Point de vue : pour les enseignants aussi, les bibliothèques ont de la ressource
Par La Rédaction | Le | Pédagogie
Les bibliothèques universitaires ne s’adressent pas qu’aux étudiants. Elles proposent également de nombreuses ressources pour accompagner le travail pédagogique de l’enseignant. Ateliers de formations, espaces, ouvrages numériques… Dominique Aussant, chargé d’étude au département de la diffusion des connaissances et de la documentation du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, fait l’inventaire des possibilités et des enjeux.
Les bibliothèques universitaires ont pour mission de soutenir l’enseignement supérieur et la recherche. Elles offrent ainsi des services à trois publics : les étudiants, les enseignants et les chercheurs. Tous les étudiants connaissent la bibliothèque de leur université, et les chercheurs, même s’ils n’en ont pas tous conscience, utilisent tous l’accès aux publications scientifiques que leur offre leur établissement, qui est généralement géré par la bibliothèque.
Mais comment les bibliothèques universitaires (BU) soutiennent-elles les enseignants ? Et avec quels résultats ? Éléments de réponse avec Dominique Aussant, chargé d’étude au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Des possibilités de collaboration enseignant-bibliothécaire plurielles
Co-construction d’ateliers de méthodologie
Animés par des bibliothécaires formateurs, les ateliers de formation visent les compétences informationnelles des étudiants. Il s’agit d’apprendre à trouver, repérer, la bonne information, le bon document… C’est une manière indirecte de soutenir les enseignants en participant au développement des compétences informationnelles de leurs étudiants. Les ateliers sont d’ailleurs parfois co-construits par un binôme enseignant-bibliothécaire, de manière à s’adapter à la discipline et au niveau d’études.
Les compétences informationnelles sont donc un levier de collaboration entre les enseignants et la bibliothèque, même si cela prend rarement la forme d’une structure institutionnelle et reste le plus souvent à l’échelle des relations interpersonnelles.
Des espaces qui permettent des modalités d’enseignement variées
Autre point de croisement entre l’enseignement et la bibliothèque : les aménagements de type « learning centers », ces bibliothèques 2.0 dont nous vous parlions récemment. On y trouve de nouveaux espaces, souvent modulables, que les enseignants et leurs étudiants investissent pour tester de nouvelles pratiques pédagogies et avoir un accès direct aux ressources. Les modalités de formation y sont variées (petits groupes, environnement documentaire spécifique…).
De multiples ressources papier ou digitales
Mais le domaine qui constitue le point de soutien naturel des BU aux enseignants est celui des ressources. La bibliothèque propose tout un ensemble de ressources, imprimées ou numériques, à consulter sur place ou à distance, ou à emprunter. Ces ressources sont destinées aux étudiants et correspondent, au moins en partie, à ce que les enseignants préconisent pour le suivi de leurs enseignements. Une part des ressources de la bibliothèque sont donc choisies avec le concours des enseignants.
Ainsi, l’enseignant établit une bibliographie des ouvrages qu’il veut recommander à ses étudiants. Il la communique à la BU qui la prend en compte pour réaliser ses acquisitions. Selon les établissements et les disciplines, le dialogue enseignants-bibliothèque sur les ressources est plus ou moins bien organisé. C’est généralement la bibliothèque qui, en fonction de son calendrier d’acquisition, prend l’initiative de contacter les enseignants. Comme pour les ateliers de formation, les interactions dépendent beaucoup des relations interpersonnelles.
Des ressources pédagogiques numériques à adapter
Avec les épisodes de confinement de 2020 et 2021, les pratiques pédagogiques ont évolué. La mise en place de cours à distance ou hybrides a créé chez les enseignants un nouveau besoin, celui de disposer de ressources pédagogiques numériques. Les BU parviennent-elles à accompagner ces nouveaux usages ?
Un décalage entre offre et besoin
En 2020, selon l’enquête statistique sur les bibliothèques universitaires et les services documentaires de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESGBU), chaque BU a acquis en moyenne 17 000 ebooks pour son public d’étudiants, d’enseignants et de chercheurs.
Seul problème, dans la plupart des cas, ces ebooks s’adressent au grand public, pour la culture générale, pour la vulgarisation scientifique, ou aux chercheurs, pour leur activité scientifique. Les ressources proprement « pédagogiques », au sens où elles ont été créées pour un enseignement précis et bien identifié, ne font pas l’objet d’un signalement spécifique et ne sont donc pas dénombrées.
De plus, il semblerait que le catalogue de la BU soit peu consulté par les enseignants, et quand il l’est, ceux-ci y voient des ebooks qui ne répondent pas précisément à leurs besoins. Car, souvent, l’enseignant recherche une ressource qui porte sur un élément de cours précis et qui soit modifiable (au lieu d’être protégé par le droit d’auteur comme le sont les ebooks provenant des éditeurs). Remodeler une ressource entière pour l’adapter à une séquence demande un investissement trop lourd.
Finalement, les BU proposent aujourd’hui aux enseignants des ressources pédagogiques numériques qui ne sont pas toujours bien identifiées et plutôt peu adaptées à leurs besoins.
Quelles pistes pour remédier à cette situation ?
En premier lieu, les bibliothèques pourraient mieux identifier les ressources pédagogiques numériques qu’elles possèdent dans leur catalogue, en les dotant de métadonnées véritablement pédagogiques et identifiables par les enseignants.
Les BU auraient par ailleurs intérêt à enrichir leur offre avec des ressources plus facilement utilisables portant sur des éléments de cours et pouvant être adaptées. C’est le cas des ressources éducatives libres : celles des UNT ou celles d’autres organismes, souvent internationaux.
Pour se faire, se rapprocher des enseignants pour mieux comprendre et mieux répondre à leurs besoins est une nécessité. Les enseignants savent que de multiples sources de ressources pédagogiques numériques existent sur internet, mais ils ne les connaissent pas toutes, et naviguer sur ces sites pour chercher la bonne ressource prend beaucoup de temps. L’aide du bibliothécaire peut s’avérer précieuse. Pour les BU, cela suppose d’ouvrir l’activité de médiation, aujourd’hui centrée sur les étudiants, vers les enseignants.
C’est donc un vaste chantier auquel sont conviées les bibliothèques universitaires : devenir un pôle d’appui pour les enseignants en matière de ressources pédagogiques numériques !