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« L’éducation doit faire partie des secteurs prioritaires de l’IA » défend Educapital

Par Isabelle Cormaty | Le | Edtechs

Le fonds d’investissement spécialisé Educapital a publié, le 16 octobre, son livre blanc intitulé “Intelligence artificielle et éducation : un enjeu de souveraineté éducative”. Il présente des cas d’usage, les opportunités et les défis liés à l’utilisation de l’IA dans l’éducation et invite les autorités à soutenir le développement de solutions éthiques, françaises ou européennes.

Educapital a présenté son livre blanc sur l’intelligence artificielle le 15 octobre. - © D.R.
Educapital a présenté son livre blanc sur l’intelligence artificielle le 15 octobre. - © D.R.

« L’éducation est un enjeu majeur pour le secteur de l’IA et inversement. Nous pensons qu’il est important de créer des champions français et européens », plaide Marie-Christine Levet, cofondatrice et présidente d’Educapital.

Pour le fonds d’investissement, « l’éducation doit faire partie des secteurs prioritaires de l’IA parce qu’elle est le pilier du développement de toutes les activités économiques de notre société. L’investissement dans des entreprises innovantes capables de porter des solutions expertes, spécialisées et répondant à des besoins réels est un enjeu de souveraineté éducative, économique et sociale. »

L’IA, une révolution des apprentissages

Créé en octobre 2017 par Marie-Christine Levet et Litzie Maarek, le premier fonds d’investissement européen spécialisé sur l’écosystème edtech a dévoilé le 16 octobre son premier livre blanc , consacré à l’enjeu de souveraineté éducative dans le secteur de l’IA.

Tuteurs virtuels pour les étudiants, génération d’exercices, analyse du niveau des élèves… les solutions d’intelligence artificielle pour le secteur du scolaire et de l’enseignement supérieur se multiplient.

« Le K12 est souvent le parent pauvre de la edtech. Mais nous avons constaté, qu’avec le supérieur, ce sont des secteurs propices à l’innovation en IA avec l’émergence de sociétés très jeunes qui couvrent tous les champs de l’éducation », explique Alexandre Glaser, capital-risqueur d’Educapital.

Quelles attentes vis-à-vis des autorités ?

Le fonds d’investissement rappelle les investissements de l’État dans le secteur de l’IA à travers le programme France 2030 porté par le Secrétariat général pour l’investissement. En mai 2024, le président de la République a ainsi annoncé la création de neuf clusters IA financés à hauteur de 360 millions d’euros.

D’autres enveloppes ont permis de développer des solutions IA adaptées à l’éducation, comme MIA Seconde, avec les partenariats d’innovation en intelligence artificielle (P2IA).

« Les programmes d’investissement d’avenir IA et éducation ont été utiles : ils ont permis d’amorcer cette transformation. Ils sont cependant insuffisants en regard des enjeux. Il s’agit maintenant de passer à l’échelle. C’est en créant les conditions d’un marché ouvert, que l’on pourra répondre effectivement aux besoins des apprenants et des enseignants », avance Educapital.

Un enjeu de souveraineté éducative à l’échelle européenne.

Marie-Christine Levet est cofondatrice et présidente du fonds d’investissement Educapital. - © Educapital
Marie-Christine Levet est cofondatrice et présidente du fonds d’investissement Educapital. - © Educapital

« À l’échelle européenne, qui est celle pertinente, le Digital Europe Programme avait alloué 2,5 milliards de dollars à l’adoption de l’IA en 2019. La nouvelle Commission européenne, qui sera constituée en 2024, devra à cet égard augmenter significativement ce montant », demande Educapital qui insiste sur l’enjeu de souveraineté éducative avec l’IA.

« Comme dans d’autres secteurs tels que la santé ou la cybersécurité, il est critique que l’Europe conserve une souveraineté, pour des raisons aussi bien économiques que politiques, face aux leaders américains et asiatiques. »

« La plupart des modèles d’IA étant fermés, c’est-à-dire que seul leur créateur a accès à leur fonctionnement, rien ne permet aux Européens de se prémunir contre des interruptions de service en cas de conflit géopolitique ou contre la manipulation des résultats pour influencer des décisions ou l’opinion publique. C’est pourquoi il est essentiel de disposer d’alternatives européennes crédibles », souligne le fonds d’investissement dans son livre blanc.

Educapital salue à ce titre l’adoption, en mars 2024 par le Parlement européen, de l’IA Act qui établit les règles concernant l’intelligence artificielle dans l’Union européenne. « Il s’agit d’un choix politique essentiel pour préserver notre souveraineté commune et nos valeurs. »

L’IA, un secteur en forte croissance économique

Dans le monde, « les analystes s’attendent à une croissance exponentielle du marché de l’IA générative, de 40 milliards de dollars en 2022 à 1300 milliards de dollars en 2032. Concernant le secteur de l’éducation, ils anticipent un marché de l’IA de près de 100 milliards de dollars », d’après Educapital.

Quels sont les besoins de formation ?

Pour généraliser l’utilisation des IA dans le domaine de l’éducation et de la formation, le fonds d’investissement identifie deux défis : la conception d’intelligences artificielles responsables et la formation.

Sur ce sujet, Educapital souhaite que soit mis en place un plan de formation « qui s’adresse à tous les âges et à toutes les étapes de la vie » et identifie quatre besoins prioritaires :

  • « former tous les enseignants à l’utilisation de l’IA afin qu’ils puissent rapidement s’en emparer et transmettre leurs connaissances à leurs élèves ;
  • former les futurs ingénieurs, concepteurs et développeurs d’IA ;
  • initier les collaborateurs dans les entreprises à l’utilisation d’IA spécialisées dans leur métier ;
  • sensibiliser les leaders d’opinion et l’ensemble de la population à la compréhension des principes de fonctionnement de l’IA ».

Educapital, un fonds avec 150 millions d’euros sous gestion

L’équipe d’Educapital compte actuellement 30 sociétés françaises et européennes dans son portefeuille, sur les différents segments de la edtech. Par le passé, elle a également réalisé deux exits en 2021 (Lalilo et Appscho).

Après avoir créé un premier fonds d’investissement doté de 47 millions d’euros lors de sa création en 2017, Educapital a réalisé en avril 2023 un closing de 150 millions d’euros pour Educapital 2, son second fonds d’investissement, ce qui fait de l’organisation le plus grand fonds européen dédié aux edtechs.