Des mesures de reconnaissance et de revalorisation pour les Esas
Par Marine Dessaux, Théo Haberbusch | Le ( mis à jour le ) | Personnels et statuts
Sylvie Retailleau annonce des mesures en faveur des enseignants du secondaire affectés dans le supérieur, jeudi 7 septembre. À la veille de sa conférence de presse de rentrée et juste avant la journée de mobilisation prévue par le Collectif 384, la ministre de l’enseignement supérieur de la recherche s’exprime en exclusivité sur News Tank et sur Campus Matin.
La ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche veut donner « un cadre d’exercice rénové aux enseignants du secondaire affectés dans le supérieur (Esas) et leur offrir ainsi une meilleure reconnaissance ». Sylvie Retailleau a choisi Campus Matin et News Tank, le 7 septembre, pour dévoiler les mesures destinées à répondre à un mouvement de mobilisation inédit.
Des mesures symboliques, pratiques et financières
Aux 13 000 Esas (majoritairement agrégés et certifiés, mais aussi professeurs des écoles ou de lycées professionnels), l’ancienne présidente d’université devenue ministre réserve trois types de mesures.
Symbolique, avec la mise en place d’un référentiel d’activité pédagogique au niveau national comparable à celui des enseignants-chercheurs.
Côté pratique, elle prévoit le doublement du plafond de la prime pour responsabilité pédagogique : il passera de 96 heures équivalent TD à 192 h. « C’est une mesure de simplification et d’automatisation pour reconnaitre des tâches qu’ils ne pouvaient pas prendre au-delà du plafond », décrypte la ministre.
S’agissant du portefeuille des Esas, deux grandes décisions :
- Une reconnaissance équivalente à celles des enseignants-chercheurs lorsqu’ils exercent des fonctions de direction. Cela passera par l’attribution de la prime pour charges administratives (PCA) et sera formalisé dans les lignes directrices de gestion du ministère.
- La revalorisation de la prime d’enseignement supérieur (PES). Celle-ci était déjà prévue par paliers par la loi de programmation de la recherche (LPR). Dès l’année dernière, Sylvie Retailleau avait souhaité accélérer la hausse, ce qui s’est traduit par un passage à 2 308 € en janvier puis 2 785 € au 1er septembre. « Nous avons à présent défini une nouvelle trajectoire pour cette prime : la cible initiale était à 3 200 € en 2027, nous l’augmentons en la passant à 4 200€ en 2027 », annonce désormais la ministre.
Enfin, Sylvie Retailleau rappelle que les Esas bénéficieront de l’augmentation des possibilités de promotions annoncées par le ministère de l’éducation nationale en juin.
Pas d’intégration au Ripec
Si la ministre multiplie les gestes, c’est parce que les Esas « jouent un rôle essentiel dans l’accompagnement des étudiants, en particulier en premier cycle ». Elle poursuit :
« Ce sont des personnels à part entière du supérieur, ils ont une forte valeur ajoutée et s’investissent beaucoup. Avec les enseignants-chercheurs, ils forment des équipes pédagogiques dont la mixité est un atout. »
Pour autant, Sylvie Retailleau tient à bien distinguer les enseignants du secondaire et les universitaires. Ainsi, la ministre ne donne pas satisfaction au Collectif 384, créé en 2021 et regroupant 1500 enseignants du secondaire affectés dans le supérieur, qui souhaitait leur intégration au Ripec, le nouveau régime de primes prévu en marge de la Loi de programmation de la recherche pour les enseignants-chercheurs.
Autre élément de différenciation, la PES de 4 200 € restera inférieure à celle du Ripec (6 400 € en 2027).
Pas le même déroulé de carrière ni le même statut.
« Nous prenons des mesures de reconnaissance nationales réelles, mais il faut conserver un équilibre et raison garder, car les statuts ne sont pas les mêmes. Les enseignants-chercheurs ont tous un doctorat et souvent un post-doc ; tandis qu’en général les Esas sont agrégés et n’exercent pas de missions de recherche. L’âge moyen de recrutement des maitres de conférences est de 35 ans contre 28 ans pour les agrégés. Ils n’ont donc pas le même déroulé de carrière, le même statut », argumente Sylvie Retailleau.
Un sujet reste ouvert : l’éventuelle création d’un corps spécifique pour ces enseignants à cheval entre le monde du scolaire et de l’enseignement supérieur. La ministre n’y est pas hostile, mais évoque un « travail de fond » et, pour l’instant, l’absence de demande en ce sens de la part des organisations représentatives.
Des Esas mobilisés depuis plus de six mois
Né hors de tout cadre syndical, le Collectif 384 s’est construit autour d’un leitmotiv : obtenir des primes équivalentes à celles des enseignants-chercheurs.
Rapidement, les Esas font parler d’eux. Et pour cause, ils sont nombreux dans des composantes structurées et qui maillent le territoire : IUT, Inspé, IAE. Au niveau national, le collectif obtient d’être reçu par le cabinet de Sylvie Retailleau, mais aussi à l’Élysée par Anne Laude, conseillère éducation et ESR du président. Plusieurs syndicats (Sages, Sgen-CFDT, Unsa), et les associations comme l’Adiut et la Cdefi, se sont déclarés favorables à l’intégration des Esas au Ripec.
Le 27 juin 2023, le Collectif 384 prend une nouvelle ampleur en remportant deux sièges aux élections du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser).
« Nous avons toujours été à l’écoute de tous les acteurs, et avons également entendu le Collectif 384. Mais je n’ai pas découvert le sujet. Dès que je suis arrivée au ministère, j’ai annoncé un travail sur les Esas », dit Sylvie Retailleau dans l’entretien qu’elle nous a accordé.
Et maintenant ?
Malgré l’accélération de l’augmentation de la prime d’enseignement supérieur en juillet, la journée de mobilisation prévue pour la rentrée, le 11 septembre, avait été confirmée.
« Nous allons démontrer que nous sommes capables de mobiliser la France entière : les collègues expliqueront les tâches ou les heures complémentaires qu’ils vont arrêter. Nous sommes ouverts à d’autres actions », déclarait le président du Collectif 384, Nicolas Domergue le 30 juin dernier.
Après ces nouvelles annonces de la ministre, le mot d’ordre est maintenu, confirme le Collectif 384 dans un communiqué de presse du 8 septembre .
15 millions pour les BUT
En concertation avec France Universités et l'Assemblée des directeurs d’IUT (Adiut), la ministre annonce aussi des moyens pour accompagner la transformation des diplômes universitaire de technologie (DUT) en bachelor universitaire de technologie (BUT), prévue par la réforme de la licence professionnelle de décembre 2019.
• 14 millions d’euros iront à 38 IUT, sélectionnés selon le taux d’encadrement et la stabilité de l’équipe pédagogique interne, en particulier pour déployer la 3e année de BUT ;
• Un million d’euros est consacré à la créations de six départements , soit 560 places ouvertes, sur les sites de Châteaubriand (Université de Nantes), Dole (Université de Franche Comté), Sarcelles (CY Cergy Paris Université), Pontivy (Université Bretagne Sud) et Béziers (Université Paul Valéry).
- Consulter l’entretien intégral avec Sylvie Retailleau sur News Tank Éducation & Recherche, agence de presse spécialisée qui édite Campus Matin. (Réservé aux abonnés, demandez votre accès découverte gratuit.)