Résidences étudiantes : les tendances d’aujourd’hui, les réponses pour demain
Par Marine Dessaux | Le | Relations extérieures
Que pensent les étudiants de leurs logements actuels ? Où sont les points d’améliorations ? Et surtout : quelle place pour la transition écologique ? À l’occasion des Rendez-vous du logement étudiant 2022, le 30 novembre, deux partenaires majeurs des résidences étudiantes ont partagé les résultats de leurs enquêtes.
Depuis la crise sanitaire, les étudiants travaillent de plus en plus dans leur chambre et leur consommation de données sur internet explose, malgré une sensibilité marquée à la transition écologique.
Des constats tirés de deux études présentées lors des Rendez-vous du logement étudiant 2022 qui se tenaient à l’Université Paris-Dauphine le 30 novembre. Les professionnels du logement étudiant cherchent donc les réponses pour imaginer les résidences de demain.
Des étudiants qui passent beaucoup de temps en résidence
Les habitudes prises pendant la crise Covid se sont ancrées et les étudiants passent beaucoup de temps dans leur résidence, révèle l’étude du cabinet Occurrence pour l’Association interprofessionnelle des résidences étudiants et services (Aires). Menée du 20 octobre au 15 novembre 2022, elle repose sur 5 000 réponses et en résidences gérées.
Hors sommeil et vacances, les répondants estiment être chez eux plus de 5 heures pour 46 % d’entre eux et 2 heures à 5 heures par jour pour 48 %. « Ce qui pose la question du confort des étudiants dans leur chambre », souligne Pierre Chavonnet, directeur du pôle marques et transformation d’Occurrence. Quid de l’espace de vie, à l’heure où les chambres des Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) les plus petites mesurent seulement neuf mètres carrés ?
Espaces de travail collectif : à développer ou non ?
Les résidences gérées par le réseau de l’Association interprofessionnelle des résidences étudiants et services (Aires) s’avèrent riches en services… qui ne sont pas forcément utilisés. En effet, 61 % des répondants connaissent les espaces collectifs et y vont, 27 % ne s’y rendent pas. Ces lieux ne sont par ailleurs pas plébiscités (seuls 5 % des étudiants les considèrent comme un atout).
Une information à corréler avec une donnée observée par Wifirst, premier fournisseur de wifi dans les résidences étudiantes, dans une enquête publiée en 2021 : 72 % des répondants déclarent que leur lieu préféré pour étudier est la chambre au sein de leur résidence, contre seulement 15 % pour la bibliothèque universitaire.
Ce qui laisse peu de place pour les espaces de travail collectif dans les résidences. Alors concept à développer ou à mettre de côté au profit d’espaces de détente ? C’est une question à creuser, pour Amette Dieye, directeur des résidences étudiantes Twenty Campus.
« Ce qui serait intéressant pour les exploitants que nous sommes et qui pourrait nous aider à concevoir les résidences serait de connaître, dans l’usage de ces salles communes, la répartition divertissement/travail. Au début de la crise Covid, les résidences n’étaient pas prêtes à accueillir le distanciel et beaucoup d’étudiants ont dit en avoir besoin. Mais, avant cela, nous n’avions pas l’impression que ces lieux étaient utilisés pour du travail universitaire, plutôt pour du divertissement. »
Des usages numériques qui explosent
Wifirst a interrogé 3 586 étudiants français âgés de 18 à 25 ans logés dans 242 résidences publiques Crous et 261 résidences privées sur la place d’internet à l’heure de la crise sanitaire.
Dans ses installations, la société qui a notamment remporté l’appel d’offres national du Cnous de 2019, a prévu une évolution dans la consommation de données. Elle ne s’attendait pour autant pas à ce que les choses aillent à une telle vitesse : en seulement quatre ans, de 2018 à 2022, le trafic moyen par étudiant est multiplié par trois, allant de 62 Go à 185 Go chaque mois.
« La crise sanitaire a boosté l’usage du wifi et de la bande passante, et cela continue », observe Étienne Détrie, directeur marketing de Wifirst.
72 % des répondants disent utiliser internet au moins 6 heures par jour. Ils passent plus de la moitié de ce temps sur Google, Netflix, Facebook, Amazon et Twitch (61 %).
Des géants déjà présents en 2018. Dès lors, comment expliquer l’augmentation de la consommation de données ?
Plusieurs pistes : les réseaux sociaux sont devenus des plateformes vidéo - or c’est le streaming qui consomme le plus -, l’usage de la visioconférence a également explosé notamment pour l’enseignement en distanciel et enfin, plus anecdotique, « de plus en plus de vignettes vidéo s’affichent lors de la lecture d’articles en ligne », remarque Étienne Détrie. Une partie non sollicitée qui est synonyme d’impact carbone inutile.
Un engagement et besoin de pédagogie en matière de transition écologique
C’est une demande des étudiants communes aux enquêtes de Wifirst et Occurrence : s’investir pour la transition écologique. En effet, dans la première, ils sont deux sur trois à être prêts à réduire leur consommation numérique en faveur de la transition écologique et, dans la deuxième, ils sont 84 % à déclarer s’engager à titre personnel.
Un sujet qui nécessite une véritable transformation des usages que les étudiants répondants voudraient voir porter par les institutions et entreprises. Dans l’enquête Occurrence, ils sont 88 % à indiquer qu’il est important que leur résidence s’engage dans une stratégie écologique. Et dans celle de Wifirst, 93 % estiment que le numérique responsable doit être porté par les professionnels.
Bien que sensibles à l’avenir de la planète, les étudiants n’arrivent pas à réduire leur impact, notamment numérique. La faute à quoi ? Pour 62 %, c’est le manque d’information, 43 % le manque d’alternative et 23 % le manque d’envie.
1 Go de 4G consomme dix fois plus d’énergie que 1 Go de wifi
Faire de la pédagogie s’avère donc indispensable. « 84 % des répondants préfèrent le wifi à la 4G pour préserver leur forfait (69 %) et seulement 13 % font ce choix pour réduire l’impact sur l’environnement. En moyenne pourtant, un 1 Go de 4G consomme dix fois plus d’énergie que 1 Go de wifi », illustre Étienne Détrie. Une information que les étudiants ne détiennent pas toujours.
Qui doit faire le premier pas ?
C’est la question à laquelle tente de répondre le directeur marketing de Wifirst.
- Les fournisseurs de contenus et équipementiers, en créant des réseaux pensés pour durer aussi longtemps que possible. Ou encore en optant pour une solution d’infrastructure collective qui permette de passer outre la box individuelle dans chaque logement, une économie de matériel et de budget (-1€ par mois par logement).
- Et les utilisateurs. « Pas forcément en se déconnectant, mais en intégrant plusieurs bonnes pratiques : ne pas surstocker des images en ligne, allonger la durée de vie des équipements, favoriser la seconde main, etc. », liste Étienne Détrie.
La question des attentes en matière de résidence étudiante n’a pas fini d’être au cœur des interrogations alors que les Crous et les Observatoires territoriaux du logement étudiant estiment un besoin prévisionnel de 45 000 logements étudiants à vocation sociale, dans les cinq prochaines années.