Mieux connus, mieux reconnus, les dircab s’installent à l’université
Par Théo Haberbusch | Le | Personnels et statuts
Les directeurs et directrices de cabinet sont mieux connus et reconnus dans les établissements. En cet été 2021, une étude met en lumière les évolutions de la fonction et la professionnalisation des titulaires du poste. Qui bénéficient aussi depuis peu du référentiel métier qu’ils ont tant attendu.
« On a d’abord été reconnus par l’externe, avant de l’être en interne. » Le directeur de cabinet d’université qui s’exprime résume l’évolution de la fonction ces dernières années. L’existence de cabinets auprès de la présidence des universités n’est pas nouvelle, une quinzaine d’établissements s’en étant dotés, il y a maintenant plus de 15 ans. Mais le rôle du ou de la « dircab » était mal défini et mal compris, surtout en interne.
L’évolution s’est faite par étapes, et parfois par à-coup. Jalon important en 2014, un petit groupe emmené par Serge Defois, directeur de cabinet à l’Université de Nantes, créé l’association DircabESR - elle compte une quarantaine d’adhérents après sept ans. En 2016, celle-ci se fait remarquer en publiant un « référentiel métiers et compétences », qui entend définir les contours de cette profession. Une mise en avant qui génère alors des tensions avec les directeurs généraux des services, les patrons (et patronnes) de l’administration ne voyant pas toujours d’un bon œil l’émergence des dircab auprès des présidences.
La fonction s’affirme
Le sujet de la définition et de la reconnaissance nationale et interne avance à bas bruit, mais sur le terrain, le mouvement est clair : la fonction s’affirme. En effet, sur 74 universités, 61 ont désormais un cabinet, contre 55 en 2017. C’est ce que constate une étude de l’agence Campus Com, dévoilée en ce début d’été, lors des retrouvailles des dircab en présentiel à l’Université de Reims Champagne-Ardenne.
La professionnalisation des dircab est aussi relevée par différents indicateurs : ils et elles sont 71 % à posséder un Bac+5 et plus (63 % en 2017) ; ils sont plus âgés qu’en 2017 (29 % ont 51 ans et plus, contre 22 % en 2017) ; le salaire mensuel moyen est plus élevé qu’en 2017 (+18 %).
Qu’ils soient fonctionnaires ou contractuels, il s’agit de cadres supérieurs dans l’organigramme universitaire : 62 % des directeurs de cabinet sont en catégorie A+, les autres en catégorie A.
Les missions principales listées par les répondants de l’étude sont l’appui à l’équipe présidentielle, la mise en cohérence de la stratégie, les relations extérieures, et la coordination entre l’équipe présidentielle et l’administration.
Un rôle pivot qui s’accompagne dorénavant d’une reconnaissance, puisque 75 % des dircab déclarent que les différentes composantes de l’établissement comprennent le rôle du cabinet. Et la moitié des interrogés indiquent aujourd’hui ne pas souhaiter de reconnaissance supplémentaire.
L’aboutissement d’un référentiel métier
Reconnaissance locale donc, mais aussi désormais nationale. La boucle est bouclée avec la volonté initiale de l’association DircabESR, puisque c’est aussi en 2021 que les directeurs de cabinet ont obtenu la publication de « leur » référentiel métier.
Un travail de longue haleine conduit avec la Conférence des présidents d’université (CPU) et validé par le ministère. La Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (Cdefi) et l’Association des directeurs généraux des services (ADGS) ont également eu leur mot à dire.
« Il a fallu confronter les pratiques, discuter, se rencontrer. Cela a pris un peu de temps, car il fallait aussi que les dircab se découvrent. Cela a donc exigé une grosse année de réflexion, à partir du moment où le lien a été noué avec la CPU », retrace Mélanie Duclos, dircab à l’Université d’Évry et qui vient de céder son fauteuil de présidente de DircabESR à sa collègue Sandra Vié (Université Gustave Eiffel).
Le document rappelle le rôle « éminemment politique » du dircab et le caractère précaire de la fonction. Très proche du président, l’intéressé est soumis aux aléas politiques. Ce que confirme l’étude de Campus Com : en 2020, année de renouvellement des gouvernances dans la majorité des universités, 64 % des dircab indiquent que le titulaire du poste a changé dans leur établissement (soit 35 cas).
S’exprimant en visioconférence lors de la réunion des dircab à Reims, Guillaume Gellé, vice-président de la CPU, délivre un message de confiance :
« Dans le contexte de renouvellement de beaucoup d’exécutifs universitaires et grâce au référentiel, je souhaite que les nouveaux présidents voient l’importance d’avoir un directeur de cabinet à leurs côtés. »
Car, malgré les progrès enregistrés, « une bonne dizaine d’universités n’ont pas encore de cabinet », relève Édouard Gassin, directeur de Campus Com. Dans ce cas de figure, le consultant indique « avoir eu des retours de collectivités disant qu’elles parlent directement au président de l’université », ce qui « ne donne pas une image très structurée de l’établissement ».
Constituer des équipes de conseillers techniques ?
Pour la majorité des établissements qui ont franchi le pas et disposent d’un dircab bien installé, c’est la question de la prochaine étape qui est posée. Si certains sont réticents à augmenter la voilure des cabinets de peur que cela soit critiqué en interne, la comparaison avec les collectivités revient régulièrement, avec l’idée de structurer une véritable équipe de conseillers techniques, capables d’épauler les vice-présidents et présidentes dans le montage de dossiers en réponse à des appels à projets notamment.
« La mémoire de l’établissement passe par les cabinets. Il y a donc un enjeu à ce que les établissements constituent de véritables équipes », résume une dircab.