Avec sa charte sonore, l’Université de Bordeaux joue l’harmonie pour sa com'
Par Pauline Tressols | Le | Relations extérieures
Prestige, réussite, ambition, innovation : voici les valeurs et l’identité qu’entend retranscrire musicalement la charte sonore de l’Université de Bordeaux. Lancée au mois de mai, elle se compose d’une vingtaine de mélodies homogènes, à la fois classiques et contemporaines, déclinées pour l’attente téléphonique de l’université ou l’habillage de ses contenus audiovisuels. De quoi garantir la cohérence de sa communication dans l’utilisation des sons.
Traduire une marque en musique ; incarner sa personnalité, ses valeurs et ses missions par le son ; unifier la communication phonique d’une entreprise… Tels sont les enjeux d’une charte sonore. Ces dernières années, avec l’essor des supports vidéo et des réseaux sociaux, la dimension audio est en pleine expansion. Internet donne la possibilité aux organisations de se faire entendre, et reconnaître auditivement.
La plupart des universités françaises se sont déjà dotées d’une charte graphique ; Sorbonne Université et l’Université de Bordeaux l’ont complétée d’une charte sonore, respectivement en février 2020 et mai dernier. « Vu les dimensions de l’établissement, réparti sur plusieurs campus, il était important d’instaurer une identité sonore commune et reconnaissable », pointe Blandine Laccassagne, chargée de communication et responsable du pôle marque, image et conseil de l’institution bordelaise.
« Jusqu’à présent, nous choisissions des musiques disparates pour nos contenus vidéos. Désormais, la charte sonore est utilisée par le service de communication pour l’ensemble de ses productions. Il s’agit d’un outil supplémentaire, qui participe à l’image de marque de l’université », poursuit-elle.
Une identité musicale employée en interne afin de renforcer le sentiment d’appartenance, et permettre une identification forte en externe.
Un projet mené par d’anciens étudiants
Pour réaliser ce projet, l’université fait appel à la start-up bordelaise Getasound. Une agence de communication sonore créée en 2017 par… deux anciens étudiants ! Marvin Bouanani et Quentin Lisembart se rencontrent sur les bancs de l’IAE, en master entreprenariat et marketing. Autre point qu’ils ont en commun : la musique. « Je suis guitariste et chanteur, et Quentin est bassiste. Mais nos répétitions se sont rapidement transformées en brainstorming entrepreneurial », confie Marvin Bouanani.
Leurs constats : « Avec l’émergence de la vidéo et des nouveaux supports de communication audio, les entreprises doivent intégrer une dimension sonore à leur stratégie de marque. Pourtant, seules 20 % d’entre elles ont une identité sonore. En parallèle, on peut aujourd’hui produire de la musique de qualité depuis chez soi ».
Le principe de Getasound en découle : la start-up met en relation des agences de communication demandeuses et des musiciens. L’entreprise et l’université ont déjà travaillé ensemble sur des projets de voix off, avant leur partenariat pour la charte sonore. Pour Blandine Laccassagne, collaborer avec d’anciens étudiants, issus de l’incubateur de l’université, Ubee Lab, « a du sens ».
Le processus de création
Première étape pour l’élaboration d’une charte sonore : le brief artistique. En répondant à un questionnaire, le client renseigne ses attentes et son univers. « Les réponses permettent de traduire les caractéristiques de la marque en caractéristiques musicales », explique Marvin Bouanini. Un brief simplifié ici, puisque les deux fondateurs de Getasound connaissent bien l’identité de l’université.
Après analyse du document, les compositeurs sont en mesure de proposer un ADN sonore pertinent. Autrement dit, un hymne principal, ensuite décliné et adapté aux différents supports de communication utilisés.
L’Université de Bordeaux a reçu une vingtaine de propositions de charte audio, soumises par Getasound. « Tous les projets étaient très bien présentés par les musiciens, qui expliquaient et justifiaient leur création, compte tenu de ce qu’ils avaient compris du brief artistique », souligne Blandine Laccassagne. Le service communication s’est réuni à plusieurs reprises, afin de déterminer les plus et les moins de chaque proposition. « Pour désigner le projet vainqueur, il a fallu s’extraire du “j’aime/je n’aime pas”, et se demander si la musique portait la personnalité de l’université. »
Marvin Bouanani insiste : « L’idée n’est pas forcément de plaire subjectivement, mais de correspondre à la marque objectivement. »
Pour la chargée de communication, le choix a été évident : « Dès le début, j’ai préféré la création de Jean Clémence : une musique dynamique, le bon ton, les bons instruments… Il avait tout à fait compris. » Coïncidence : comptable de métier et passionné de musique, le compositeur Jean Clémence était, lui aussi, étudiant à l’Université de Bordeaux.
Une mélodie unique et caractéristique
D’après Marvin Bouanani, « la musique est un vecteur d’émotions et de valeurs. » Celles de l’Université de Bordeaux, ancienne de 575 ans, sont les suivantes : partage, réussite, ambition, ouverture au monde et innovation. Par sa charte sonore, l’université cherche à renvoyer l’image d’une institution tournée vers l’avant, tout en conservant son patrimoine historique et culturel.
« Pour retranscrire l’identité à la fois prestigieuse et moderne de l’université, la composition musicale mêle deux univers : une base orchestrale incluant des instruments classiques, tels que le violon et le piano, contrasté avec des influences plus contemporaines, comme des rythmiques hip hop et parfois électro », décrit le cofondateur de Getasound.
Résultat : « L’université dispose à ce jour d’une charte sonore très complète : un ADN sonore, dont sont issues une vingtaine de déclinaisons musicales », détaille Blandine Laccassagne.
Parmi elles :
- un logo sonore, comme signature rythmique ;
- une mélodie d’attente téléphonique ;
- deux versions d’accompagnement musical pour les montées événementielles ;
- un habillage audio pour les vidéos et les réseaux sociaux ;
- un générique pour les podcasts, ainsi que trois virgules sonores.
Au total, la réalisation du projet a duré cinq mois - un délai allongé en raison des autres priorités de l’université, liées à la crise sanitaire - et coûté 8 200 euros. Un prix qui comprend l’audit et la cession des droits patrimoniaux.
Ce qu’en dit le compositeur
« En ce qui concerne l’ADN sonore, j’ai voulu travailler sur quatre phases différentes représentant chacune 4 facettes de l’université. La première phase vient définir l’image de l’université, à savoir, le côté historique et prestigieux. La seconde retranscrit les valeurs de partage et d’innovation. La troisième partie est un mélange entre le classique et le style urbain dans le but de montrer que l’université sait s’adapter et vivre avec son temps. La quatrième et dernière partie diffuse une image d’ouverture sur le monde », indique Jean Clémence.
Une identité sonore à la hauteur des ambitions de l’université
À l’image de l’ensemble du service communication de l’université, Bandine Laccassagne est satisfaite de cette collaboration, « à la hauteur de ses ambitions. » Elle espère que, dès la rentrée, la charte sonore sera aussi éloquente que la charte graphique de l’établissement. « À nous de la déployer, de nous en emparer et de faire vivre cette identité », livre la chargée de communication.
Une expérience autour de l’univers du son qui lui a beaucoup apporté : la semaine dernière, elle participait à une formation aux podcasts. Un support technique, que l’université aimerait employer. Quant à la start-up Getasound, d’autres projets sont en cours, notamment pour des établissements scolaires.