C’est un des projets issus du budget participatif de la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) et qui correspond à une demande des étudiants », indique Pierre-Alain Muller. Il ajoute que l’UHA a financé à hauteur de 60 000 euros le budget participatif en 2024.

L’Université Côte d’Azur, un grand établissement qui place l’expérience étudiante au rang de priorité

L’Université Côte d’Azur (Unica) est le troisième établissement français à avoir obtenu le statut de « grand établissement », après être passée par la phase de l’établissement public expérimental (EPE). « Nous avons cassé tous les silos qui existaient au sein de l’université. Nous n’avons plus de facultés au sens traditionnel, mais nous sommes organisés avec des écoles universitaires de recherche », traduit Jeanick Brisswalter, son président.

Jeanick Brisswalter a été réélu pour un second mandat en janvier 2024. - © Service Communication UNS
Jeanick Brisswalter a été réélu pour un second mandat en janvier 2024. - © Service Communication UNS

La pérennisation juridique a pris la forme d’un décret paru en juillet 2024. Le nouvel ensemble comprend trois établissements-composantes conservant leur personnalité morale : l’Observatoire de la Côte d’Azur, la Villa Arson, et le Pôle national supérieur de danse Rosella Hightower. L’université est entrée dans le top 500 des principaux classements internationaux.

Ce mécano institutionnel achevé, l’établissement se concentre en cette rentrée sur la qualité de vie de ses étudiants. Un schéma directeur sur la période 2024-2028 a été élaboré après consultation avec les étudiants. La vice-présidente vie étudiante et de campus, Laëtitia Antonini-Cochin, affiche trois priorités : l’accompagnement social, l’engagement étudiant et l’offre culturelle.

Autre volet de l’« expérience étudiante » sur la Côte d’Azur, l’établissement dispose depuis 2022 d’un centre de santé à Nice, avec des antennes à Cannes et Sophia-Antipolis. Le lieu ne désemplit pas : durant l’année 2023-2024, plus de 8000 consultations ont été assurées par l’équipe médicale du centre de santé de l’université, 4500 consultations médicales, 1700 consultations de soutien psychologique et 1200 consultations action sociale. Unica souhaite désormais développer l’offre de téléconsultation.

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