Se former à la edtech : oui, mais comment ?
Par Nicolas Chalon | Le | Edtechs
Beaucoup ont découvert l’enseignement digital par l’expérience, les échanges et l’autoformation. Devenir expert edtech ou ingénieur pédagogique suppose encore l’acquisition de connaissances académiques, comme de méthodes. Des formations dédiées ont fleuri pour passer ce cap.
Ils sont conseillers pédagogiques au lycée, au collège, à l’université ; formateurs en entreprise, consultants, professeurs de yoga… Tous ont ressenti le besoin de suivre une formation pour aller plus loin dans l’usage du numérique.
« Après la crise Covid-19, beaucoup nous ont demandé d’intervenir », se souvient Pierre-André Caron, directeur du département sciences de l’éducation et de la formation de l’Université de Lille, qui pilote le diplôme universitaire (DU) Numefa, dont la vocation est d’accompagner la professionnalisation dans le domaine de l’enseignement par le numérique.
« La plupart des participants utilisent déjà des outils. Il s’agit de leur faire prendre conscience de leurs nouvelles compétences, et adopter une posture réflexive sur leurs usages. Nous entrons par le métier vers la formation, et non l’inverse », précise Pierre-André Caron.
Rejoindre la grande famille des ingénieurs pédagogiques
Il s’agit aussi de travailler en communauté, se forger un réseau de partage des pratiques. Quel que soit leur domaine d’exercice, ils construisent ici « une nouvelle identité professionnelle », combinant leur propre métier et cette nouvelle fonction de spécialiste edtech.
Un pied dans deux mondes.
« Je compare cela à la formation des cordistes, qui travaillent dans des activités très différentes. Dès lors qu’ils se forment, ils ont un pied dans deux mondes, celle de leur profession et la grande famille des cordistes. »
La nouvelle famille s’appelle ici ingénieurs pédagogiques et spécialistes des outils d’apprentissage numériques. Le DU Numefa, qui dure sept mois, est délivré entièrement à distance. Il vient de lancer, en octobre, une option edtech, plutôt dédiée aux projets de création de start-up dans le secteur.
Hub de disciplines
Une formation aux edtechs est par nature protéiforme. Le domaine se positionne au carrefour de multiples savoirs, touchant à l’informatique autant qu’aux sciences sociales.
Périmètre difficile à tracer et même à nommer, à en juger par la grande diversité des intitulés de programmes de formation : master of science « smart edtech » à l’Université Côte d’Azur, master « dispositifs numériques éducatifs » à celle de Bordeaux, master « humanités numériques » à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3, etc.
De son côté, Sorbonne Université a placé son parcours edtech au sein du master « management de l’innovation ». « Celui-ci répond aux besoins d’un double public. Les enseignants, souvent de collège ou de lycée, et des collaborateurs en entreprise ou en école, qui se sont autoformés sur les pédagogies numériques », explique Vanda Luengo, responsable de ce parcours partagé entre pratique — beaucoup de projets personnels et collectifs tutorés — et une solide assise académique.
« Devenir un chef de projet capable de parler le langage de chacun »
Durant ce master 2, les étudiants se frotteront tour à tour à la conception et scénarisation d’environnements d’apprentissage (serious games, agents conversationnels, robotique pédagogique).
Ils creuseront ensuite les approches cognitives (neuropédagogie et neurosciences), puis la collecte et analyse de données éducationnelle (educational data mining, learning analytics), les différents modèles d’IA, ou encore les méthodes de modélisation des apprenants (feedback des apprenants, scénarisation adaptive). Vaste programme.
« Il ne s’agit pas d’être expert en tout, mais de devenir un chef de projet capable de parler le langage de chacun, informaticiens comme scientifiques ou enseignant », tempère Vanda Luengo.
Les étudiants de ce M2 auront ainsi toutes les cartes en main pour se diriger vers le métier d’ingénieur pédagogique, chef de projet e-learning en entreprise ou dans l’enseignement, voire rejoindre l’écosystème des edtechs elles-mêmes. Sans jamais oublier de rester en veille, tant le rythme d’innovation en la matière est soutenu. « Les outils changent, mais les grandes lignes, le socle théorique et les mécanismes d’apprentissage demeurent », rassure Vanda Luengo.
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