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Formation des ingénieurs pédagogiques : « Le plus important est l’échange permanent avec les pairs »

Par Nicolas Chalon | Le | Pédagogie

Se former à un métier encore récent relève beaucoup des échanges entre pairs et d’une grande curiosité. Rencontre avec un ingénieur de formation qui a croisé, voilà quelques années, le chemin de l’enseignement.

« Le plus important est l’échange permanent avec les pairs », estime Guilain Praseuth. - © TBS Education
« Le plus important est l’échange permanent avec les pairs », estime Guilain Praseuth. - © TBS Education

Diplômé d’une école d’ingénieurs, il ne se prédestinait pas à l’innovation pédagogique, est pourtant… Guilain Praseuth, responsable de projets innovation pédagogique de l’école de commerce toulousaine TBS Éducation, raconte comment il est « tombé » dans le monde de l’enseignement et de la formation.

Comment vous êtes-vous intéressé au métier d’ingénieur pédagogique ? 

Guilain Praseuth est responsable de projets innovation pédagogique de l’école de commerce TBS Education. - © D.R.
Guilain Praseuth est responsable de projets innovation pédagogique de l’école de commerce TBS Education. - © D.R.

Guilain Praseuth : Mon cheminement s’est fait au fil des ans. Diplômé d’une école d’ingénieurs, IMT Nord Europe, je ne me dirigeais pas du tout vers le monde de l’enseignement. J’ai commencé ma carrière en tant qu’ingénieur qualité, fonction qui m’a amené à travailler à Madagascar.

C’est là que j’ai eu le déclic sur l’enjeu essentiel que représentent l’éducation et de la formation. Je me suis engagé auprès d’une organisation non gouvernementale locale qui œuvrait à l’insertion professionnelle des jeunes.

En 2015, j’ai pris la direction du Cambodge, toujours pour travailler sur le sujet de la formation. Avant de revenir à Paris pour intégrer une start-up edtech, Lemon Learning, en tant qu’ingénieur pédagogique. À TBS Éducation depuis 2017, je pilote aujourd’hui une équipe de quatre ingénieurs pédagogiques. 

Les ingénieurs pédagogiques ont-ils tous des parcours similaires ? 

Non, car le métier a évolué. Il s’appuie désormais sur des formations dédiées, comme des masters (à l’Inspé Toulouse, par exemple), ou même des plateformes comme Openclassrooms. Le métier d’ingénieur pédagogique est mieux connu et attire beaucoup de personnes en reconversion professionnelle. Il est intéressant pour nous de réunir des profils issus de parcours différents. 

L’apparition de nouveaux outils suppose de se former en permanence. Comment procédez-vous ?

Confronter son expérience à celle des autres.

Je me forme au quotidien, d’abord en confrontant mon expérience à celle des autres. Je lis beaucoup, et j’ai aussi écrit un livre dédié à la notion d’Apprendre à apprendre (éditions Dunod, juin 2023), car, à un certain stade, j’ai ressenti le besoin de mettre des mots sur toute cette expérience pour mieux la décrypter. Se former passe aussi par la participation à des ateliers sur ces thématiques, et mieux encore en les construisant.

Le plus important est sans doute l’échange permanent avec nos pairs. Je participe à plusieurs réseaux, à différentes échelles : le LearningLab Network, l’écosystème des écoles de commerce, EdTech France ou encore le cercle Apprendre ensemble (APE). 

Votre métier se situe au carrefour de la technologie, des neurosciences, des sciences de l’éducation… Faut-il tout maîtriser ? 

Sans devenir expert, il faut avoir une curiosité très protéiforme et aimer se plonger dans les disciplines que vous mentionnez. Cela se fait d’abord en fonction des besoins de chaque projet que vous menez.

Dans l’ensemble, les ingénieurs pédagogiques ont cette spécificité de marcher sur deux jambes : les usages pédagogiques basés sur les outils et l’IA d’un côté, la pédagogie vue de manière sociétale et basée sur l’intelligence collective, de l’autre. À nous de faire en sorte que ce ne soit pas un grand écart, et que les deux avancent dans la même direction. 

Comment votre fonction est-elle perçue par le corps professoral ? 

Un compagnon de l’enseignant.

Si vous demandez à dix professeurs comment ils définiraient un ingénieur pédagogique, vous obtiendrez dix réponses différentes. Tous auront raison, car chaque enseignant attend de nous des réponses à ses besoins spécifiques. L’ingénieur pédagogique se pose en compagnon de l’enseignant, en lui proposant un voyage créatif le plus stimulant et agréable possible.

Plus largement, au sein d’un groupe comme TBS Éducation, l’ingénieur pédagogique amène du liant; il est une passerelle entre les services et les disciplines. L’un de nos rôles est de créer le plus de combinaisons possibles pour faire émerger de nouvelles idées.