Doctorants et chercheurs : une retraite pour mieux écrire et publier
Réunir doctorants et enseignants-chercheurs dans un cadre qui favorise la rédaction d’un article scientifique : c’est l’objectif de la retraite organisée à l’Université Bourgogne Europe, en décembre dernier. Cet événement a permis de former les doctorants et chercheurs de divers champs disciplinaires à la rédaction académique en sciences de l’éducation.
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C’est une pratique répandue au Québec, notamment pour former les doctorants : la retraite d’écriture scientifique permet de couper toutes les distractions extérieures pour mieux se concentrer sur l’écriture d’un article académique.
L’Association pour le développement des méthodologies d’évaluation en éducation (ADMEE) Europe, en collaboration avec l’Institut de recherche sur l’éducation (Iredu) de l’Université Bourgogne Europe, a organisé sa deuxième retraite les 4 et 5 décembre 2024, accueillant une trentaine d’universitaires de toute la France : doctorants, en majorité, et enseignants-chercheurs. Tous ont rédigé un article en sciences de l’éducation, un moyen de partager les dispositifs mis en place dans le cadre de leurs enseignements.
L’une des organisatrices, Cathy Perret, ingénieure de recherche en en sciences de l’éducation et de la formation à l’Université Bourgogne Europe, raconte cette expérience.
En quoi cela consiste une retraite d’écriture scientifique ?
Cathy Perret : L’objectif est de favoriser la rédaction d’un article en sciences de l’éducation tout en vivant une expérience plaisante et en ayant des moments structurés de socialisation autour de la rédaction. Nous transmettons aussi des outils et des informations sur les méthodes de rédaction, la manière de publier et les supports de publication existants.

À l’international, notamment au Québec, il existe des retraites d’écriture scientifique structurées. Elles s’adressent aux doctorants mais aussi aux chercheurs. L’idée est d’écrire sans perturbation : pas de cours, pas de mails, pas d’administratif.
En France, les associations qui invitent des doctorants pour écrire ensemble, Taisez-vous et Parenthèse, ont aussi été des inspirations.
La retraite a regroupé deux publics : des doctorants en sciences de l’éducation et des responsables de projets pédagogiques de différentes universités françaises. Environ 60 % des participants étaient des doctorants.
Nous accompagnons ces jeunes chercheurs qui ont une nécessité de publication pour lancer leur carrière académique, quel que soit leur laboratoire de rattachement, à l’échelle nationale.
Qui organisait cet événement ?
Nous étions trois à l’organisation de ces journées, tous membres de l’ADMEE Europe. Elisabeth Issaieva, maîtresse de conférences à l’Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation inclusive et Alban Roblez, maître de conférences à l’École des sciences de la société de l’Université catholique de Lille, sont également représentants de la section française de l’association. De mon côté, j’avais aussi une casquette de rédactrice en cheffe de revue scientifique. L’activité est gratuite et nous intervenons en tant que bénévoles.
Quels soutiens financiers ?
Les frais de déplacement des animateurs de la retraite académique ont été pris en charge par le laboratoire Iredu, qui s’est également occupé de l’organisation logistique.
Cet événement a également été soutenu par le programme « Réussir innover transformer mobiliser en Bourgogne-Franche-Comté » (RITM-BFC) retenu par l’appel à projets Nouveaux cursus à l’université dans le cadre du Plan d’investissement d’avenir (PIA 3), remporté par la communauté d’universités et établissements (Comue) Université Bourgogne Franche-Comté en 2018.
Cette retraite d’écriture permet d’aider les acteurs de RITM-BFC à produire un article dans un champ disciplinaire qui n’est pas forcément le leur. Ce type de valorisation permet une diffusion et une reconnaissance des actions menées au-delà de l’équipe pédagogique de notre région.
Pour eux, cette initiative est consolidée par un accompagnement personnalisé durant toute l’année 2025 et une résidence d’été dédiée à l’écriture offrant un cadre structuré pour être efficace.
Concrètement, comme s’est déroulée la retraite de rédaction ?
Elle s’est tenue dans la bibliothèque universitaire Cortex, à l’Université Bourgogne Europe, offrant de multiples espaces collaboratifs. Les participants avaient été invités à réfléchir en amont à leur projet d’écriture à l’aide d’un questionnaire préparatoire.
Nous avons alterné entre des sessions méthodologiques et des temps de rédaction. Nous avons notamment abordé les types de revues scientifiques, leurs enjeux, les processus de publication et de relecture, les revues prédatrices, la valorisation académique et scientifique. Pour les temps de rédaction, nous avons utilisé la méthode Pomodoro : 50 minutes d’écriture, 10 minutes de pause.
Nous avons également proposé des entretiens individuels pour accompagner les participants dans la structuration de leurs articles. Nous étions donc trois chercheurs, avec des ancrages théoriques différents, pour aider à débloquer ceux qui en avaient besoin.
Quelle évolution entre la première et deuxième édition ?
La première édition de cette retraite d’écriture pédagogique a eu lieu en décembre 2022. « Nous avions une quinzaine de doctorants. Cela nous convenait bien pour tester un module expérimental. Pour la deuxième édition, nous avions une quarantaine inscrits. Nous sommes désormais parvenus à un modèle plus construit », indique Cathy Perret.
Quels avantages et limites de ce dispositif ?
Nous avons bien rodé notre organisation et les retours sont unanimement positifs. Nous prévoyons pour une prochaine édition une activité de socialisation en soirée.
Une limite : nous avons ouvert les inscriptions en septembre et rapidement atteint les 50 inscrits — le nombre maximum. Mais finalement, plusieurs personnes se sont désistées sans prévenir. Peut-être qu’une participation financière, même symbolique, les engagerait davantage ? Ce n’est cependant pas dans la philosophie de notre association.
Quelques participants ne sont venus que pour une journée ou une journée et demie, et ont été frustrés de ne pas pouvoir aller au bout du processus.
À quand la prochaine édition ?
Nous n’avons pas encore de date précise en tête pour une prochaine édition. Mais, d’ici juin, nous allons formaliser notre méthode dans un guide afin que d’autres puissent s’en inspirer.
Si nous reconduisons l’événement, ce sera toujours centré sur les sciences de l’éducation. Ce modèle peut se décliner sur d’autres thèmes de recherche, mais il faudrait des encadrants avec les spécialités nécessaires. Nous avons une connaissance des enjeux et du milieu des sciences de l’éducation nous ce qui nous permet de répondre aux questions très spécifiques des doctorants dans ce domaine.
Trois conseils pour organiser une retraite d’écriture scientifique
1. Avoir vraiment envie de le faire, de transmettre et d’expliquer des différentes dimensions concernant l’écriture scientifique qui restent souvent implicites.
2. Prendre le temps d’expliquer les différences entre les types de publications et les attentes académiques.
3. Répondre aux questions de légitimité des doctorants. « L’an dernier, un participant était complètement bloqué dans son écriture. Il ne faut pas chercher à écrire parfaitement du premier coup, mais d’abord avancer et structurer sa pensée. L’important est de débloquer les jeunes collègues », explique Cathy Perret.