Une application open source pour réduire les délais de paiement des vacataires
Par Isabelle Cormaty | Le | Équipements et systèmes d'informations
La mensualisation des paies pour les vacataires, obligatoire depuis le 1er septembre 2022, s’avère difficile à mettre en place dans les universités. Pour simplifier les circuits administratifs, une trentaine d’établissements du supérieur utilisent une application conçue par l’Université de Caen Normandie qui simplifie la gestion et le paiement à temps des vacataires.
Recevoir une fiche de paie et un salaire tous les mois. Une douce utopie pour la plupart des vacataires de l’enseignement supérieur qui touchent souvent leur paie des mois après avoir assuré leurs cours. Depuis le 1er septembre 2022, les chargés d’enseignement vacataires et agents temporaires vacataires doivent pourtant être payés mensuellement par les établissements du supérieur.
Une mesure qui découle de la Loi de programmation de la recherche et demandée depuis 2017 par le secrétaire d’État en charge de l’ESR à l’époque, Thierry Mandon. Mais dans les faits, « les délais de paiement des vacataires excèdent souvent le mois pour de multiples raisons », pointe la Direction générale des ressources humaines (DGRH) du ministère.
Une partie des retards de paiement « résulte d’une complexité des circuits de gestion, de la multiplicité des étapes de validation du service fait ou encore des difficultés à parachever ou élaborer les contrats », précise la DGRH. Elle s’est saisie du sujet via un groupe de travail et a publié des recommandations sur la gestion des vacataires dans une circulaire datée du 4 juillet.
Fluidifier et dématérialiser le processus
Face à ce constat, l'Université de Caen Normandie a quant à elle décidé de créer une application pour simplifier et dématérialiser les circuits administratifs. Une démarche engagée bien avant la mensualisation des paies.
« Les enseignants remplissaient des fiches de service papier en utilisant Word, Excel ou des feuilles manuscrites… Rien n’était contrôlable ! Le besoin d’une application pour dématérialiser le traitement des pièces justificatives se faisait sentir. Nous avons utilisé en 2012 un outil conçu par une autre université, mais nous n’avons pas été satisfaits », retrace Bruno Bernard, directeur adjoint du système d’information de l’établissement.
En janvier 2014, l’université crée un groupe projet avec la direction des ressources humaines (DRH), celle du système d’information, des composantes et des gestionnaires de scolarité. Après plusieurs mois de développement et de tests, l’application open source OSE (Organisation des services d’enseignement) voit le jour. L’outil permet notamment d’éditer des contrats de vacation, de calculer et de mettre en paiement les heures des vacataires. Elle concerne aussi les enseignants et les enseignants-chercheurs.
Une application ergonomique
« Nous avons beaucoup travaillé sur l’ergonomie, la facilité d’utilisation de l’application et la lisibilité de l’offre de formation, se souvient Bruno Bernard. Nous ne voulions pas demander aux enseignants de saisir à nouveau des informations déjà transmises à nos services. Nous connectons différents logiciels à OSE. »
Pour Radia Rezki-Malek, la DRH adjointe de l’établissement qui a suivi le projet depuis son lancement en 2014, les enseignants-chercheurs et vacataires peuvent suivre l’état de la procédure administrative.
« Les enseignants ont de la visibilité sur l’ensemble de leur dossier. Ils savent si leurs heures ont été validées par tel service, quand leurs heures complémentaires seront payées et ils peuvent reporter d’une année sur l’autre leur service », détaille-t-elle.
Un pilotage plus efficace de l’établissement
Outre la simplification des procédures pour les enseignants et des délais de paiement plus courts, l’Université caennaise a pu grâce à l’application « dégager un équivalent temps plein pour faire du pilotage et produire des indicateurs. L’utilisation d’OSE a coïncidé avec la création d’un pôle pilotage au sein de la DRH », explique Radia Rezki-Malek.
« Lorsque nous utilisions des dossiers papier pour gérer les enseignants permanents et les vacataires, la vérification était très compliquée, tant à l’échelle des composantes qu’au niveau central. Les composantes peuvent maintenant contrôler l’ensemble de leur offre de formation, suivre de manière efficiente le paiement des heures dans leur budget. L’application permet d’effectuer un réel suivi des heures complémentaires », souligne la DRH adjointe.
Finis donc les services d’enseignement validés sur la bonne foi des professeurs ! À cela s’ajoute une fiabilisation juridique des procédures. « Les vacataires assurent leurs heures d’enseignement en ayant un contrat, ce qui n’était pas le cas avant », complète Bruno Bernard.
Une application utilisée par 34 autres établissements
« En 2017, le DRH de l’Université de Caen Normandie a évoqué l’application OSE lors d’une réunion de l’association Sup’DRH. Cela a suscité de nombreuses interrogations et demandes de la part des autres établissements. Nous avons organisé une journée de présentation de l’application en 2018 et en parallèle, nous avons lancé une nouvelle phase », raconte Bruno Bernard.
À ce jour, 34 établissements du supérieur utilisent l’application OSE, comme les universités Paris Cité, Côte d’Azur ou encore celle de Rennes 1. En moyenne, six à sept institutions supplémentaires adoptent ce logiciel chaque année.
Une feuille de route annuelle définie par les utilisateurs
Si l’application en open source est gratuite, l’Université de Caen Normandie accompagne sur la durée les établissements qui souhaitent mettre en place le logiciel. Pour cela, elle demande une participation de 5000€ par an hors taxe.
« Avant d’utiliser l’application, il y a un long de travail de paramétrage pendant environ un an pour la connecter aux autres logiciels de l’établissement. Nous réalisons aussi en amont la personnalisation de l’application, OSE permet aux établissements de s’organiser comme ils le souhaitent », assure le DSI adjoint.
L’Université de Caen Normandie organise par ailleurs une réunion annuelle de priorisation des tâches avec les établissements utilisateurs pour faire remonter les besoins et proposer des améliorations. L’interopérabilité avec le logiciel Pégase et la gestion des contrats étudiants font ainsi partie des deux chantiers prioritaires des développeurs cette année.
Gestion des vacataires : les préconisations de la DGRH
Outre l’application OSE citée en exemple, la DGRH formule dans sa circulaire plusieurs préconisations aux établissements pour améliorer la gestion de leurs vacataires :
• Planifier la campagne de recrutement des vacataires afin de l’inscrire dans le plan de charge des gestionnaires.
• Établir un contrat pour les agents qui ont vocation à intervenir de manière régulière.
• Limiter les dossiers de recrutement aux seules pièces justificatives obligatoires.
• Débuter les vacations qu’une fois le contrat établi et signé.
• Simplifier la validation du service fait par un tableau informatique permettant la validation des heures par le référent de proximité.
• Procéder à la mensualisation du paiement des vacations sur la base d’un état prévisionnel des heures précisées dans le contrat.